Madagascar: Atsimo Andrefana - Le développement freiné pour des raisons d'ordre politique

Le paradoxe dans l'une des plus riches en potentiels parmi les 22 régions de Madagascar, c'est que ce sont les adeptes de la politique politicienne qui deviennent des facteurs de blocage pour le développement.

Avec une superficie de 66 502 km2 soit 11,4% de la surface totale de Madagascar, la région Atsimo Andrefana représente l'une des plus vastes étendues du territoire national. C'est aussi l'une des régions qui dispose d'immenses ressources naturelles notamment dans le domaine agricole et minier. Sur les 140 000 ha de surfaces agricoles, seulement une petite portion est effectivement cultivée selon les normes.

Sous-exploitées

Les richesses minières sont également appelées à faire le développement de la région. Malheureusement, elles sont sous-exploitées. Du coup, malgré ses énormes richesses, la région Atsimo Andrefana demeure encore et toujours l'une des plus pauvres de Madagascar. En témoigne le taux de chômage extrêmement élevé. Les récentes enquêtes réalisées par les jeunes d'OBS Mada font état de 64% de la population de Toliara constituée de jeunes dont 80% n'ont pas de travail décent. Le manque d'emploi est tel que parmi les nombreux tireurs de cyclo-pousse de la cité du Soleil, certains sont des diplômés en attente d'emploi. " En attendant mieux, j'opte pour ce travail qui me permet de survivre et d'aider, à mon niveau, ma famille ", déclare ce jeune tireur de cyclo-pousse dont le diplôme de licence ne lui sert pour le moment à rien. Face à cette pauvreté généralisée et persistante, les intellectuels de la région n'ont pas manqué de dénoncer que le développement de la région Atsimo Andrefana en général et de Toliara en particulier sont avant tout d'origine politique.

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Facteurs de blocage

Marcelin Jean Désiré, un " zokiolona " observateur attentif de la vie de cette région, " sa région ", n'hésite pas à pointer du doigt les politiciens locaux comme étant " des facteurs de blocage " du développement de la région. Pour lui qui est un professeur en développement régional de l'université de Toliara, la meilleure solution pour trouver la bonne formule du développement de la région est avant tout de laisser de la place aux techniciens. " Le problème avec les politiciens, c'est que trop souvent, ils privilégient leur intérêt personnel ", expliquent-ils en prenant l'exemple d'un débat technique sur un projet de relance du port de Toliara. " Durant le débat, le premier souci des politiciens qui ont aussi des intérêts économiques a été de demander qu'ils soient impliqués dans la réalisation du projet. " racontent-ils. Non sans faire remarquer que l'administration centrale doit aussi davantage consulter les forces vives régionales ; surtout les techniciens dans les décisions de politique économique à prendre. " Je pense que le président Andry Rajoelina doit écouter davantage les techniciens et le secteur privé, sinon il risque d'avoir des rapports inadéquats pouvant l'induire en erreur dans ses décisions ".

Rembourser les dettes

Marcelin Jean Désiré qui est aussi président du Comité Interrégional des Mines de l'Atsimo Andrefana n'a pas pu s'empêcher de parler du secteur minier qui constitue aussi l'essentiel de l'économie de la région. " Rien qu'en exploitant convenablement les richesses minières de l'Atsimo Andrefana, on peut à terme rembourser les dettes de Madagascar ", explique-t-il. Seulement, rien ne se fait pratiquement plus depuis la décision de suspension des permis miniers. " Cette décision a engendré énormément de problèmes aussi bien pour les opérateurs de la petite mine que de la grande mine ", explique-t-il." Comment peut-on admettre que l'on bloque des activités pendant plusieurs années ", ajoute-t-il en admettant que cette suspension est aussi à l'origine des trafics de pierres de tout genre. La preuve se trouve dans ces richesses minières nationales qui sont illicitement exportées alors que théoriquement, il ne devait pas y avoir d'exploitation car les permis miniers sont suspendus. " Beaucoup de personnes vivent du secteur minier dans la région Atsimo Atsinanana et l'urgence est pour le moment de les laisser travailler même sans attendre le nouveau code minier ". Un projet de nouveau code minier qui, d'après lui, comporte encore de nombreuses lacunes.

Mesures attractives

En effet, en matière de code minier en particulier et de gestion de la filière mine en général, le problème à Madagascar, c'est la quasi-absence de mesures attractives. " On peut avoir à Madagascar beaucoup d'entreprises minières du même genre qu'Ambatovy si les autorités mettent en place des mesures incitatives ", explique-t-il. Malheureusement, c'est le contraire qui se passe puisque les grandes entreprises minières qui ont projeté d'investir à Madagascar ont tout simplement abandonné. " Je connais une grande firme internationale qui n'a pas pu s'installer à Madagascar en raison de l'instabilité juridique et du manque de sérieux en matière de climat des affaires et qui est parti s'installer au Mozambique avec succès ", relate Marcelin Jean Désiré en regrettant que " que l'on perde ainsi des millions de dollars d'investissements et des emplois pour les jeunes ".

Espoir

Encore heureux que pour lui, il y a encore de l'espoir et tout n'est pas encore perdu si l'Etat se décide enfin à créer un environnement des affaires capables d'attirer et d'intéresser les grands investissements miniers à Madagascar. Sur ce point, il n'a pas manqué d'évoquer le cas de Base Toliara. La communauté des investisseurs miniers dans le monde observe avec attention comment l'Etat malgache va gérer ce cas où un des leurs a déjà engagé des millions de dollars d'investissements sans être sûr de pouvoir continuer et aller jusqu'au bout. " Le problème pour les dirigeants de Base, c'est qu'ils ont déjà engagé beaucoup d'argent et croient en la réussite de leur projet, autrement ils auraient déjà abandonné comme les autres ", conclut Marcelin Jean Désiré.

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