Madagascar: Des idées coloniales généreuses, mais pleines d'illusions

En 1823, raconte l'historien Raombana , Radama Ier déclare " qu'il arracherait de force Sainte-Marie aux Français dès qu'il arriverait en face de l'ile... car Sainte-Marie étant une dépendance de Madagascar, ne pouvait pas appartenir à la France ". Les prétentions françaises, ajoute le roi, " lui faisaient bouillir le sang dans les veines " (lire précédentes Notes). Cette réaction virulente du roi merina explose quand il apprend que le gouverneur de La Réunion, David, fait occuper l'ile Sainte-Marie. Mais il décide finalement de renoncer provisoirement à cette

attaque " ayant d'autres conquêtes plus importantes à faire ". Charles Ravoajanahary , Ludvig Munthe et Simon Ayache (Les négociations de 1817 d'après les sources malgaches- Sorabe inédit, Revue d'études historiques Omaly

sy Anio, 1976) indiquent que, de 1768 à 1786, à la suite de nouveaux droits de la France sur Madagascar, il naît beaucoup d'idées parfois généreuses, beaucoup d'initiatives intéressantes comme celle de Benyowski qui envoie N. Mayeur explorer l'intérieur de la Grande ile. Les mêmes auteurs évoquent également " beaucoup d'illusions et

d'ambitions extravagantes ". Ils citent alors les expériences coloniales de Modave, officier philosophe et anti-esclavagiste, et de Benyowski , " Empereur de Madagascar ", qui se soldent par des échecs. Modave, par exemple, imagine et espère " une colonisation nouvelle, toute pacifique et volontiers fraternelle ". D'après lui, " la force est un mauvais moyen de colonisation... C'est par la persuasion et la patience que l'on réussit le mieux à civiliser les peuples et à les assimiler". Modave rejette ainsi toute idée militaire. Et bien avant 1814, il proclame la nécessité d'abolir la traite " pour fonder sa colonisation sur le travail libre ". Quant à Benyowski, il vit à Madagascar un " roman colonial qui se termine sous les boulets de la marine royale ". Néanmoins, ajoutent les trois auteurs, dans ses con tacts avec les populations locales, il semble qu'il n'ait pas si mal réussi. D'où " l'hommage surprenant " de Raombana. " C'était un gentilhomme très humain, adoré par le peuple... Son humanité, son affection pour les populations voisines de son établissement lui avaient valu un tel attachement qu'au moment où la France l'abandonna, elles se rangèrent de son côté le proclamant roi... "

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Mais revenons à l'étude des trois historiens . De la baie d'Antongil à Fort-Dauphin, les Français se font connaitre. Ils multiplient leurs alliances locales, établissent définitivement des courants d'échanges vers Bourbon et l'Ile de France, et de multiples familles franco-malgaches essaiment sur le littoral et pratiquent le commerce dans les ports de Tintingue, Foulpointe, Fenoarivo-atsinanana, Toamasina.

" En 1817, ce nouvel héritage demeure vivant et le roi de Tananarive le fait entrer dans ses calculs. " D'autant plus que deux années plus tôt, la politique française à l'égard de Madagascar hésite, voire se cherche. Les guerres révolutionnaires et napoléoniennes opposent la France à l'Angleterre jusqu'aux rives de l'océan Indien. " Les Français et les Britanniques prennent conscience des modifications qui se produisent à Madagascar. " Car l'essor démographique et militaire du royaume merina change l'équilibre des forces, précisent les trois écrivains. Ainsi, l'ancienne politique des comptoirs et des " droits historiques ", des alliances avec les roitelets de la côte orientale et de l'occupation de Sainte-Marie, ne semble plus possible ni rentable Les Français peuvent maintenir jusqu'en 1811, leurs comptoir malgaches, " postes de ravitaillement " nécessaires pourles Mascareignes. Ils choisissent pour

centre principal Toamasina, dont le port gagne une activité nouvelle. Pourtant, en 1810, la marine anglaise " enlève de force " l'Ile de France et Bourbon et en 1811, elle se présente devant Toamasina et contraint Sylvain Roux à capituler sans condition. " C'est la colonisation officielle française qui est alors éliminée avec le départ de l'agent français et non l'organisation commerciale des traitants." Ces derniers poursuivent tant bien que mal

leur commerce, d'après le Sorabe étudié par les trois auteurs, car " il faut toujours ravitailler les iles ".

En 1815, après le traité de Paris, la France récupère Bourbon et abandonne l'Ile de France à l'empire britannique, mais il lui faut choisir une politique adaptée à l a nouvelle situation des Mascareignes et surtout de Madagascar.

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