Ile Maurice: On dirige comme on peut... ... ou comme on veut ?

M. Poutine prend encore des initiatives ces jours-ci. La première parmi celles-ci est de faire bombarder les infrastructures civiles de l'Ukraine, notamment les centrales électriques et, dans une moindre mesure, les stations de pompage et de filtration d'eau. L'idée principale est de "fatiguer" la population ukrainienne et de la mettre dans le congélateur pendant l'hiver qui arrive (il fait déjà moins de 10 degrés la nuit) afin d'affecter, peut-on supposer, le moral des troupes ukrainiennes qui lui donnent tellement de soucis. Tant au Donbass, que dans le Sud autour de Kherson, point stratégique d'accès vers la Crimée.

Ces actions délibérées contre la population sont sans doute criminelles en conséquences, car il y aura des morts, mais elles seront probablement décrites comme légitimes puisque ce serait le prix à payer quand on est "en guerre" ! Ce qui n'est pourtant, supposément, pas la situation, selon le verbiage même choisi par M. Poutine, puisqu'il ne s'agirait, au fait, que d'une "opération militaire spéciale" ; implicitement plus légère et courte ... ..

Ce sera, par contre, plus difficile pour les Russes de se justifier après leurs actes de torture et leurs exécutions sommaires, agrémentés de viols, à Bucha, à Kharkiv, à Sumy, à Lyman et ailleurs. Un rapport préliminaire des Nations unies et des rapports de plusieurs ONG, dont Human Rights Watch, confirment des crimes de guerre. Les porte-parole russes ont, par contre, souvent expliqué, pour leur défense, que ces accusations ont été théâtralisées et qu'elles sont donc des actes de 'provocation'. S'il est vrai qu'un viol, y compris celui d'un enfant, est souvent une question d'une parole contre une autre ; des civils dont on tranche la gorge ou des passants abattus sur leur bicyclette ou des morts retrouvés avec une balle dans le crane tirée à bout portant et dont les mains sont attachées dans le dos, indiquent un niveau de barbarie impensable aux portes de l'Europe du 21e siècle !

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Dans cette guerre comme dans tant d'autres, l'inacceptable et l'absurde se côtoient constamment. Par exemple, Poutine a annexé quatre régions seulement partiellement conquises par ses troupes et dès le lendemain son nouveau territoire continuait d'ailleurs à se rapetisser, sans qu'il ne puisse y faire grand-chose, à part de mobiliser 300 000 Russes pour les envoyer au front qui recule ! Cette mobilisation ne se serait pas faite sans heurts d'ailleurs, les régions périphériques se sentant sollicitées de manière discriminatoire par les autorités. La loi martiale décrétée il y a quelques jours ne vise d'ailleurs pas seulement les régions annexées, mais aussi certaines régions limitrophes situées en Russie, comme Rostov, Belgorad, la Crimée elle-même où Poutine semble craindre les résistants ukrainiens.

À Kherson, dans le Sud, première ville d'importance à basculer sous contrôle russe après l'invasion de février, la menace de l'armée ukrainienne se précise au point où les autorités russes vont évacuer jusqu'à 60 000 partisans russes prochainement. Cette ville avait 284 000 habitants en janvier. Depuis, il est estimé que la moitié est partie, essentiellement des Ukrainiens dans l'âme, qui ont été, soit évacués vers la Russie, souvent contre leur gré, soit qui auront émigré ailleurs en Ukraine. Ils n'étaient donc pas là pour le 'référendum' de fin septembre. Si l'armée ukrainienne se défait des soldats russes coincés à Kherson, à qui on aurait d'ailleurs demandé de combattre jusqu'à la mort, Kherson changerait-elle de couleur politique ? Les 1,93 million d'Ukrainiens qui se trouvent en Russie à l'officiel (jusqu'à 10 millions, officieusement) peuvent-ils, pareillement, "annexer" les territoires russes où ils sont en majorité ? Où s'arrêterait alors ce démantèlement forcené du concept de l'état-nation ?

Dans une guerre moderne, l'information et la désinformation font aussi partie des armements tactiquement importants, d'autant que le consommateur d'information, lui, n'est pas sur le terrain, ne peut donc vérifier et doit entièrement dépendre de la crédibilité de sa source. Un exemple parmi d'autres : Les Russes accusent les Ukrainiens d'avoir lancé des missiles sur le barrage et la centrale hydroélectrique de Kakhovka à 44 miles de Kherson dans le but de détruire une alimentation d'eau cruciale pour la Crimée. Zelensky, au contraire, dit que le barrage est miné et que les Russes le feront sauter pour noyer Kherson et son voisinage immédiat au moment voulu, par exemple, pour protéger leur retraite (*). Allez savoir !

Ce qui est certain, c'est que les "nazis" du jour paraissent bien plus sympathiques que ceux d'Hitler et qu'ils n'ont apparemment aucun projet de "solution finale" pour qui que ce soit. Ce qui est certain c'est qu'il y a un agresseur russe et un pays, l'Ukraine, qui se bat pour continuer à exister. Ce qui est certain c'est que nous sommes en situation de "fausse équivalence" : si la Russie arrêtait son agression, on retrouverait sans doute la paix (et les prix ?) d'avant-hier. Si l'Ukraine arrêtait de se battre, elle cesserait d'exister et l'ordre international avec. Ce combat est donc de nature existentielle. Si l'Ukraine entière était annexée (remarquez qu'il suffirait, au plus facile, d'un "référendum" quelconque et d'un décret capitonné au Kremlin ... ), il faudrait se poser la question : qui est le prochain sur SA liste ?

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Le gouvernement n'avait qu'une voie pour tenter de résister aux déferlantes plus qu'embarrassantes du rapport de l'honorable magistrate Mungroo-Jugurnath dans l'affaire Kistnen : il s'est ainsi farouchement accroché au fait indéniable que le rapport cité, dont celui présenté par le leader de l'opposition au Parlement, n'est pas signé, n'est pas complet et qu'il n'est donc pas "officiel". Cela lui donnera un peu de temps pour essayer d'affûter ses armes, peut-être, mais il est maintenant clairement inconcevable que le rapport signé ne soit pas rapidement publié, à défaut de quoi, c'est la déferlante conspirationnelle du cover-up qui va débuter...

Ce pays peut se passer d'hypothèses farfelues et de palabres. Par contre, ce pays ne peut, ni ne doit, être épargné de la vérité ! Surtout qu'il s'agit de ce qui pourrait bien mieux nous éclairer à propos des moeurs de ceux qui ont la prétention de nous diriger !

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Au pays de sa majesté le roi Charles III, on a quelques soucis.

Après avoir évacué Boris le clown, voilà que Liz la salade ne tient pas la comparaison et s'en va !

On l'appelle Liz la salade depuis qu'un journal britannique, le Daily Star, publiait en page une, une photo de Liz Truss à côté d'une salade "iceberg" achetée 60 pence chez Tesco, avec la question (im)pertinente suivante : "Laquelle des deux salades mouillées va durer plus longtemps ?". On était le 14 octobre dernier. Il n'en fallait pas plus pour que des bookmakers fassent des offres de 6/1 que la laitue durerait plus longtemps que la Première ministre. Le 20 octobre, le NewYork Times pouvait d'ailleurs titrer "The lettuce outlasts Liz Truss" !

On peut ici faire trois remarques de circonstance.

- Le roi Charles III s'est préparé 73 ans pour assumer ses fonctions, mais il les a débutées (c'est symptomatique ?) non pas avec la formation d'un nouveau gouvernement, mais avec la fin d'un autre. Liz Truss a au moins un mérite cependant : celui de s'en aller, plutôt que de faire encore plus de mal à son pays en s'accrochant mordicus...

- La Grande-Bretagne, puissance nucléaire et 6e économie mondiale, juste derrière/devant l'Inde, est vraiment capable du sublime comme du ridicule. Par exemple, on parle d'un retour possible de Boris Johnson aux affaires alors que les affres du Brexit continuent à mordre (**) ! De plus, la reine étant morte, une pétition en Inde réclame désormais le retour du Kohinoor, ce diamant qui fut diplomatiquement présenté non pas comme un objet volé, mais comme un "cadeau" d'un enfant de cinq ans, Daleep Singh, dans un Punjab fraîchement conquis par les soldats anglais ! Le Kohinoor serait-il considéré comme approprié pour Elizabeth, mais pas pour Camilla ?

- L'humour peut parfaitement tuer une carrière, fut-elle du plus haut niveau.

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