Le ministère de l'Industrialisation, du Commerce et de la Consommation projette de mettre en œuvre un Appel à Manifestation d'Intérêt (AMI) destiné à sélectionner les acheteurs internationaux de la vanille de Madagascar, répondant à un certain nombre de critères. Une initiative qui n'emballe visiblement pas la totalité de la communauté des acheteurs internationaux qui y voient un risque de nuisance à court et moyen terme de la vanille de Madagascar.
70% des achats mondiaux
C'est le cas notamment de la Sustainable Vanilla Initiative qui a adressé, en juillet dernier, une lettre au ministre de l'Industrialisation, du Commerce et de la Consommation, Edgard Razafindravahy. La SVI, précisons-le, est une initiative qui compte actuellement une trentaine de membres allant des principaux fabricants de biens de consommation et des sociétés mondiales d'arômes et de parfums aux négociants internationaux de gousses de vanille et aux coopératives vendant des extraits de vanille. Collectivement, les membres représentent plus de 70 % des achats mondiaux de gousses de vanille. Dans cette missive adressée au ministre de tutelle, la SVI exprime ses préoccupations urgentes concernant l'AMI. "L'objectif décrit dans ledit document est d'établir une liste d'acheteurs internationaux vérifiés, sur la based'engagements au respect dela réglementation du secteur. Les membres de la Sustainable Vanilla Initiative conçoivent qu'une réglementation efficace et applicable à tous contribue à renforcer les performances du marché et soutenir la professionnalisation du secteur. Nous craignons, cependant, que l'initiativede l'AMI ne remplisse ses finalités envisagées ".
Concurrence déloyale
En effet, pour la SVI, cela pourrait empêcher des importateurs et des exportateurs, par ailleurs qualifiés et professionnels, de participer au marché. " L'AMI demande aux entreprises internationales, en dehors de la juridiction de Madagascar, de fournir des informations financières commercialement sensibles - qu'elles ne sont souvent pas autorisées à partager - et elle est par ailleurs structurée pour créer une liste limitée d'acheteurs internationaux vérifiés. Dans le cas où cet outil est utilisé pour limiter la capacité des importateurs de vanille à acheter de la vanille de Madagascar, ou donner la priorité à des acteurs spécifiques, cela pourrait créer une concurrence déloyale. Les entreprises internationales ont besoin de temps pour mieux comprendre les fondements juridiques et les implications de l'AMI ". Pire, d'après la SVI, le déclenchement de l'AMI est susceptible de porter atteinte aux intérêts des producteurs. " Cela peut nuire directement aux producteurs de vanille. Si les acheteurs internationaux sont exclus de l'achat direct à Madagascar, beaucoup réduiront ou mettront probablement fin à leurs investissements pour le développement durable.
34 000 producteurs
Le risque d'une nouvelle crise de la vanille est d'autant plus élevé quand on sait qu'actuellement, les membres de SVI soutiennent des programmes avec des exportateurs, en appui à plus de 34 000 producteurs et leurs communautés. D'après toujours la SVI, " l'incertitude créée par l'AMI peut conduire à une réticence à court terme à acheter de la vanille de Madagascar. À plus long terme, les acheteurs exclus pourraient basculer leurs achats et programmes vers d'autres origines. Les deux entraîneraient une baisse de la demande de la vanille de Madagascar et une pression supplémentaire sur les prix et le revenu des producteurs ". Dans tous les cas, cette plateforme des acheteurs mondiaux de la vanille affiche sa volonté de " travailler avec le gouvernement de Madagascar et les parties prenantes locales pour améliorer la durabilité, et en particulier les moyens de subsistance des producteurs ". Sur ce point d'ailleurs, les membres de la SVI souhaitent rencontrer les autorités locales, dont en premier lieu le ministre de tutelle " pour discuter des stratégies d'amélioration du secteur au profit des producteurs de Madagascar ".