Maroc: Appel à la communauté internationale pour diligenter une enquête impartiale sur l'embrigadement d'enfants mineurs retirés à leurs mamans de force

Communiqué final du VIIIème Congrès de l'OSFI

Actualiser le Code de la famille en conformité avec les Directives Royales

Le monde, dont notre ensemble régional et national, vit des mutations inédites du fait des transformations numériques, des changements climatiques et du retour des guerres et conflits armés, ce qui exaspère la vulnérabilité et les disparités sociales et territoriales et engendre l'émergence de courants conservateurs et d'extrême droite, hostiles à la modernité et la démocratie, menaçant les droits et libertés.

Les femmes sont, à cet effet, les plus grandes victimes de tous ces processus. Hélas, toute mutation dans le sens de l'exaspération des crises armées et des conflits autour de l'énergie et des marchés occasionne une lourde charge pour les pays qui aspirent à édifier des modèles de développement émergents, et c'est ce que nous constatons aujourd'hui d'autant plus que nous ne nous sommes pas encore rétablis des répercussions de la pandémie du coronavirus qui ont ralenti les économies émergentes, creusé davantage le fossé de l'inégalité et dévoilé des tares dans les mécanismes de la solidarité internationale, bien que cela ait eu un aspect positif unique consistant à alerter le monde sur l'opportunité de l'édification des fondements de l'Etat national, projet qui a toujours été défendu par l'USFP, étant l'expression marocaine de l'option démocratique sociale.

%

Le VIIIème Congrès de l'OSFI s'est tenu à l'approche du 57ème anniversaire de l'enlèvement du martyr et leader référentiel de tous les socialistes marocains, El Mehdi Ben Barka qui avait grandement contribué à asseoir les bases de progrès, d'émancipation et de modernité dans notre pays à travers sa lutte en faveur du droit des femmes à l'enseignement et à l'emploi dès les débuts de l'indépendance de même que son appel à leur appropriation économique et sociale à une époque historique précoce dans l'édification de l'Etat national post-colonisation.

C'est pour cette raison que la remémoration de cette grande posture culturelle, militante et politique dans le contexte mondiale régional et national actuel, c'est la mise en évidence des valeurs de sacrifice et de solidarité pour un monde à l'abri des guerres, de l'exclusion et de la ségrégation sur la base du genre, de la filiation, de la religion ou de la langue.

Le VIIIème Congrès des femmes ittihadies intervient également dans le contexte d'une dynamique organisationnelle considérable enclenchée immédiatement à la suite des élections du 8 septembre 2021, une dynamique lancée à l'issue du XIème Congrès national de l'USFP, qui a été marqué par une contribution remarquable des femmes du parti à sa réussite de même que par une représentation féminine sans précédent dans les différentes instances nationales, régionales et locales traduisant, à l'instar du IXème Congrès de la J-USFP la conscience ittihadie constamment renouvelée de la centralité de la question féminine dans le projet du parti et l'appui manifeste aux droits de la femme tels que reconnus par les conventions mondiales des droits de l'Homme.

Parachèvement du chantier constitutionnel à travers l'émission de toutes les lois organiques adoptées par la Constitution de 2011

Par ailleurs, en revenant sur le scrutin du 8 septembre 2021 qui a consacré une avancée de l'USFP en matière de sièges remportés au terme des élections législatives et des élections des conseils territoriaux, résultats consolidés davantage par les dernières échéances partielles, et bien que notre parti ait choisi de se positionner dans l'opposition, nous escomptions de l'actuel gouvernement, considérant ses prétentions libérales, d'une part, et ses déclarations d'intentions sur la mise en œuvre des dispositions du nouveau modèle de développement d'autre part, qu'il s'allierait aux côtés des droits des femmes particulièrement et qu'il produirait des politiques avec davantage d'ouverture et d'émancipation d'une manière générale après la défaite électorale du parti qui représentait l'islam politique, ce qui avait illustré l'attachement des Marocains à l'instauration d'un nouveau modèle de gestion des affaires publiques.

Or, le gouvernement actuel a, hélas, persisté dans l'ancien processus conservateur et a échoué, là-dessus, dans sa gestion de la crise sociale et économique des suites de la pandémie du coronavirus, du conflit russo-ukrainien et de la sécheresse, accentuant par là la détérioration du pouvoir d'achat des citoyennes et citoyens et l'effondrement du revenu des ménages, et cela a impacté naturellement les droits et libertés des femmes.

Le VIIIème Congrès national des femmes ittihadies invoque au cours de ces étapes déterminantes toutes les luttes militantes féminines pour l'entière égalité, dont le rôle édifiant joué par l'USFP tant par le biais de son secteur féminin qu'à travers son appui aux revendications du mouvement féminin dans des conditions très difficiles ou encore par son alliance avec tous les canaux partisans, droitistes, civils, démocratiques et progressistes.

En outre, l'invocation de ces expériences nous permet de procéder à une lecture réformatrice du processus militant féminin qui a connu des situations de flux et de reflux en réaction à tous les tournants politiques et sociétaux.

D'autre part, si en tant que femmes, nous sommes parvenues à réaliser de multiples acquis notamment avec l'avènement du gouvernement de l'alternance et les débuts de la nouvelle ère, la réactivité de Sa Majesté le Roi Mohammed VI quant aux dossiers revendicatifs féminins ayant traduit la devise du projet sociétal moderniste et démocratique parallèlement au nouveau concept de l'autorité, nous nous devons de prendre conscience de la nécessité de fructifier tous ces acquis et les préserver de même que d'actualiser tous les schémas juridiques référentiels dont les objectifs ont été saturés et ne répondent plus aux mutations sociétales marquées par une plus grande participation des femmes dans tous les domaines économique, politique et culturel.

Et le VIIIème Congrès des femmes ittihadies se tient parallèlement à la commémoration de la Journée nationale de la femme qui a été instituée depuis 19 ans, le 10 octobre 2003, coïncidant avec l'annonce par Sa Majesté le Roi du Code de la famille qui a introduit des amendements substantiels dans le Code du statut personnel répondant à de nombreuses exigences du mouvement féminin par ailleurs combattu par les courants fondamentalistes.

Or après l'écoulement de plusieurs années depuis cette douce révolution ayant bouleversé des schémas sociétaux désuets au profit de la modernisation sociétale par l'entremise de la famille, des lacunes se sont révélées nécessitant l'actualisation du Code pour le rendre cohérent avec les mutations sociétales qui marquent une plus grande participation des femmes à la gestion des familles par la sollicitude et le financement de même pour assurer sa compatibilité avec les perspectives du devenir moderniste auxquelles nous aspirons tous.

En foi de quoi fut notre interaction positive avec l'Appel de Sa Majesté le Roi Mohammed VI dans le dernier discours de la Révolution du Roi et du peuple à l'actualisation du Code de la famille à la lumière d'une évaluation objective de ce qu'il a réalisé mais aussi de ses lacunes et notre appel à la célérité de l'ouverture du chantier de réforme du Code pénal afin que triomphent les libertés individuelles et collectives dont en tête les droits et libertés des femmes.

Ainsi le VIIIème Congrès national des femmes ittihadies, en choisissant le slogan " Emancipation, Egalité, Equité " et à la suite de sa discussion de tous les documents présentés par ses diverses commissions dans un climat reflétant l'esprit démocratique dont sont imprégnées les congressistes et l'audace qui a caractérisé les délibérations sur les questions des femmes marocaines, affirme ce qui suit : ° Les recommandations de la Commission spéciale sur le modèle de développement et les conclusions de ses travaux, qui traduisent la continuité du projet démocratique moderne à travers la formule de l'Etat social escomptée, considérée comme étant une feuille de route pour la prochaine étape, en tant que bien national commun, n'ont pas encore trouvé un porteur politique, qui ne peut être que sous un gouvernement harmonieux, avec une stratégie sociale claire, et un référentiel démocratique participatif. Malheureusement, tout cela manque dans le gouvernement actuel, ce qui constitue une occasion ratée pour le pays de poser en pratique les jalons d'un Etat social fort et juste. Malheureusement, nous sommes passés d'un conservatisme identitaire à un conservatisme techniciste. °

L'amélioration des conditions des femmes et de toutes les classes et catégories sociales lésées par les politiques conservatrices technicistes et la poursuite de l'économie de rente, est intimement liée au progrès sur deux voies qui doivent être parallèles : la voie de la reconnaissance explicite de la primauté des conventions et des chartes internationales des droits humains, ce qui nécessite une révision du Code pénal, de celui de la famille ainsi qu'autres législations; et la voie de l'édification de l'Etat social à même de réduire les disparités entre les classes et les régions, ainsi qu'entre les genres.

° Le retour en force des discours qui mettent l'accent sur la centralité de "tamaghrabit", est l'expression d'une prise de conscience de la singularité de la nation marocaine ancrée dans la profondeur historique, et de la fierté de l'humanisme marocain. Il s'agit d'une force pour se libérer de toutes les formes de faux centralismes, aussi bien oriental qu'occidental. Mais les appels de la spécificité ne doivent pas se convertir en un outil de production de discours conservateurs et isolationnistes qui ne croient pas à l'égalité et aux libertés individuelles.

Or, le modèle marocain historique est basé sur une interaction positive avec tous les courants de modernisation et de rationalité. ° Les débats prévus sur la réforme et la modernisation du Code de la famille, du Code pénal, ainsi que le projet de loi sur l'avortement connaîtront inévitablement la mobilisation de la part des forces conservatrices de leurs capacités d'organisation et de propagande afin de contrer toutes les possibilités de modernisation.

Pour cela, il faut chercher des alliés, qu'ils soient idéologiques ou objectifs, pour gagner la bataille des lois libératrices et compatibles avec les engagements internationaux du Maroc, ce qui nécessite également l'ouverture et le soutien à toutes les interprétations modernistes du texte religieux, soucieuses des finalités de la charia dont le but est la liberté, la dignité et l'égalité.

° La défense des valeurs universelles des droits humains ne signifie pas l'exclusion d'autres points de vue, mais plutôt l'instauration d'une société de la différence et du pluralisme, qui est la formule idéale pour gérer les différences et garantir la cohabitation dans l'espace public, un espace qui exclut encore les femmes de la libre circulation. Le VIIIème Congrès national de l'OSFI a pris acte des développements de la première cause nationale, et salué tous les acquis diplomatiques réalisés par le Maroc, surtout en ce qui concerne l'appui de la communauté internationale au Plan sérieux et crédible d'autonomie au Sahara sous souveraineté marocaine.

Ce soutien s'est traduit par les récentes positions américaine, allemande et espagnole, ainsi que par la décision de nombreux pays de différents continents d'ouvrir des consulats dans les villes de Laâyoune et Dakhla, notamment des pays appartenant à nos espaces régionaux africain et arabe.

C'est l'occasion d'appeler la communauté internationale à assumer ses responsabilités en diligentant une enquête impartiale et objective sur les conditions des séquestrés dans les camps de Tindouf en Algérie, qui subissent diverses formes d'atteinte à leur dignité humaine, en particulier les femmes séparées de force de leurs enfants qui se trouvent enrôlés dans les rangs des milices du polisario, et qui souffrent également de la médiocrité des services de santé et d'éducation, de sorte que les séquestrées des camps de l'humiliation et de la honte à Lahmada sont les premières victimes du vol par les milices du polisario de l'aide internationale.

Le VIIIème Congrès de l'OSFI considère que le processus de construction de l'Etat social national fort, comme le stipulent les conclusions de la Commission spéciale du modèle de développement, ne peut être séparé de celui de la démocratisation de l'Etat et de la société, et il ne peut être également séparé de la reconnaissance des droits et de l'autonomisation économique et politique des femmes. Le VIIIème Congrès de l'OSFI appelle instamment :

- Parachèvement du chantier constitutionnel en adoptant toutes les lois organiques instaurées par la Constitution de 2011 conformément à son esprit de démocratie, d'ouverture, de solidarité, de reddition des comptes d'équité envers les femmes et de consensus représentant une approche participative.

- Harmonisation du droit national avec le contenu et l'esprit des conventions et chartes internationales, notamment au niveau du droit pénal, qui contient encore des dispositions contraires aux libertés individuelles et collectives.

- Mettre en œuvre la pleine égalité des droits et des devoirs, notamment au niveau des politiques et des dépenses publiques, ainsi que des postes dans les institutions constitutionnelles, nationales et représentatives, en fonction des progrès réalisés par les femmes en termes d'éducation, de formation et d'expérience.

- Annuler toutes les lois discriminatoires à l'égard des femmes et mettre fin aux prétextes visant à maintenir des modèles patriarcaux, incompatibles avec les études qui ont démontré l'étendue de la participation des femmes à la production de richesses et au soutien des familles.

- Se consacrer à la mise à jour du Code de la famille avec une interaction positive et ouverte avec les Directives Royales à cet égard, pour un Code juste et ouvert sur les chartes internationales des droits de l'Homme, et sur les interprétations d'un point de vue religieux, en particulier en ce qui concerne l'interdiction du mariage des mineures et la restriction du pouvoir discrétionnaire du juge d'autoriser la polygamie à l'horizon de son abolition.

- Accélérer la promulgation de la loi relative à la légalisation de l'avortement médicalisé, en prenant en compte la volonté de la femme d'avoir des enfants ou non, les cas liés à la santé reproductive, ou encore les agressions sexuelles. En plus de l'ouverture sur les expériences internationales en matière d'interruption volontaire de grossesse (IVG).

- Ouverture d'un débat sérieux sur la réforme du système successoral en faveur de l'égalité et de l'annulation de toutes les lois qui constituent un champ de détournement des droits des héritières en opposition aux finalités de l'islam et en faveur de lectures obsolètes nées de contextes méprisant les femmes et ne reconnaissant pas leur contribution à la production de richesse et à sa valorisation.

- Reconnaissance par l'Etat marocain du travail non rémunéré des femmes dans la perspective de sa compensation financière.

-Adoption de politiques d'emploi destinées aux femmes pour lutter contre la féminisation du chômage.

- Elaboration de politiques renforçant l'économie sociale en vue de l'autonomisation de l'économie féminine.

- Faciliter l'accès des filles à l'enseignement, tout en garantissant sa continuité, surtout dans les campagnes et les zones périurbaines qui ont connu des difficultés lors des cursus scolaires pendant la pandémie du coronavirus.

- Développement du cadre juridique relatif à la santé reproductive en assurant la gratuite et l'accessibilité.

- Rendre justice aux femmes en matière de lois sociales, notamment celles se rapportant au prochain registre social unifié, à la généralisation de l'assurance maladie obligatoire, à la retraite et à l'indemnisation sur la perte de l'emploi.

- Criminaliser la préférence en matière salariale entre les salariés des deux sexes dans le secteur privé.

- Réformer la loi organique des finances à travers l'institutionnalisation de l'approche genre lors de la mise en oeuvre des budgets sectoriels et annexes afin de garantir la parité en matière de bénéfice des deniers publics, et réformer le code fiscal au profit d'une justice fiscale pour les femmes, en plus de rendre obligatoire l'adoption de l'approche du genre social dans les budgets locaux.

- Promouvoir la participation politique et syndicale des femmes, tout en élargissant leur représentativité au sein des centres de décision politique et économique, conformément au principe de la parité globale.

- Combattre tous les clichés véhiculés par les médias, avantageant l'homme et infériorisant les rôles de la femme. Des clichés qui persistent via certains canaux, comme les prêches du vendredi et certains manuels scolaires.

Le VIIIème Congrès confirme son soutien aux femmes iraniennes contre la tyrannie des mollahs et rappelle que les femmes sont les premières victimes de ces régimes une fois au pouvoir. Le Congrès de l'OSFI exprime, d'une part, son soutien à toutes les femmes victimes des guerres et des conflits armés, aux réfugiées, aux victimes de la migration irrégulière, et, d'autre part, appelle à la cessation de toutes les formes de violences à l'encontre des femmes, en particulier les agressions sexuelles.

Le VIIIème Congrès de l'OSFI salue l'ensemble des congressistes qui ont contribué à la réussite de cet exercice démocratique. Il réitère la détermination des femmes ittihadies à adhérer à la marche du parti en prenant part à toutes les luttes militantes en vue d'instaurer la justice, l'égalité et l'émancipation. Et ce tout en se libérant des discours conservateurs et sans faire de concessions quant aux références des critères modernistes.

AllAfrica publie environ 400 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.