Madagascar: Exploitation des ressources minières - " Il faut avant tout de la volonté politique " selon le Pr Théodore Razakamanana

Les richesses minières de Madagascar méritent d'être mieux exploitées pour parvenir à un développement rapide et durable.

Des richesses du sous-sol qui dorment. Le Professeur Théodore Razakamanana a pris l'exemple du gisement de gaz de Mahaboboka à Sakaraha à une centaine de kilomètres de Toliara pour illustrer l'inexploitation légendaire des ressources naturelles de Madagascar. En 2016, la compagnie chinoise Madagascar Petroleum Company (MSPC) avait prospecté dans cette zone et avait fait état de la découverte d'un gisement de gaz naturel sec exploitable à 2 900 mètres de profondeur. Le potentiel de ce gisement d'un gaz naturel de haute qualité serait de 20 milliards de M3 exploitables. Lalaharisaina Joéli, ministre de l'Energie du régime Rajaonarimampianina a fait le déplacement sur place avec les dirigeants de MSPC pour faire état de l'intérêt et de l'appui de l'administration pour ce projet qui était appelé à contribuer au développement du pays. Malheureusement, depuis cette descente sur terrain ponctuée de discours sur la nécessité de prioriser les intérêts économiques du pays et les avantages de la population locale, on n'a plus entendu parler de ce projet Mahaboboka.

Manque de volonté

Pour Théodore Razakamanana, professeur titulaire de classe exceptionnelle au département sciences de la terre à l'Université de Toliara, le cas du gaz de Mahaboboka est l'exemple type du manque de volonté des dirigeants d'exploiter à fond les ressources naturelles. " Il faut avant toute chose que l'Etat fasse preuve d'une volonté politique pour exploiter à fond nos ressources minières ", déclare-t-il en faisant remarquer que " l'heure n'est plus à la tergiversation sinon le pays risque de perdre énormément d'opportunités ". Parlant du contexte actuel dans le secteur minier, le Pr Razakamanana évoque les carences législatives. Comme les autres acteurs socio-économiques, il estime que les incertitudes nées de l'application du code minier font partie des facteurs de blocage. " Les investisseurs miniers hésitent en raison de la gestion du code minier, l'on n'applique ni l'actuel, ni le projet remanié ".

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Répartition des richesses

La répartition des revenus du secteur minier pose également problème selon le Pr Razakamanana. Une manière, notamment, pour lui d'évoquer les avantages à accorder aux collectivités territoriales d'implantation des projets miniers. " Les communes et même les fokontany qui sont touchés directement concernés par les exploitations minières doivent bénéficier de redevances et de ristournes proportionnelles aux ressources qui sont exploitées dans leur circonscription ". Par ailleurs, l'Etat doit faire preuve de transparence en ce qui concerne les modalités de répartition des taxes et redevances. Une manière, en somme, pour ce professeur de défendre cette idée d'impliquer davantage les communautés et les ressources locales. En parlant justement de ressources locales, le Professeur Razakamanana estime que tout comme les ressources naturelles, les experts nationaux sont également sous-utilisés. " Dans les décisions et orientations stratégiques sur le développement, les autorités ont intérêt à recourir aux compétences et savoir-faire des experts malgaches ", affirme-t-il. Ce qui n'est visiblement pas le cas actuellement où les chercheurs et les experts nationaux ne bénéficient même pas de budgets alloués aux recherches.

Avis scientifique

Or, d'après toujours le Professeur Razakamanana, l'avis des experts est nécessaire à toutes décisions stratégiques et économiques. Sur ce plan justement, il n'a pas manqué de donner son avis " scientifique " sur le cas de Base Toliara. " Le problème dans cette affaire c'est le manque d'informations qu'on donne à la population qui risque d'être manipulée ", affirme-t-il en faisant remarquer que " si l'on raisonne sur un plan purement scientifique, l'exploitation d'ilménite sur la zone de Ranobe n'a qu'un très faible rayon radioactif et ne présente par conséquent pas de danger pour la population ". Par ailleurs, " l'exploitation faite par Base Toliara ne risque pas d'altérer la nappe phréatique et des projets de recyclage peuvent être réalisés pour minimiser les impacts sur l'environnement". Bref, pour le scientifique qu'il est, le Pr Razakamanana estime que le projet Base Toliara peut fonctionner mais il appartient aux parties prenantes de trouver la bonne politique pour que le pays, les investisseurs et surtout la population tirent le profit qu'ils méritent.

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