Afrique de l'Ouest: Yayi Boni en Guinée - Le rendez-vous de la dernière chance

Yayi Boni est de retour à Conakry. Le médiateur de la CEDEAO en Guinée est en effet arrivé dans la capitale guinéenne le mardi 18 octobre.

Troisième séjour de l'ancien président béninois depuis sa nomination le 3 juillet 2022 sans qu'il ait pu jusque-là enregistrer d'avancée notable, le facilitateur de l'organisation sous-régionale se heurtant à une forme d'autisme des autorités guinéennes au sujet de la transition enclenchée depuis le coup d'Etat du 5 septembre 2021 qui a renversé le Pr Alpha Condé.

Un an donc que le colonel Mamadou Doumbouya tient les rênes du pays sans qu'il y ait encore de calendrier consensuel pour un retour à une vie constitutionnelle normale, ni une feuille de route claire pour arriver à destination. Après avoir traîné les pieds, pour ne pas dire les bottes, pendant de longs mois, le solide gaillard s'était fait octroyer un bail de 36 mois suite à des consultations qui, semble-t-il, ont rassemblé le ban et l'arrière-ban du pays, qui ont juste raboté de 3 mois la proposition initiale de 39 mois. Un délai, on le sait, inacceptable pour la CEDEAO, cela d'autant plus que les chefs d'Etat de la sous-région étaient parvenus à un deadline de 24 mois avec le Mali et le Burkina, embarqués eux aussi dans des transitions suite à des coups d'Etat.

On ne voit donc pas pourquoi la CEDEAO concéderait au pays de Sékou Touré ce qu'elle a refusé au Burkina et au Mali, qui ont pourtant l'excuse d'être en guerre de sorte qu'il faut sécuriser un tant soit peu leur territoire avant de se risquer à organiser une quelconque élection. Ce qui est loin d'être le cas en Guinée, un pays en paix et où il suffit de revoir l'armature institutionnelle et juridique (Constitution, Code électoral, fichier électoral) pour aller aux urnes. S'il y avait eu la volonté politique, les élections générales auraient pu déjà avoir lieu un an après la chute de Condé.

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Il va pourtant bien falloir que le colonel Doumbouya entre dans les rangs. Le présent séjour de Yayi Boni sonne en effet comme le rendez-vous de la dernière chance. Il y a un mois en effet, en marge de l'Assemblée générale des Nations unies, le président bissau-guinéen, Umaro Sissoco Embalo, qui assure actuellement la présidence en exercice de la CEDEAO, et ses pairs avaient mis la pression sur Conakry, brandissant la menace de sanctions progressives si la situation n'évoluait pas dans le bon sens avec, pour commencer, une liste de personnalités à sanctionner. Le chef de la junte avait un mois pour s'exécuter et l'ultimatum expire en principe le samedi 22 octobre prochain.

Yayi Boni a d'ailleurs été précédé d'une mission technique de la CEDEAO qui a débarqué dimanche pour essayer de rapprocher les positions des différentes parties. Il s'agira notamment de voir ce qui est vraiment indispensable ou non dans le programme proposé par la junte qui, sous prétexte de poser les jalons d'une Guinée nouvelle, veut s'embarquer dans de grands chantiers, de grandes réformes (sociale, politique, économique) dont le seul objet semble être de jouer la montre.

Des manœuvres dilatoires qui donnent le sentiment que l'ancien patron des forces spéciales est gagné petit à petit par les vertiges du trône. Pour s'en convaincre, il n'y a qu'à voir ses bains de foule et ses posters géants qui laissent entrevoir un certain culte de la personnalité. Il faudra bien qu'il fasse preuve de sagesse et de raison s'il ne veut pas que les sanctions de la CEDEAO tombent et viennent fragiliser davantage des populations déjà malmenées par la vie chère.

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