Cote d'Ivoire: Demande de bilan des enquêtes sur la crise ivoirienne par l'OIDH - La CPI rattrapée par l'histoire

analyse

La chambre préliminaire III a autorisé, le 3 octobre 2011, le Bureau du Procureur, à ouvrir, sur sa propre initiative, une enquête sur la crise post-électorale en Cote d'Ivoire, au sujet des crimes relevant de la compétence de la Cour pénale internationale (CPI), qui auraient été commis depuis le 28 novembre 2010 à la faveur des élections présentielles de la même année en Côte d'Ivoire.

Onze ans après, l'Observatoire ivoirien des droits de l'homme (OIDH) fait le constat que le temps passe et l'espoir de voir éclater la vérité devant la Cour pénale internationale, s'amenuise. Les lignes n'ont véritablement pas bougé comme beaucoup le souhaitaient, même si après enquêtes, certains présumés instigateurs de la crise, en l'occurrence Laurent Gbagbo, président de la République d'alors et Charles Blé Goudé, son ministre de la Jeunesse, furent interpellés par les autorités ivoiriennes et confiés à la CPI afin d'être jugés.

Des procédures qui se sont soldées par l'acquittement des deux accusés en 2021. Mais aujourd'hui, tout le monde s'accorde à dire que la CPI n'a pas joué pleinement le rôle à elle confié.

Elle n'a pas pu situer les responsabilités dans les deux camps qui se sont affrontés. Malheureusement, force est de constater qu'après plus d'une décennie, on n'a eu droit qu'à un seul jugement qui s'est soldé par un non-lieu et un acquittement des sieurs Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé.

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L'OIDH, à travers Eric- Aimé Sémien, son président, regrette le fait que la CPI n'a pas saisi l'occasion pour véritablement enquêter dans le camp Ouattara. L'observatoire déplore que la CPI n'ait pas avancé dans ses enquêtes.

Karim Khan, l'actuel procureur de la CPI, a l'occasion de franchir la ligne rouge que Fatou Bensouda n'a pas osé franchir

Or, pour cela, elle disposait de toutes les cartes pour bien mener cette mission. La preuve : cet observatoire des droits humains, à travers une lettre adressée au Procureur, a tenu à rappeler qu'une décision du 3 octobre 2011, autorisait son bureau à ouvrir une enquête en Côte d'Ivoire afin de situer toutes les responsabilités.

Malheureusement, force est de constater que Fatou Bensouda n'a pas osé le faire si bien qu'aujourd'hui, le travail de cette institution sur le terrain, garde un goût d'inachevé. Les faits sont cruels. Les parents des victimes attendent depuis plus d'une décennie, impatiemment, que la vérité soit dite et que les responsabilités soient situées afin de faire leur deuil.

Aujourd'hui, le fait qu'elle soit accusée à tort ou à raison de soutenir le camp des vainqueurs de cette crise au détriment des vaincus, fait que cette Cour se voit rattrapée par l'histoire. Osons croire que cette interpellation venant de l'OIDH, donnera l'occasion à la CPI de redorer son blason.

Aujourd'hui, Karim Khan, l'actuel procureur de la CPI, a l'occasion de franchir la ligne rouge que Fatou Bensouda n'a pas osé franchir, c'est-à-dire étendre son enquête en investiguant dans le camp des vainqueurs, celui de Ouattara à qui on reproche encore beaucoup de choses.

Confortablement assis dans son fauteuil, l'actuel Président de la République de Côte d'Ivoire acceptera- t-il de livrer à la CPI, certains de ses Com- Zones qui ont participé activement à sa conquête du pouvoir ?

Aujourd'hui, en guise de récompense pour leur bravoure, beaucoup d'entre eux ont été promus à de hauts postes de responsabilités tant dans l'Administration publique que dans l'Armée. Alassane Ouattara va-t-il courir le risque de scier la branche sur laquelle il est assis ?

En livrant tous ces ex- combattants à la CPI, ce serait, pour lui, se faire hara-kiri. C'est d'autant plus vrai qu'Alassane Ouattara a déjà vécu, en 2017, une mutinerie qui a failli l'emporter.

Cela dit, un des leviers sur lequel le président ivoirien pourrait s'appuyer pour apaiser les cœurs des parents des victimes, serait de poser des actes en termes de dédommagements conséquents.

Peut-être que si cela est fait, l'OIDH pourrait reconsidérer sa position par rapport à la nécessité d'interpeller la CPI sur la réouverture d'une enquête sur cette crise post-électorale ivoirienne qui a fait plus de trois mille victimes en Eburnie.

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