Afrique de l'Ouest: Arrivée mission CEDEAO - Un comité d'accueil hostile à la délégation dans les rues de Ouagadougou

Mahamadou Issoufou, Médiateur de la CEDEAO pour le Burkina Faso

Quelques manifestants hostiles à l'arrivée d'une délégation de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'ouest (CEDEAO) se sont fait entendre dans les rues de Ouagadougou ce mardi 4 octobre 2022. Nous leur avons tendu notre micro pour comprendre leurs motivations.

Des manifestants bruyants bloquent la circulation sur l'avenue de l'aéroport ce mardi 4 octobre 2022. Un dispositif militaire leur bloque le passage vers l'entrée de l'aéroport international de Ouagadougou située à quelque 500m plus loin.

Sur des pancartes, banderoles et affiches qu'ils brandissent, des slogans hostiles à la France et à la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'ouest (CEDEAO). Par contre, les drapeaux russes et burkinabè sont portés en triomphe, ainsi que des photographies du président Vladimir Poutine et du capitaine Ibrahim Traoré, président du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) qui vient de prendre la tête du pays depuis le dimanche 2 octobre à la suite de la démission du lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba.

La quasi-totalité des manifestants à qui nous tendons le micro se présentent comme commerçants et aucun ne lie sa présence à l'appel d'une structure quelconque.

" Personne ne nous a payés pour sortir. On a même laissé notre travail pour venir. On se bat pour notre avenir ", clame Abdoul Adi Korogo, un jeune commerçant visiblement remonté contre la CEDEAO qu'il accuse d'être un suppôt de la France.

Abdoul Adi Korogo : " Personne ne nous a payés pour sortir ". Crédit photos : Augustin Sogoh Sanou pour Sidwaya.info

" Comme la jeunesse est consciente maintenant, la France ne peut plus venir, elle envoie donc la CEDEAO ", déclare-t-il. Mais, prévient le jeune Korogo, ils sont désormais vigilants.

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Siaka Zakané, qui se présente comme un " maître chiens de sécurité " est persuadé que l'ancien colon est la source des malheurs du Burkina et qu'elle passe par l'institution communautaire pour atteindre ses objectifs.

" J'aimerais dire au capitaine Ibrahim Traoré de prendre le temps d'écouter la CEDEAO afin de savoir ce que la France veut faire. Parce que la CEDEAO est un émissaire de la France ", se convainc-t-il.

Personne dans cette assemblée agitée ne semble prêt à discuter de l'exactitude ou des fondements de cette accusation. C'est plutôt l'attitude à adopter pour se faire entendre qui suscite des avis contradictoires.

Bien qu'hostile à la mission annoncée, M. Zakané trouve qu'il y a lieu tout de même de la laisser passer pour connaître leurs intentions.

Dans la soirée du lundi 3 octobre, le capitaine Ibrahim Traoré avait pourtant appelé les populations à ne pas entraver cette mission de la CEDEAO.

Mais ce matin, les manifestants qui se présentent comme ses soutiens l'entendent d'une autre oreille.

Sylvain Ouédraogo, vendeur de matériaux de construction, s'est d'abord porté en faux par rapport à ce communiqué. " Le président n'a rien dit, les gens mentent ", réfute-t-il.

Face à notre insistance sur le fait que le MPSR a bel et bien produit un communiqué lu sur la chaine nationale, il finit par mettre du bémol dans ses propos.

Siaka Zakané : " Je souhaite que le capitaine suive ce que son cœur lui dicte. " Crédit photo : Augustin Sogoh Sanou

" C'est pour ne pas qu'il y ait des dégâts ", prétend-il, puis d'insister sur le fait que la manifestation est une lutte pour défendre les intérêts du pays face à la CEDEAO et à la France.

Abdoul-Aziz Derra qui se présente également en tant que commerçant et membre de la coordination des jeunes musulmans du Burkina Faso, est plus conciliant.

Il se dit contre tout acte de violence dans la mesure où cela véhicule une mauvaise image des manifestants et du pays.

" Il est important que nous respections les déclarations des autorités. Nous ne sommes pas ici pour empêcher la délégation, mais pour manifester notre soutien au président. Nous allons attendre les décisions de la CEDEAO et si ça ne nous convient pas, nous saurons nous faire entendre ", soutient-il.

Les positions sont ainsi tranchées vis-à-vis de ceux qu'ils estiment contre les intérêts du pays. Mais par dessus tout, les manifestants crient leur soutien au jeune capitaine Ibrahim Traoré à qui ils demandent de rester à la tête de l'Etat.

" Je souhaite que le capitaine suive ce que son cœur lui dicte. Quand on écoute ses déclarations sur la souffrance des Burkinabè en brousse, on souhaite qu'il s'en inspire pour diriger le pays. Nous on est derrière lui jusqu'à la mort ", lance-t-il, ponctué de son point levé.

" Cette année, les populations n'ont pas pu cultiver. Si Ibrahim Traoré arrive à ramener les gens au champ, s'il suit ce que le peuple veut, il va voir qu'il sera un deuxième Thomas Sankara ", prophétise Siaka Zakané.

Jusqu'au moment où nous quittons les lieux dans la mi-journée, la ferveur continue de battre son plein et point de délégation de la CEDEAO.

Sidwaya.info

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