Liberia: Procès de Kunti Kamara - "Vous pouviez être tué à tout moment par n'importe lequel d'entre eux"

Depuis le 10 octobre, l'ancien chef rebelle libérien Kunti Kamara est jugé devant la cour d'assises de Paris. Premier procès en France sur les exactions commises durant la guerre civile au Liberia. Kunti Kamara est accusé de " complicité de crimes contre l'humanité ", " actes de torture " et de " barbarie ", pour des actes dans le nord-est du Liberia entre 1993 et 1994. Il risque la prison à vie. Après des actes de cannibalisme, la cour a évoqué mercredi 19 octobre les marches forcées imposées aux civils.

Jusqu'à présent, la cour a entendu des témoins d'exactions commises par Kunti Kamara à des personnes absentes. Mais mercredi, les premières victimes directes sont venues à la barre. Jasper a raconté comment les chefs de l'Ulimo, dont Kunti Kamara, réquisitionnaient la population pour leur faire transporter de lourdes charges, machines et nourriture.

Il a alors décrit la fois où plus d'une cinquantaine d'habitants ont été forcés de porter un énorme générateur provenant de la centrale électrique, de le mettre sur un camion en panne et de pousser le véhicule sur plus de 20 kilomètres jusqu'à la frontière en Guinée, où ce pillage alimentait un trafic. Le tout avec une rivière à traverser et dans la boue de la saison des pluies.

Il a raconté avoir été réquisitionné de force huit fois pour effectuer des marches harassantes dans un climat de terreur où la vie ne tenait qu'à un fil.

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Nous n'avions aucun droit. Les rebelles nous faisaient ce qu'ils voulaient. C'était de l'esclavage. Vous pouviez être tué à tout moment par n'importe lequel d'entre eux, même si vous n'aviez rien fait. Beaucoup ont été tués simplement parce qu'ils ne pouvaient plus porter les charges. C'était plus qu'un choc psychologique. Aujourd'hui encore, les souvenirs sont très vifs. C'est un traumatisme comme vous ne pouvez pas imaginer.

Aucun criminel de guerre n'a été jugé au Liberia. Ce comptable d'une cinquantaine d'années attend désormais que l'impunité cesse, grâce à ce procès.

Ceux qui nous ont fait ça sont toujours libres. Quand j'en croise un, c'est une marque indélébile dans ma vie. Mais j'ai l'espoir qu'un jour, ces hommes soient rattrapés par la justice, peu importe le temps que cela prendra. Un exemple pourrait être fait avec le cas Kunti Kamara. Et s'il est déclaré coupable, ça dissuadera d'autres de refaire la même chose.

Le Libérien a affirmé que Kunti Kamara était présent, avait participé aux exactions et avait lui-même organisé ce genre de marches.

Fidèle à sa ligne, Kunti Kamara a déclaré ne pas connaître les témoins. L'ancien rebelle a nié toute participation à ces marches forcées et a dénoncé un complot : lui était essentiellement posté au front en train de combattre, a-t-il affirmé.

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