Algérie: Ain Defla - La bataille de Guergour confirme l'inhumanité de l'armée coloniale

Ain Defla — La mutilation et l'exposition des corps des dix martyrs de la bataille de Guergour qui a eu lieu le 11 octobre 1957, sur la place publique de la ville de Miliana (wilaya d'Ain Defla), fut d'une atrocité qui confirme le comportement horrible et inhumain de la France coloniale, a déclaré l'ancien Moudjahid, Mustapha Tounsi.

La bataille de Guergour fut "une longue nuit de terreur coloniale" et la mutilation et l'exposition des corps des moudjahidine tombés au champ d'honneur lors de cette bataille témoignent à quel point les forces armées françaises étaient dénuées de tout humanisme et à quel point était poussée leur bestialité, a souligné l'ancien moudjahid à l'APS, à la veille de la commémoration du 68e anniversaire du déclenchement de la guerre de Libération nationale, coïncidant avec les célébrations du soixantenaire de l'indépendance.

Rencontré à Miliana, le moudjahid, aujourd'hui âgé de 82 ans, revient sur la genèse de cette bataille et se souvient encore de ce qui s'était passé dans l'après-midi du 11 octobre 1957 au quartier "El Berkouk", situé dans la partie sud de la ville de Miliana, où il habitait avec sa famille au moment des faits.

Au lendemain du 8 octobre 1957, jour de la mort d'Ali Amar, dit Ali la Pointe, Hassiba Ben Bouali, Mahmoud Bouhamidi et Omar Yacef, dit Petit Omar, et la fin de la bataille d'Alger, "les troupes de Bigeard avaient été appelées en renfort à Miliana par les colons qui se plaignaient des attaques des Moudjahidine contre leurs fermes", raconte-t-il.

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L'ancien combattant de l'ALN affirme qu'un groupe de Moudjahidine de la région, dirigé par un certain Abdelaziz, venait rencontrer des personnes recherchées par l'administration coloniale et qui s'apprêtaient à rejoindre le maquis. Le rendez-vous leur a été donné dans la maison d'un voisin dans le quartier El Berkouke, a-t-il précisé.

"La propriétaire de la maison avait fait venir ses nièces depuis la ville de Cherchell pour l'aider à confectionner des tenues pour les moudjahidine. Elles travaillaient d'arrache-pied durant plusieurs jours", a-t-il souligné.

"La présence des moudjahidine dans la maison de notre voisin n'avait pas tardé à s'ébruiter et atteindre l'administration coloniale qui avait rapidement investi tout le quartier", poursuit le moudjahid Tounsi Mustapha.

Alertés, les moudjahidine se sont repliés dans une grotte située près de l'oued Guergour, en contrebas de la ville de Miliana, ajoute le témoin en affirmant également que les combattants de l'ALN avaient livré une grande bataille qui a pris fin le lendemain à l'aube et durant laquelle des dizaines de soldats de Bigeard y ont laissé la vie.

L'ancien moudjahid se souvient d'une "longue nuit de terreur coloniale mais aussi du courage des combattants de l'ALN qui sont tombés en héros durant la nuit du 11 octobre 1957", indiquant que la majorité des martyrs de la bataille de Guergour ne sont pas originaires de Miliana mais de différentes régions du pays ayant servi dans les rangs de l'ALN dans la zone 4 relevant de la Wilaya IV Historique.

L'inhumanité et la sauvagerie poussées à leur extrême

L'enseignant d'histoire à l'université Djilali Bounaama de Khemis Miliana, Abderrahmane Tounsi, confirme l'atrocité des faits liés à la bataille de Guergour. Il relève que la mutilation et l'exposition des corps des dix martyrs de cette bataille sur la place publique reflètent un "comportement de sauvagerie et d'inhumanité" de l'armée coloniale française.

"Le comportement l'armée coloniale française durant la bataille de Guergour, en exposant et mutilant les corps des martyrs, est sauvage et inhumain. Elle n'avait aucun respect pour les morts ni pour les prisonniers de guerre", a souligné M. Tounsi.

Il a indiqué que l'armée coloniale n'avait pas hésité à "exposer les cadavres des moudjahidine sur la place El Fouara dans le but de semer la terreur au sein de la population locale", ajoutant que cette technique servait dans la guerre psychologique menée des années durant par l'administration coloniale pour isoler la population de l'Armée de libération nationale (ALN).

L'universitaire a souligné dans le même contexte qu'au lendemain de la bataille de Guergour, un "climat de terreur s'était installé à Miliana où plusieurs descentes punitives et des perquisitions ont été effectuées par les parachutistes qui rassemblaient les habitants dans la cour de la caserne pour les interroger et les torturer".

Les bureaux des sections administratives spécialisées (SAS) "avaient joué également un grand rôle dans la sale guerre déjà menée par les paras de Bigeard et Massu", affirme M. Tounsi, soulignant que les habitants de Miliana avaient beaucoup souffert de la répression, des mois durant, après la bataille de Guergour.

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