Madagascar: CLIMAT DES AFFAIRES DANS L'ATSIMO-ANDREFANA - Le secteur privé appelle les opérateurs pour créer de la richesse

Des opérateurs économiques opérant à Toliara et dans la région Atsimo-Andrefana sont unanimes quant à la nécessité de plus d'investissements de la part du secteur privé pour pallier la pauvreté et la situation d'insécurité qui ternit l'image de cette région du Sud-ouest du pays. L'État est invité à faciliter le déroulement des activités menées par le secteur privé. Rencontres avec quelques opérateurs de divers secteurs d'activités allant des agences de placement, au nettoyage professionnel et à l'exploitation du coton.

Honneur aux femmes et hommes, entrepreneures et entrepreneurs de Toliara. Des femmes entrepreneures issues de sept régions ont organisé une grande rencontre à Toliara dans le but d'élargir leur connaissance en entrepreneuriat et également leur réseau. Les potentialités et les activités des femmes à Toliara " ne sont pas suffisamment connues" par le reste du pays. " Si la région Atsimo Andrefana a été considérée comme une zone enclavée et quelque peu oubliée, en formation, en reconnaissance de potentialités, nos activités seront reconnues à partir de maintenant, de par le networking développé durant cet événement Women in Business" se félicite Bakonirina Ranaivo, présidente de la l'association des Femmes entrepreneures de l'Atsimo-Andrefana (FEAA), participante à la rencontre Women in Business du 29 septembre au 4 octobre dernier.

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Lalaina Razafitombo : " Le chômage pèse sur l'entre-preneuriat "

Opérateur très active, Lalaina Razafitombo, connue par ses activités de service informatique et communication au sein de l'entreprise Sincro, rejoint ce constat. " Il y a peu d'opportunités pour les femmes entrepreneures, D'autres sont au courant mais nous, dans la région Atsimo Andrefana, sommes rarement au courant des opportunités d'affaires existantes. Il y a un réel manque de communication " explique l'opérateur qui a pourtant réussi à multiplier ses activités ces dix dernières années. Elle a créé une société d'import-export, une autre de distribution de cash-point, une agence de recrutement, de placement, immobilière et événementielle et un salon de coiffure et esthétique. Lalaina Razafitombo, mère de famille et membre active d'un club de service se félicite tout de même du chemin parcouru par ses entreprises. " Il faut de l'audace, oser entreprendre, se donner les moyens de mener à bien ses activités, savoir s'entourer d'une bonne équipe qui a les mêmes visions et objectifs. Par ailleurs, en entrepreneuriat, il est de mise de bien étudier le marché et un petit conseil : Faire ce que l'on aime et ce que l'on sait faire " détaille-t-elle.

Pour cette femme entrepreneure très active, coordinatrice de l'antenne de l'EFOI (Entreprendre au féminin dans l'Océan indien) pour la région Atsimo-Andrefana, il y a le poids de la culture comme quoi les femmes doivent rester au foyer, mais le chômage pèse lourdement sur l'entrepreneuriat. Il n'y a pas de travail, pas de pouvoir d'achat, donc cela impacte sur les activités des entreprises. Dans ses activités de placement et de recrutement, elle constate qu'il y a parfois un manque de profil et d'expériences. " Toliara a un grand potentiel en ressources humaines mais a besoin de soutien en termes de formation et de renforcement de capacités pour pouvoir répondre aux besoins des entreprises " soutient-elle.

Ninie Augustine Zafindravola : " La suspension de Base Toliara a compromis mes prévisions "

Alors qu'elle était encore adjointe au maire de la commune urbaine de Toliara, Ninie Augustine Zafindravola attachait un intérêt particulier pour la propreté de sa ville. Elle avait l'habitude de mobiliser ses voisins, dont particulièrement des femmes pour des opérations de nettoyage dans des quartiers définis. C'est avec ce leadership qu'elle a décidé de monter la société " Libernina Netoinet ", une entreprise de nettoyage qui emploie des femmes vulnérables, n'ayant pour la plupart pas de diplôme mais sont cependant très motivées. Mme Ninie, comme on l'appelle à Toliara, s'est donc lancée dans cette aventure entrepreneuriale, en sachant que c'est un pari risqué. Elle savait " qu'il n'y a pas de société ou grande entreprise qui recourt à ce genre de service à Toliara". À l'arrivée de Base Toliara, elle a décroché un contrat de prestation en nettoyage au sein de la grande firme.

" Travailler pour Base c'est assurer une prestation de qualité avec du personnel formé et compétent. J'ai embauché une quinzaine de femmes au départ pour se charger des tâches définies dans le con-trat. Quatre-cent logements ont été prévus à nettoyer auprès des sites de production, une fois le projet d'exploitation minière lancé. C'est un gros marché à assurer et j'ai préparé à l'avance les femmes avec qui je travaille " raconte Ninie Augustine Zafindravola. " Cette décision de l'Etat a compromis mes prévisions " regrette-t-elle. La femme entrepreneure a réduit son équipe qui se charge de petits marchés de nettoyage de villas. Pour elle, cela fait partie des risques dans l'entrepreneuriat mais elle n'en demeure pas vaincue. " Petit à petit, l'oiseau fait son nid et je garde espoir que Base Toliara se remettra sur pieds " espère-t-elle.

Alban Natsira : Business development manager de "iABi Job Services"

"iABi Job Services" est une agence de recrutement qui traite des demandes dans les secteurs de l'hôtellerie et de la restauration, du commerce, de l'industrie comme la savonnerie, la pêche, les ONG et l'agriculture. Son manager pense que le climat des investissements dans les PME est plutôt correct puisque il n'y pas de risques énormes. " Pour les grandes entreprises en revanche, le climat n'est pas très sain. Il est difficile pour celles-ci de se projeter sur 20-30 ans dans le contexte politique et économique actuel alors qu'on parle de plusieurs millions de dollars d'investissement. Les règles du jeu ne sont pas claires " livre l'opérateur qui développe une deuxième activité de web marketing et informatique. Pour lui, toute cette ambiance amène à réfléchir profondément sur l'opportunité d'investir à Madagascar.

" Des milliers d'emplois passent par ces entreprises, il faudrait assainir pour pouvoir attirer les grandes firmes. Toliara en a besoin " ajoute Alban Natsira. À lui de souligner que pour résoudre le problème de chômage et d'insécurité, il faut faire en sorte de créer des emplois. " La création d'emplois passe forcément par le secteur privé, même si beaucoup de gens ont du mal à le comprendre. C'est le secteur privé qui pousse au développement et qui crée de la richesse. Il faut ainsi des investissements massifs du secteur privé " enchaîne l'opérateur.

Thierry Rafikhoussen DG de la société Indosuma : " La règlementation sur le coton n'est pas en faveur des petits agriculteurs "

La filière coton se meurt dans cette région réputée première productrice de coton. C'est le constat de Thierry Rafikhousse, directeur général de la société Indosuma. C'est une société qui exploite le coton depuis la disparition de Hasyma en 2007. À partir du coton, il a également pu développer des activités de transformation et s'est lancé dans la savonnerie, l'huilerie, la raffinerie et la provenderie, outre l'exportation de coton. " Il n'y a plus que 5 000t de coton en une saison. C'est peu par rapport aux 15 000t de l'époque de Hasyma. Les surfaces cultivées n'ont pas augmenté en dix ans mais ont disparu au contraire. Le prix du coton chez les agriculteurs n'a pas évolué non plus mais descendu jusqu'à 1700 ariary le kilo " explique l'opérateur. Il dénonce le prix planché imposé par certains de ses opérateurs concurrents qui ont demandé 1000 ariary le kilo.

Quant au financement pour les agriculteurs, l'opérateur explique qu'ils pouvaient faire crédit auprès des Banques auparavant, sous garantie de la Hasyma. " Actuellement, c'est nous, investisseurs, qui garantissons et leur fournissons également des avances sur campagne. Par ailleurs, nous remarquons des achats sauvages car des opérateurs achètent ce qu'il y a sur le marché sans analyse et vision économique et sans politique d'investissement sur le long terme. Ils détruisent le prix et les efforts des agriculteurs " continue Rafikhoussen. Il n'y a pas de développement rural réel, selon l'opérateur, alors que la filière coton devrait être le plus grand pourvoyeur d'emplois dans la région Atsimo Andrefana. " La réglementation actuelle de la filière n'est pas en faveur des petits agriculteurs mais profite à quelques opérateurs sans vision de développement. Le coton est vraiment à retisser et à réorganiser " finit l'opérateur.

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