Tunisie: Que vaut la justice ?

1 Novembre 2022
opinion

On sait ce que cela coûte à certaines parties, ce que cela génère, mais on sait encore davantage ce que l'affaire de l'appareil secret représente pour les Tunisiens. Alors, il ne s'agit pas seulement de chercher la vérité, mais de déterminer ce que vaut la justice, notamment dans un cadre et un environnement bien particuliers...

Beaucoup d'interrogations tournent aujourd'hui autour du parti Ennahdha, et pas seulement de l'affaire de l'appareil secret qui lui est attribuée par ses adversaires politiques. Qu'est-ce qui a changé à Montplaisir et qu'est-ce qui risque d'arriver au moment où le parti ne semble pas avoir la même identité, ni les mêmes priorités ?

Parfois, il y a de ces questions qui demandent et qui exigent des réponses claires, nettes et précises. Mais parfois aussi, les réponses à apporter dépassent en complexité la simplicité des questions. Il en est ainsi, certes, de l'affaire de l'appareil secret.

Si elle paraissait difficile à cerner, la vérité dans cette affaire n'est pas aussi inaccessible que certaines parties tentent aujourd'hui de faire croire. Elle est encore moins impénétrable. Mais les aléas, voire les manquements, autour des investigations, notamment judiciaires, restent toujours insuffisants pour faire éclater la vérité.

On sait ce que cela coûte à certaines parties, ce que cela génère, mais on sait encore davantage ce que l'affaire en question représente pour les Tunisiens. Alors, il ne s'agit pas seulement de chercher la vérité, mais de déterminer ce que vaut la justice, notamment dans un cadre et un environnement bien particuliers...

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Aujourd'hui, Ennahdha, et essentiellement ses dirigeants qui se voient plus indispensables qu'ils ne le sont, n'ont pas réellement le potentiel nécessaire et suffisant, encore moins la crédibilité exigée, pour débattre de la question. Leur implication, que ce soit positivement ou négativement, dans cette affaire est souvent synonyme de doute.

La situation dans laquelle se trouve actuellement le partis islamiste est particulièrement difficile. Il est en effet appelé à prouver sa non-implication, que ce soit directement ou indirectement, dans les actes et les opérations qui ont secoué le pays depuis 2011. Et même auparavant. L'on sait d'ailleurs qu'en politique, tout ce qui n'est pas dévoilé au grand jour engendre forcément le doute et l'inquiétude.

D'une manière ou d'une autre, la manière avec laquelle Ennahdha intervient dans l'affaire de l'appareil secret, la manière aussi avec laquelle il est cité, est loin de rassurer. Dans tout ce qu'il a laissé entrevoir jusque-là pour se disculper, on ne retient pas des évidences, encore moins des faits concrets. Les paroles beaucoup plus que les certitudes. En tout cas le parti islamiste ne s'est jamais désengagé des personnes soupçonnées d'être en rapport avec des opérations liées au terrorisme.

De même, la gestion des accusations dont il ne cesse de faire l'objet a rendu l'image du parti brouillée. C'est un véritable casse-tête pour les dirigeants nahdhaouis qui deviennent de plus en plus la cible des critiques les plus virulentes.

Il n'en demeure pas moins que lorsqu'on s'investit de loin ou de près dans une affaire, on n'a plus d'autre choix que d'en assumer la responsabilité et certainement aussi le prix à payer.

A Montplaisir, l'ambiance est aujourd'hui assez particulière. Le parti semble perdre son rayonnement. Ses hommes, ses commanditaires et ses "guérisseurs". Pareille défaillance n'a point d'égale dans la mesure où il risque d'être abandonné à son propre sort. On ne les voit plus, ou presque, ces hommes et ces femmes pour qui Ennahdha comptait plus que tout et qui faisait partie de leur propre vie.

C'est toute une génération qui risque à tout moment de tirer sa révérence. Le problème est qu'il n'y a pas eu, et qu'il n'y aura pas, peut-être, pour bientôt de relève, ou encore de succession méritée. Les dirigeants actuels, ou du moins ceux qui prétendent en avoir le statut, n'ont jamais pris en considération l'avenir du parti.

Faut-il rappeler à ce propos que n'est pas personnalité politique qui veut. Cela requiert, exige même, un statut, un profil et un rang bien déterminés. En tout cas au-dessus de ce qui existe actuellement du côté de Montplaisir...

Dans le contexte actuel, il est évident que les priorités d'Ennahdha ne sont plus les mêmes. Les élections législatives ne semblent plus intéresser ses principaux dirigeants qui pourtant dans un passé pas lointain y tenaient plus que tout.

La réhabilitation est-elle encore possible ? Rien n'est tellement garanti tant que le parti n'a pas vraiment rompu avec une étape sombre de son histoire...

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