Tunisie: Législatives | Programmes des candidats - Comment parer à l'intervention des partis ?

24 Septembre 2022

- Les candidats à la députation doivent présenter des programmes personnels, loin de l'intervention ou des conseils des partis politiques

- Le code électoral amendé ne spécifie pas les mécanismes empêchant le financement par une partie tierce des campagnes électorales des candidats

Maintenant que l'Instance supérieure indépendante des élections (Isie) a publié officiellement le calendrier électoral relatif aux législatives anticipées programmées pour le 17 décembre prochain, que les dés sont jetés, essentiellement du côté des partis politiques et des coalitions électorales qui savent qu'ils n'auront pas le droit de présenter, en leurs noms et sous leurs enseignes, leurs prochains candidats à la députation, dans la mesure où les postulants au palais du Bardo sont obligés, de par les dispositions du code électoral amendé en date du 15 septembre, de soumettre personnellement leurs dossiers de candidature à l'Isie sans avoir à fournir parmi les éléments constituant leurs dossiers un document contenant l'aval du parti politique auquel ils appartiennent ou une autorisation délivrée par la coalition électorale qu'ils représentent et que les délais de dépôt des candidatures sont connus et que les délais de recevabilité ou d'irrecevabilité de ces mêmes dossiers sont fixés dans le calendrier publié par l'Isie (voir La Presse du jeudi 23 septembre), ainsi que les délais relatifs aux recours qu'on est en droit de soumettre auprès de l'Instance au cas où la candidature de quiconque serait rejetée, la grande question qui se pose est la suivante: comment les programmes que les candidats sont tenus de proposer à la confiance, c'est-à-dire au vote des électeurs, vont-ils être conçus. On s'interroge pour savoir si ces programmes seront personnels, ce qui revient à dire l'œuvre de chaque candidat conformément aux attentes des électeurs de la circonscription (délégation) où il va se présenter ou si ces mêmes programmes s'inspirent de la politique générale du parti où il s'active, mais qu'il ne va pas représenter officiellement puisqu'il participe en son nom personnel.

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Et si les partis intervenaient dans le choix des candidats ?

Autrement dit et en plus clair, les analystes et les observateurs qui s'emploient à disséquer le code électoral amendé sur la base duquel se tiendront les législatives anticipées du 17 décembre prochain dans le but d'y découvrir les mécanismes ou les dispositions qui empêcheront les partis politiques de s'immiscer dans les programmes des candidats qui postuleront à titre personnel, mais représenteront en réalité les partis dont ils partagent au moins les grandes orientations politiques ou économiques ont le courage de reconnaître que l'Isie aura les moyens de découvrir parmi les candidats potentiels les vrais indépendants et ceux qui crient à qui veut bien les entendre qu'ils ne représentent que leurs personnes, mais qu'ils répercutent en réalité les idées de certains partis ou de certaines coalitions.

Et même si plusieurs partis politiques, comme Ennahdha, le Parti destourien libre, Afek ou la Coalition dite le Front du salut ont déjà annoncé qu'ils boycotteront les législatives et qu'ils n'y participeront pas, laissant entendre, à tort, -- faut-il le souligner -- que le code électoral amendé le leur permet en tant que formations politiques, alors que le scrutin sur les personnes n'autorise les candidatures qu'à titre personnel, rien ne permet d'affirmer que ces mêmes partis ne prendront pas part au rendez-vous électoral du 17 décembre prochain, d'une manière ou d'une autre. En réalité et dans les faits, ils peuvent intervenir dans le déroulement de l'opération électorale en participant, par exemple, au financement de la campagne électorale de tel ou de tel candidat qui se présentera dans une circonscription-délégation donnée.

Le décret présidentiel amendant le code électoral qui présidera aux élections du 17 décembre 2022 reste, en effet, muet sur les moyens mis à la disposition de l'Isie pour découvrir qu'un candidat est réellement financé par un parti politique quelconque.

Ainsi, après la décision d'annuler le financement par l'Etat des campagnes électorales, a-t-on laissé le champ libre à toutes les manœuvres possibles auxquelles pourraient recourir ceux parmi les milieux ou les lobbies qu'on accuse de soutenir, grâce à leur argent sale, les candidats qui ne pourraient ne pas résister à leurs tentations.

Les députés aux programmes régionaux

Subsiste une autre problématique: les programmes qu'on pourrait découvrir, à l'occasion de la campagne électorale qui se poursuivra du 25 novembre au 15 décembre, seront-ils de dimension régionale ou même locale (dans certaines circonscription à faible densité humaine) ou reflèteront-ils les préoccupations et les attentes de l'ensemble des Tunisiens, à travers les diverses villes du pays ?

Pour être plus clair et plus concis, le député qui ambitionne de représenter la circonscription de Siliana ou celle des Villes de Ksar Helal et de Moknine jumelées, va-t-on faire des promesses en fonction de ce qu'attendent les Silianais ou les Hilaliens et Mokninois (pour une fois vont-ils parler le même langage)?

On se pose la question et on a le courage de dire que pour le moment personne ne peut y répondre en attendant ce que la campagne électorale aura à nous révéler.

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