Centrafrique: Affaire de 3e mandat - Archange file du mauvais coton

President Faustin Archange Touadéra
25 Octobre 2022
analyse

Manifestement, le président centrafricain, Faustin Archange Touadéra, tient à son troisième mandat comme à la prunelle de ses yeux.

Il n'entend pas reculer et ce, en dépit de la décision prise par la Cour constitutionnelle d'annuler les décrets qu'il avait pris, portant création d'un comité chargé de rédiger une nouvelle Constitution. En effet, les juges constitutionnels ont vu dans la démarche du chef de l'Etat, une stratégie visant à sauter le verrou de la limitation du nombre de mandats présidentiels d'autant que la Constitution en vigueur lui interdit de briguer un autre mandat.

Tirant leçon de l'histoire récente d'autres pays africains et consciente que cela plongerait davantage la République centrafricaine (RCA) dans le chaos, la Cour constitutionnelle a pris à rebrousse-poil le président Touadéra. Il n'en fallait pas plus pour que ce dernier, en véritable potentat, pique une colère noire, allant jusqu'à réclamer le limogeage de la présidente de la Cour constitutionnelle en la personne de Danièle Darlan.

Décidé à régler ses comptes avec cette dernière qu'il traite, depuis lors, de tous les noms d'oiseau, il vient de prendre un décret mettant fin à ses fonctions en procédant à sa mise à la retraite de la Fonction publique. Et dans la foulée, le doyen de la faculté des sciences juridique et politique de l'université de Bangui, convoque très prochainement une assemblée générale consacrée au " remplacement de la représentante des enseignants du supérieur à la Cour constitutionnelle " qui n'est rien d'autre que la pauvre Danièle Darlan. Jusqu'où ira ce bras de fer ? On attend de voir d'autant que pas plus tard que la semaine dernière, la Cour constitutionnelle qui voyait venir les choses, avait opportunément rappelé que ses membres sont " inamovibles ".

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Les dirigeants africains sont ainsi faits qu'ils n'entendent jamais raison, convaincus qu'ils sont que ça n'arrive qu'aux autres

Cela dit, même si, usant de la force et d'artifices juridiques, Touadéra parvient à obtenir le scalp de la présidente de la Cour constitutionnelle qui s'oppose à ses errements, il doit se garder de tout triomphalisme. Certes, on sait que soumis à référendum, le projet de modification qu'il appelle de tous ses vœux passera comme lettre à la poste, mais cela ne suffit pas pour croire que tout est accompli.

Loin s'en faut ! Car, on l'a vu en Guinée où avec son troisième mandat en poche, Alpha Condé a été renversé, contraint qu'il était de quitter la scène politique sur la pointe des pieds. On le voit aussi en Côte d'Ivoire où la question du troisième mandat d'Alassane Ouattare a laissé de nombreux cadavres sur le carreau, renforçant davantage la fracture sociale.

En tout cas, Archange file du mauvais coton en refusant de s'imaginer une autre vie en dehors du pouvoir. S'il veut entrer dans l'histoire par la grande porte, il gagnerait, au terme de ses deux mandats constitutionnels, à faire valoir ses droits à la retraite où il pourrait consacrer le gros de son temps à enseigner les mathématiques à ses petits-enfants. Malheureusement, les dirigeants africains sont ainsi faits qu'ils n'entendent jamais raison, convaincus qu'ils sont que ça n'arrive qu'aux autres jusqu'à ce que s'en suive l'humiliation.

B.O

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