Soudan: La civilisation Koush et l'énigme de la langue méroïtique

Le temple du Lion à Naga au Soudan, vestige de l'empire méroïtique. (Illustration).

Méroé, la dernière capitale de la civilisation Koush trône toujours dans les sables du Soudan, à quelques 260 kilomètres au nord de Khartoum, sur les berges de Nil. Plus de 200 pyramides inscrites au patrimoine mondiale de l'Unesco marquent encore la grandeur passée d'une civilisation méconnue. Bien moins étudiée que sa voisine et rivale égyptienne, la civilisation Koush recèle encore de nombreux mystères, à commencer par sa langue, le méroïtique. RFI a rencontré un linguiste qui travaille avec le département d'archéologie de l'université de Khartoum.

Dans l'impossibilité de visiter les archives de la capitale, dont l'accès est restreint par la junte militaire, nous retrouvons le professeur Mohammed Jallal Hashim au café de la maison de l'héritage. Ce linguiste a collaboré avec le département d'archéologie de l'université de Khartoum. Pour lui, le mystère de la langue méroïtique, réside d'abord dans la nature des textes à déchiffrer.

" Environ 95% des archives que nous avons sont des textes funéraires. Le genre de texte qu'on peut retrouver sur les tombes. Nous n'avons pas de textes littéraires. Comme des histoires qui parlent de la vie quotidienne ou certains évènements, comme nous pouvons trouver en langage égyptien ou plus tard dans la langue Nubienne. Ce qui est crucial ici, ce n'est pas de savoir combien de stèles nous avons, mais plutôt quelle est la richesse en soi du langage ? Pour le moment, grammaticalement ou linguistiquement parlant, nous n'avons que des textes semblables. Et c'est pour cela que le méroïtique est une énigme, un puzzle ! "

Langue afro-asiatique ou nilo-saharienne ?

En 100 ans de recherche, les spécialistes peuvent désormais lire et prononcer les inscriptions méroïtiques, sous leurs forme cursive ou hiéroglyphique. Mais leur sens reste toujours incompris et sujet à controverse.

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" Personne ne peut certifier qu'il y a eu un langage méroïtique parlé. Ce pourrait être un jargon. Une sorte de dialecte religieux utilisé pour les stèles funéraires. Cependant les textes et les phrases que nous avons sont très stylistiques. Elles se rapprochent de certaines catégories linguistiques. Il n'y a pas de consensus sur ces caractéristiques. C'est plutôt source de dispute. Certains pensent que cette langue est afro-asiatique, d'autres, nilo-saharienne. Il y a des preuves des deux côtés. C'est toute l'énigme ! "

Koush ou méroïtique était un puissant royaume

Le professeur rappelle que le Royaume Koushite a trop longtemps été étudié à l'aune de la civilisation égyptienne, comme dans l'ombre des pharaons du nord. Le méroïtique serait pourtant la première langue typiquement africaine à avoir été écrite.

La civilisation koush ou méroïtique était un puissant royaume dont les origines remontent au 4ème millénaire avant notre ère. Surnommés " les pharaons noirs ", les souverains koushites ont progressivement étendu leur empire jusqu'à régner sur un territoire qui, à son apogée lors de la 25ème dynastie, a conquis l'actuelle Égypte. Son déclin amorcé au 6ème siècle avant JC n'a pas empêché ses rois et ses reines de défaire des troupes romaines en Nubie en 24 avant JC.

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