Madagascar: Les colons citadins nantis d'importants capitaux

Peu de Français de la Métropole s'installent à Madagascar, de 1905 à 1939. Les statistiques de l'époque font ressortir cette faiblesse de l'immigration française. D'après l'ouvrage d'Histoire destiné aux lycéens des classes Terminales (1967), la Grande ile est appelée Ile fiévreuse. Sa réputation est fâcheuse depuis des siècles. " La mortalité européenne très forte, les échecs des tentatives de colonisation aux XVIIe et XVIIIe siècles, restent en mémoire. "

Sur quelque quatorze mille sept cents hommes, l'expédition de 1895 enregistre plus de huit mille décès provoqués par les fièvres. Deux tiers des soldats du Génie sont morts en construisant la route destinée aux voitures Lezfebvre. À la fin du proconsulat de Joseph Gallieni, un peu plus de trois mille Français viennent s'installer à Madagascar, dont beaucoup sont nantis de capitaux assez importants. " Ils ne sont que douze mille en 1939, dont les deux-tiers sont fonctionnaires ou nouveaux arrivés. " La Grande ile, ainsi que le pense Gallieni, ne sera jamais une colonie de peuplement, ajoutent les auteurs de l'ouvrage. L'apport des colons réunionnais équivaut à peu près à l'apport de la Métropole : un peu plus de quatre mille quatre cents en 1905, douze mille environ en 1939. La seule différence réside dans la natalité qui est deux fois plus forte chez les Français de La Réunion. En revanche, l'apport asiatique est important.

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Les Indiens, au nombre de mille cinq cents en 1905, sont près de neuf mille en 1939. On compte quatre cents cinquante-trois Chinois en 1905, embauchés pour la construction de la ligne ferroviaire Tananarive-côte Est, plus de quatre mille en 1939. " Au total, la population étrangère est fort peu nombreuse dans la Grande ile : quatre pour mille en 1905, soit quatre Métropolitains, quatre Réunionnais, deux Hindous et un Chinois sur mille habitants." Cette minorité détient pourtant entre ses mains, l'essentiel des rouages de l'économie coloniale. Car il existe à l'époque différents types de colons. " Du modeste collecteur au riche planteur, on peut trouver toute une gamme de personnages parfois pittoresques. " Les plus aisés résident en ville avec les commerçants bien établis et les employés des grandes compagnies. Ils défendent activement leurs intérêts, " ce qui les oppose souvent à l'Administration qu'ils jugent trop paternaliste ".

Nombreux sont leurs journaux qui témoignent surtout d'un état d'esprit mercantile (Le petit courrier de Tana, Le réveil de Madagascar... ). Selon les auteurs de l'ouvrage, ils ne cachent pas leur désir de participer à l'administration de la Colonie, " parfois même leur projet de sécession de la Colonie avec la Métropole ". La Revue de Madagascar à laquelle collaborent d'éminents malgachisants, montre, pour sa part, " l'intérêt et l'attachement des Européens pour la Grande ile, ses coutumes, sa civilisation ". La vie de la Colonie y est relatée avec " une certaine complaisance pour l'Administrateur ". Dans les villes et dans les bourgades où tous les colons se connaissent, règne une atmosphère de cité provinciale. Dans cette cohabitation, la réussite des uns suscite la jalousie des autres. Et un certain déracinement, soulignent les mêmes auteurs, finit pas dénaturer la réaction de chacun et des collectivités en face des problèmes. En fait, " la hiérarchie administrative et celle des fortunes déterminent les relations des personnes dans ces sociétés européennes".

Aussi, chacun vit-il " dans le groupe qui correspond à sa situation, acquiert sa psychologie, entretient ses querelles ". Les grands planteurs quittent la ville plusieurs jours par mois pour se rendre dans leurs exploitations, contrôler leurs agents et les commandeurs, surveiller les récoltes. En retour, le passage des agents de l'Administration, les incursions des broussards apportent de temps en temps une animation inaccoutumée dans leur vie citadine. " Chaque région, avec sa petite capitale, finit par constituer une petit monde auquel ceux qui y vivent restent très attachés. " Dans la brousse, la situation est très différente. Dans des conditions souvent très difficiles, le colon s'efforce de gérer sa plantation. Les contacts avec les Malgaches sont permanents, car ces derniers fournissent la main-d'œuvre dans tous les travaux, domestiques, agricoles, ou exploitations minières.

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