Sénégal: Amnesty International réclame justice pour des victimes de violences politiques au pays

Dakar — Amnesty International a lancé un appel à la "célérité" et à la "transparence" dans les enquêtes menées par les autorités sénégalaises sur les violences meurtrières survenues en mars 2021 et en juin 2022 au Sénégal, a constaté l'APS, vendredi, à Dakar.

"Les violences exceptionnelles de mars 2021 (... ) n'ont toujours pas donné lieu à des inculpations. Il s'agit, ici, du nombre de morts le plus important durant des manifestations depuis une génération au Sénégal", a déclaré Agnès Callamard, la secrétaire générale d'Amnesty International.

Selon elle, 14 personnes ont été tuées lors des manifestations de 2021.

"Nous avons appelé les autorités sénégalaises à témoigner davantage de célérité et de transparence, s'agissant des enquêtes sur ces personnes tuées", a ajouté Mme Callamard lors d'une conférence de presse à Dakar.

Amnesty International "n'a pas l'assurance que les enquêtes avancent", a fait valoir sa secrétaire générale, qui effectue une tournée en Afrique de l'Ouest depuis le 16 octobre.

Les autorités sénégalaises ont "fait valoir la volonté d'apaisement, à travers notamment la libération des personnes arrêtées durant les manifestations", a dit Agnès Callamard en présence de la directrice d'Amnesty International en Afrique de l'Ouest et du Centre, Samira Daoud, et du directeur exécutif d'Amnesty Sénégal, Seydi Gassama.

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Mme Callamard estime que "la vérité sur les faits et la justice pour les familles des victimes ne doivent faire l'objet d'aucun arrangement".

L'organisation de défense des droits de l'homme qu'elle dirige va "continuer sa campagne, afin que justice soit rendue aux victimes", a-t-elle assuré.

Treize personnes ont été tuées et quelque 590 autres blessées lors des manifestations consécutives à l'interpellation de l'opposant Ousmane Sonko, en février et mars 2021, dans plusieurs villes du pays, selon un bilan du gouvernement.

"Réviser" la loi sur la cybercriminalité

M. Sonko est placé sous contrôle judiciaire depuis lors. Il avait été accusé de "viols répétés" par Adji Sarr, une jeune dame employée par un salon de massage, à Dakar.

Selon Amnesty International, deux autres personnes ont trouvé la mort dans des heurts survenus le 17 juin dernier entre des militants de l'opposition et les forces de l'ordre, lorsque M. Sonko et ses alliés de l'opposition ont voulu protester contre l'annulation de l'une de leurs listes de candidature aux élections législatives. Selon la presse locale, trois personnes, dont un jeune homme résidant à Ziguinchor (sud), ont péri dans les violences survenues ce jour-là.

Le gouvernement sénégalais a annoncé, en avril 2021, l'ouverture d'une commission d'enquête chargée d'élucider les circonstances de la mort des personnes décédées quelques semaines auparavant.

En ce qui concerne la loi qui encadre l'organisation des manifestations publiques, Amnesty International demande qu"'elle ne soit pas interprétée de manière restrictive" par les autorités chargées de l'ordre et de la sécurité au Sénégal, a dit Mme Callamard.

L'organisation de défense des droits de l'homme appelle aussi l'Etat du Sénégal à appliquer la décision de la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest relative à l'interdiction des manifestations à caractère politique dans le Plateau, le centre-ville de Dakar, où se trouvent plusieurs institutions, des commerces et des habitations.

L'arrêté interdisant les rassemblements politiques dans cette zone est attentatoire aux libertés des citoyens, selon la Cour de justice de la CEDEAO.

"Il s'agit d'un très mauvais exemple, qui fragilise une institution importante (... ) et va à l'encontre des droits garantis par la Constitution sénégalaise", a dit Mme Callamard en parlant du maintien en vigueur de l'arrêté interdisant les manifestations politiques dans le Plateau.

Elle a dit se réjouir, par ailleurs, des assurances données par les autorités sénégalaises sur le Code de l'enfant, que l'Etat du Sénégal est en train d'élaborer depuis plusieurs années.

Mme Callamard dit avoir demandé aux autorités sénégalaises, au cours de son séjour à Dakar, de "réviser" la loi sur la cybercriminalité, pour qu'elle soit "conforme aux principes du droit international".

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