Ile Maurice: Platinum Card saga - Commission d'enquête sur l'ex-présidente Ameenah Gurib-Fakim - What next ?

18 Septembre 2022

Le Premier ministre What next ? a abordé le rapport de la commission d'enquête sur l'ex-présidente Ameenah Gurib-Fakim, instituée en mars 2018, en conférence de presse, vendredi. Selon Pravind Jugnauth, le rapport est "damning" et il en a même cité plusieurs extraits. Quelle sera donc la suite ?

Selon le juriste Rajen Narsinghen, le rapport ne fait aucune mention d'actions légales et ce sera désormais au judiciaire de déterminer si l'immunité de l'ex-présidente tient, au cas où il y aurait eu des délits criminels. Pour rappel, la police et l'Independent Commission Against Corruption (ICAC) devront désormais enquêter. Ainsi, Ameenah Gurib-Fakim ne devrait, selon lui, subir aucune répercussion car elle n'est plus en poste. "Si Mme GuribFakim était encore en poste, on aurait pu mettre sur pied un tribunal spécial pour trancher si elle est coupable ou pas, et la destituer de son poste mais la question ne se pose pas, car elle a déjà démissionné." Le juriste explique qu'Ameenah Gurib-Fakim peut actuellement invoquer l'immunité présidentielle et que ce sera à une cour de justice de déterminer si l'immunité peut être prise en considération et dans quelles circonstances.

Ainsi, soutient Milan Meetarbhan, constitutionnaliste, en terme général, il est clair que l'immunité s'applique à tout ce qui est lié à l'exercice des fonctions présidentielles. À ne pas confondre, dit-il, l'exercice de ses fonctions et le mandat. L'exercice de ses fonctions s'apparente donc à quelque chose que la présidente aurait pu faire en relation à son poste. Ainsi, dans le cas actuel, il faudra déterminer si Ameenah Gurib-Fakim a fauté dans l'exercice de ses fonctions. "Et cela sera à la cour de trancher", soutient Milan Meetarbhan. Analyse quasi similaire de l'ex-juge Vinod Boolell, qui indique lui aussi que la question d'immunité relève uniquement des actes au cours des fonctions de la principale concernée.

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Rajen Narsinghen souligne que dans l'affaire Platinum Card, c'était à Planet Earth Institute de décider et de dire s'il y a eu fraude ou utilisation de cette carte à des fins personnelles. "Mais là, nous avons vu un Premier ministre qui se positionne comme un super juge et condamne d'ores et déjà l'exprésidente. Il faut une séparation des pouvoirs et laisser à la justice le soin de poursuivre s'il y a eu effectivement misuse of the card. Pravind Jugnauth ne doit en aucune manière venir tamper dans cette affaire." Il explique que l'article 30A de la Constitution sections 1 & 2 parle de l'immunité de la présidente mais qu'il y a quand même une certaine ambiguïté, dans le sens où il n'est pas clair si cette immunité concerne la durée du mandat ou même après. "Nous avons l'exemple de l'ex-président français Nicolas Sarkozy qui a été poursuivi pour corruption et trafic d'influence et a même écopé d'une peine de prison avec sursis."

Avec l'annonce d'Ameenah GuribFakim d'avoir recours à une judicial review (voir ci-contre), Vinod Boolell explique que cela prendra du temps et qu'entre-temps, il n'y aura aucune enquête de la police, ni de l'ICAC. "Au cas où elle perd, il se pourrait qu'elle se tourne vers le Privy Council, ce qui prendra aussi beaucoup de temps. Si elle perd aussi, ce n'est qu'à ce moment-là que la police et l'ICAC pourront démarrer leur enquête et convoquer des témoins. Puis, ils soumettront leur rapport au Directeur des poursuites publiques et ce sera à ce dernier de dire s'il y a matière à poursuites ou pas." Rajen Narsinghen indique lui que la police et même l'ICAC devront débuter leur enquête à zéro et n'auront pas le droit de puiser des findings du rapport. Donc, comprenez par-là, un très, très long parcours avant d'avoir les retombées de ce rapport. Pour les recommandations du rapport, Milan Meetarbhan souligne qu'il pourrait y avoir des amendements à la Constitution sur les privilèges présidentiels au Parlement en ce sens. Mais cela nécessiterait un vote de trois quarts - soit de la majorité. "Ce sera à l'exécutif de travailler aux amendements au Parlement."

Cependant, Rajen Narsinghen ne peut s'empêcher de questionner le timing de la publication du rapport dans ce cas. "Cela a été fait à un moment où il y a un air de campagne municipale. Où en est le rapport de la commission d'enquête sur le Wakashio ou celui sur les dialysés décédés pendant le Covid ? Le gouvernement décide de rendre publics les rapports quand cela l'arrange. Pourquoi cette politique de deux poids deux mesures ? On s'aperçoit que les commissions d'enquête sont utilisées comme instruments politiques par le MSM..."

Les protagonistes

Le rapport de la commission d'enquête est très accablant pour l'ancienne présidente de la République. Elle annonce déjà qu'elle contestera les conclusions.

Alvaro Sobrinho

L'homme d'affaires angolais est à l'origine des soucis de l'ancienne présidente. Actuellement, il fait face à des poursuites au Portugal. Malgré les controverses, il n'avait pratiquement pas été inquiété par les autorités mauriciennes et son argent avait été jugé propre, à travers son regard, par Ivan Collendavelloo, "deputy Prime Minister" (DPM) à l'époque.

Mauricio Fernandes

D'après une lettre de la présidence demandant l'accès au "VIP Lounge", il est décrit comme le CEO de la banque qu'Alvaro Sobrinho voulait installer à Maurice.

Dass Appadu

C'était le bras droit d'Alvaro Sobrinho qui faisait le lien entre celui-ci et l'ex-présidente.

Ivan Collendavelloo

L'ancien DPM est cité à plusieurs reprises dans le rapport, pour son rôle pour la nomination d'Ameenah GuribFakim à la présidence et ses conseils de démission quand l'affaire a éclaté.

James Knight

Le directeur de communication de "Planet Earth Institute" demandait également des facilités du "VIP Lounge" à la présidente au nom d'Alvaro Sobrinho.

José Pinto

Le directeur d'Alvaro Sobrinho Africa Ltd (ASA) figure parmi ceux qui ont utilisé le "VIP Lounge" le plus. Selon le rapport, pas moins de 12 fois entre octobre 2015 à février 2017.

Me Yousuf Mohamed

Le feu "Senior Counsel" serait celui qui aurait conseillé à l'ex-présidente de mettre sur pied sa commission d'enquête en lui disant, selon Ameenah Gurib-Fakim : "No, you can't do it, but tactically you can."

Sir Hamid Moollan

Le "Senior Counsel" devait présider la première commission d'enquête mise sur pied par l'ex-présidente.

Gilbert Noël

C'est lui qui aurait été le premier à proposer à Ameenah Gurib-Fakim de mettre sur pied une commission d'enquête sans passer par le Conseil des ministres.

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