Le président du Comité interrégional des Mines de la région Atsimo Andrefana et professeur en économie et développement régional à l'université de Toliara livre son avis sur la situation de Base Toliara. Il pense que la décision de suspension contraint d'autres investisseurs miniers à " fuir " Madagascar.
Il n'est pas allé par quatre chemins. Jean Désiré Marcellin, professeur à l'université de Toliara et président du Comité interrégional des Mines dans la région Atsimo Andrefana pense qu'il aurait fallu réfléchir par deux fois pour la décision de suspendre Base Toliara.
" Il ne faut pas oublier et il faut souligner que c'est le pays qui a fait appel à des investisseurs pour le secteur minier, comme Base Toliara. Le processus a pris vingt années avant d'obtenir tous les permis nécessaires à l'exploitation. Et c'est notre même pays qui ne la laisse pas travailler. Il y a vraiment contradiction " explique-t-il. D'après toujours Jean Désiré Marcellin, les investisseurs miniers du monde suivent de près le cas de Base Toliara et surtout comment l'État va gérer ce cas spécifique. La société a déjà investi des millions de dollars, et se retrouve pourtant dans une incertitude de reprise de ses activités.
" Une grande firme minière voulant s'installer à Madagascar a finalement rejoint le Mozambique pour travailler. Le climat des affaires et l'instabilité juridique dans notre pays ne l'ont pas persuadé. Et bien sûr, ce sont des pertes pour notre économie et l'emploi pour les jeunes Malgaches " ajoute-t-il encore. À en croire ses explications, il y a d'autres mesures possibles à part la suspension. " Nous ne sommes pas le seul pays minier dans le monde. Et seulement 6% du gisement mondial d'ilménite se trouve à Madagascar " précise-t-il. " En outre, je rappelle que la région Atsimo Andrefana repose sur d'énormes richesses mais reste pourtant l'une des plus pauvres du pays " souligne Jean Désiré Marcellin.
80% des jeunes de Toliara n'ont pas de travail décent. De nombreuses filières minières rapportent peu ou pas du tout et ne concernent pas un grand nombre de population. Pourtant la région Atsimo Andrefana possède la plus vaste étendue de superficie avec 66 502km2 soit 11,04 % du territoire national.
" L'exploitation minière dans cette région, si elle est menée à bon escient, permettrait à elle seule de rembourser les dettes du pays et de faire monter son économie à un niveau élevé. La suspension des permis miniers reste un des obstacles à l'exploitation minière de cette partie de l'île " argumente le président du Comité interrégional des mines de l'Atsimo Andrefana. " Les permis sont suspendus depuis dix ans et c'est irrationnel de laisser la situation telle quelle pendant dix ans, sans avancer une quelconque lueur d'espoir pour les petits, moyens et grands opérateurs miniers. Et pour le secteur entier. À quoi rime-t-il d'accorder la reprise des exportations de gemmes et de pierres précieuses sans autoriser des permis d'exploitation. Et à quoi cela nous avancerait d'accorder des permis de recherche et par la suite, ne pas délivrer de permis d'exploitation ? " avance-t-il encore.
" On veut changer le Code minier, alors que l'actuel n'a même pas été appliqué. Il n'y a aucune mesure attractive dans le projet de nouveau code, et qu'en est-il du Code pétrolier et gazier qui ne prévoit aucune ristourne pour les collectivités territoriales décentralisées (CTD) entre autres ". Devant ce tableau peu reluisant du secteur minier, le professeur d'université finit par une note d'appel à la raison pour les politiciens, surtout de la région Atsimo Andrefana.
" Les intérêts particuliers des politiciens sont trop mis en avant dans tout projet de développement dans cette région. Ils constituent des facteurs de blocage. Il faut donner la place aux techniciens" finit-il.