Madagascar: Après l'hiver, vraiment le printemps ?

De marronnier ("article de presse sur un événement qui se reproduit à date fixe"), j'en ai aussi. 23 septembre, m'avaient appris les anciens cours d'histo-géo, c'est le jour, immuable, de l'équinoxe de printemps. Parce que la géographie de Madagascar situe notre île dans l'hémisphère austral, sur le Tropique du Capricorne. 23 septembre 2022 : le changement climatique obligera sans doute à réajuster nombre de vieilles formules. Parce qu'il ne fait toujours pas printemps. Petite contrariété de saison ou changement climatique ?

Après l'hiver, le printemps. Dans notre hémisphère austral, le printemps est fixé au 23 septembre. Malheureusement, cette période de l'année est également celle des "doro-tanety" qui transforment le vert-jaune de nos paysages en couleur de suie. Les auteurs multi-récidivistes de ces crimes environnementaux sont sans doute les derniers, sinon les seuls, à ignorer les conséquences catastrophiques de leur stupidité obtuse sur les pluies à venir.

Je suis fasciné par la longue histoire de la langue malgache, séparée de l'indonésien commun (INC, comme disent les linguistes) depuis 1500 ans, mais qui continue de présenter des similitudes phonétiques, lexicales et grammaticales, avec les idiomes d'Asie du Sud-Est. J'avais été presque ému de reconnaître parmi les aborigènes austronésiens, dont plusieurs portraits sont exposés au Musée national de l'île chinoise de Taïwan, le portrait de ma grand-mère, à 10.000 km où elle n'avait jamais mis les pieds. Et j'attends le moment de pouvoir lire in situ les inscriptions bilingues, dans un vieux malais et une langue apparentée à notre "teny gasy", sur des stèles érigées par un souverain de Sriwijaya en l'an 683.

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Un héritage cependant que nos ancêtres auraient pu abandonner derrière eux, en quittant Kalimantan (Bornéo) et bientôt la Sumatra des Raminia, est cette funeste tradition du "tavy", la culture sur brûlis. En octobre 2015, les épaisses fumées provenant justement de Sumatra et Kalimantan s'étaient répandues jusqu'en Malaisie et à Singapour où les écoles durent être fermées tandis qu'en Indonésie même le trafic aérien fut fortement perturbé. La culture sur brûlis, mais à une échelle extraordinaire, fut à l'origine de ce phénomène, comme déjà en 1997.

Les noms d'Andriandravindravina (le seigneur de la forêt épaisse : lointain ancêtre des princesses Vazimba qui enfantèrent la dynastie andriana en Imerina) et d'Andriamandazoala (le seigneur qui abat la forêt : lointain ancêtre Zafiraminia de la dynastie régnante en Sakalava Menabe) sont étymologiquement évocateurs d'une grande forêt originelle pillée sans rémission ni relâche, de génération en génération, depuis plusieurs siècles, sinon des millénaires. Les ancêtres, tout "un peuple à la poursuite de la forêt" finalement, pensaient qu'on ne viendrait jamais à bout de cette grande forêt de l'Est. Mais, à force de culture sur brûlis, à force de charbonnage, à force d'imposants madriers et de vulgaires bois ronds, le "Ala Atsinanana" devient "angano", contes et légendes.

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