Burkina Faso: Procès Dabo Boukary - 10, 20 et 30 ans contre Bamba, Diendéré et Yougbaré

L'instruction à la barre de la disparition de l'étudiant de 7e année de médecine Boukary Dabo en mai 1990 a connu son épilogue le jeudi 22 septembre 2022 à 1h.

Les juges de la chambre criminelle de la Cour d'appel de Ouagadougou ont condamné les accusés Magloire Yougbaré à 30 ans de prison ferme plus une amende de cinq millions de F CFA, Gilbert Diendéré à 20 ans de prison ferme et à une amende d'un million ainsi que Mamadou Bamba à 10 années de prison ferme et une amende d'un million de FC FA.

Qu'elle fut longue, la nuit du mercredi 21 septembre dernier au tribunal de grande instance Ouaga II, sis au quartier Karpala ! En effet, l'audience de l'affaire portant sur la disparition de l'étudiant Boukary Dabo, ouverte à 9h, s'est refermée autour de 2h du matin du jour suivant. Il était du devoir des juges de vider ce dossier en 72h comme initialement prévu. C'est chose faite.

Après ces longues heures de débats avec par moments des émotions et des piques envoyées çà et là, les trois personnes accusées, dont deux présentes dans le box des accusés, ont été reconnues coupables. Magloire Yougbaré, qui n'a pas pris part aux débats, écope de la plus lourde peine, soit 30 ans de prison ferme et une amende de 5 millions de F CFA. Il échappe ainsi à la perpétuité comme l'avait souhait le parquet. C'est également un contrepied que la Cour a fait au ministère public concernant le sort de Gilbert Diendéré, lieutenant au moment des faits. Golf, comme on l'appelle affectueusement a été condamné à 20 ans de prison ferme avec une amende d'un million de francs CFA au lieu de 7 ans de prison ferme.

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S'agissant de Mamadou Bamba, les juges ont suivi à la lettre les réquisitions du parquet : 10 ans de prison ferme et une amende d'un million. " Nous étions déjà satisfaits dès que nous avions appris la tenue de ce procès. Nous sommes encore plus satisfaits du contenu des déclarations que nous avons entendues lors des débats. Le procès a confirmé que l'affaire Dabo Boukary est un assassinat politique qui implique le chef de l'Etat, l'un de ses collaborateurs civils que fut Salif Diallo et des militaires du Conseil de l'entente ", a soutenu Me Prosper Farama à l'issue du délibéré.

Pour lui, par la tenue du procès, justice a été rendue non seulement à Dabo, mais aussi aux étudiants qui ont vécu des temps difficiles au campus en 1990. " Pendant des années, on a prétendu que Dabo Boukary était porté disparu, qu'il s'était évadé, qu'il avait été arrêté et libéré. On n'osait pas dire qu'il avait été tué et que le chef de l'Etat d'alors, Salif Diallo et Gilbert Diendéré avaient décidé de déporter son corps à Pô, à 10 km de leur base militaire et de l'enterrer comme un chien, à peine à quelques centimètres. Il est dit ce sont les éléments du Conseil de l'entente qui ont agi. Les noms qui ressortent sont ceux de Gaspard Somé et Maïga et d'autres éléments qui ont battu à tour de rôle non seulement Dabo Boukary, mais aussi tous les autres étudiants détenus ", a-t-il affirmé.

Du côté de la défense, qui estime avoir donné le meilleur d'elle-même pour tirer ses clients d'affaire, c'est naturellement des sentiments de déception qui animent les conseils. Latif Dabo, avocat de Gilbert Diendéré, a confié qu'à tête reposée lui et ses confrères qui défendent le général auront une séance de débriefing avec leur client. A l'issue de ces échanges, ils verront la conduite à tenir, c'est-à-dire s'il faut attaquer ou non la décision. " Chacun a pu se faire sa vérité sur cette affaire Dabo Boukary. Il est vrai que des personnes ont été arrêtées, les personnes ont été bastonnées, conséquence, il y a eu mort d'homme.

On connaît ceux qui ont donné des coups. On connaît ceux qui ont été à la base de la mort de Dabo. Tout le débat tournait sur le fait qu'on avait deux personnes, en l'occurrence Bamba et Diendéré, à la barre. On se pose alors la question de leur responsabilité. Mais dire que la vérité a été dite avec les condamnations que nous avons entendues, convenez avec moi qu'il y a une ligne que je ne saurais franchir ", a souligné Me Latif Dabo.

Avant le délibéré, les accusés Bamba et Diendéré ont présenté une fois de plus leurs condoléances à la famille de Boukary Dabo et souhaité que la terre libre du Burkina Faso lui soit légère. " Je me réjouis de savoir que le peuple saura que je n'ai pas participé à l'arrestation illégale et à la torture de Dabo. Je demande pardon à tous ceux qui ont été victimes des tortures au Conseil de l'entente ", a battu sa coulpe le général Diendéré.

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