Tunisie: Affaire de l'aéroport - Des procédures interminables

24 Octobre 2022

L'affaire de l'aéroport fait toujours la Une des médias. Si elle témoigne d'un incident qui a mis à mal la souveraineté de l'Etat, elle nous renseigne également sur la complexité des procédures judiciaires profitant parfois aux accusés.

Aujourd'hui, l'affaire de l'aéroport refait surface avec un nouveau rebondissement, puisque les différentes décisions d'interdiction de voyage à l'encontre des accusés ont été maintenues par la justice. La chambre correctionnelle près la Cour militaire d'appel de Tunis a maintenu l'interdiction de voyage contre les accusés dans l'affaire médiatiquement connue sous le nom " Affaire de l'aéroport ". Il a été également décidé de reporter l'audience au 11 novembre 2022.

Cette décision vise notamment les députés d'Al-Karama, l'avocat Mehdi Zagrouba et une femme ayant tenté de quitter le territoire tunisien de force.

Quoi qu'il en soit, cette affaire dure maintenant plusieurs mois et les jugements définitifs n'ont pas été prononcés. Pire encore, les audiences se poursuivent toujours et deux processus judiciaires ont été engagés simultanément par les tribunaux militaire et civil.

Il convient de rappeler que des députés d'Al Karama ont pris d'assaut l'aéroport Tunis-Carthage, en mars 2021, afin de permettre à une femme fichée S17 de voyager. Ils sont entrés en altercation avec les forces de l'ordre et certains syndicalistes sécuritaires sous le couvert de l'immunité parlementaire.

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Cette affaire a également marqué un nouveau rebondissement lorsque l'avocat Mehdi Zagrouba, impliqué dans cet incident, a été arrêté quelques heures avant d'être relâché. " A ma sortie de la prison, je me suis trouvé face à deux agents en civil qui m'avaient demandé de les accompagner. Ils ont été rejoints par d'autres agents en présence du chef de zone de La Manouba. J'étais directement revenu à l'intérieur de la prison pour contacter des collègues qui se sont déplacés en urgence pour mettre un terme à cette mascarade ", indique l'avocat, qui a été arrêté alors qu'il rendait visite à son client en prison.

S'adressant à la ministre de la Justice,

Leila Jaffel, et au ministre de l'Intérieur, Taoufik Charfeddine, après sa courte arrestation de quelques heures, Mehdi Zagrouba affirme qu'un mandat de recherche avait été émis à son encontre à l'heure de son entrée à la prison d'El Mornaguia.

Il est à rappeler que l'avocat Mehdi Zagrouba a été arrêté, jeudi 20 octobre 2022, alors qu'il devait comparaître devant la cour d'appel militaire dans le cadre de l'affaire de l'aéroport, selon l'avocat Samir Dilou.

L'affaire de l'aéroport remonte au mois de mars 2021 lorsque des députés du Parlement dissous et de la Coalition al-Karama se sont rendus à l'aéroport Tunis-Carthage pour protester contre l'interdiction de voyage faite à une femme fichée S-17. Ils ont provoqué une altercation et agressé physiquement et verbalement des policiers de l'aéroport, selon des sources sécuritaires.

La Cour d'appel militaire avait décidé à maintes reprises de reporter l'examen de l'affaire.

Le 17 mai dernier, le Tribunal militaire avait condamné, dans la même affaire, Seifeddine Makhlouf et Nidhal Saoudi à 5 mois de prison, Mehdi Zagrouba à 6 mois de prison, Mohamed Affès et Maher Zid à trois mois de prison.

La justice, en charge de l'affaire avait décidé le classement de l'affaire pour Nidhal Saoudi, Mohamed Affès et Abdellatif Aloui.

Parallèlement, le député de la Coalition Al Karama Seifeddine Makhlouf a été condamné à trois mois de prison avec sursis dans l'affaire dite de l'aéroport. Ce jugement a été prononcé en appel par la huitième Chambre pénale auprès du Tribunal de première instance de Tunis.

Procédure S17

A l'origine de cette affaire, une procédure policière polémique qui interdit certaines personnes fichées de quitter le territoire du pays. Environ 30 mille personnes ont été soumises à ces mesures en Tunisie entre 2014 et 2018. Une mesure qui reste contraire à certaines lois et aux principes constitutionnels garantissant la liberté de circulation ainsi qu'à l'article 12 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ratifié par la Tunisie.

Un ancien chef du gouvernement avait cependant précisé que le nombre de personnes concernées par la procédure frontalière S17 est beaucoup plus faible que les chiffres qui circulent.

Amnesty International a dénoncé, à plusieurs reprises, les restrictions à la liberté de circulation mises en place par les autorités tunisiennes pour des questions de sécurité, les qualifiant " d'arbitraires, trop générales et discriminatoires ".

L'ONG dit avoir recensé des dizaines de restrictions de voyage injustifiées ciblant des citoyens, des députés, des politiciens et des hommes d'affaires.

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