Ile Maurice: 2-novembre - Se souvenir de l'arrivée des travailleurs engagés

Ce jour férié commémore l'arrivée, à Maurice, des premiers travailleurs engagés en 1834. Il s'agit d'une partie importante de l'histoire de l'île car cette arrivée a façonné les traditions, la culture et le mode de vie des habitants d'aujourd'hui. On te raconte tout avec l'historien Jocelyn Chan Low.

D'emblée Jocelyn Chan Low précise que ce n'est pas le 2 novembre 1834 que les premiers travailleurs engagés sont arrivés à Maurice mais bien avant l'abolition de l'esclavage. En effet, sous la période française, on note la présence d'engagés en provenance d'Asie du Sud-Est et du Sud de l'Inde. Ils étaient toutefois peu nombreux. L'année 1834 marque l'arrivée en masse des travailleurs engagés.

Flash-back...

Tout commence officiellement en novembre 1834. Habituellement associés à l'arrivée des travailleurs indiens dans le pays, les travailleurs engagés venaient de bien d'autres pays, notamment de la Chine, de Madagascar, de l'Afrique continentale et d'autres pays asiatiques. À l'aube de son démarrage économique, Maurice a accueilli ces travailleurs étrangers afin qu'ils développent l'industrie sucrière, un pilier de l'économie à l'époque. Cependant, leur présence en tant que travailleurs sur l'île a constitué une étape majeure dans la construction et l'évolution de la société mauricienne. En effet, si après quelques années, certains travailleurs sont retournés dans leur pays, d'autres sont restés dans l'île et y ont fait venir leurs familles, ce qui a fait de Maurice un endroit où différentes cultures, religions et communautés vivent en paix.

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L'année 1834 marque aussi le début de l'arrivée des travailleurs sous contrat à Maurice. Cette année-là, le 1er août plus précisément, un navire nommé Sarah a accosté au dépôt de Port-Louis avec, à son bord, les 36 premiers travailleurs sous contrat, issus du Sud de l'Inde. Cette vague migratoire a grossi avec l'abolition de l'esclavage et la nécessité pour les Britanniques de recruter des ouvriers pour les usines et les champs de canne à sucre.

L'esclavage a été aboli, à Maurice, le 1er février 1835, clôturant ainsi un chapitre vieux de 200 ans. Les Britanniques ont désespérément besoin de travailleurs pour les champs de canne à sucre et les usines. Ils décident alors de se tourner vers l'Inde pour recruter une abondante source de main-d'oeuvre et faire en sorte que Maurice devienne le grenier à sucre de l'Empire. Entre 1834 et 1924, 451 746 travailleurs sous contrat ont embarqué dans les ports de Calcutta, Mumbai ou Madras, tous partis dans l'espoir de faire fortune à Maurice. Ils rêvaient de meilleures conditions de vie et fuyaient les innombrables catastrophes en Inde : famine, peste, chômage et inondations.

À Maurice, les premiers ouvriers ont travaillé sur les domaines sucriers Belle Alliance ou Antoinette, non loin du village de Piton, dans le district de Rivière-du-Rempart, après être arrivés sur le navire Atlas, le 2 novembre 1834, après un voyage éprouvant de six semaines à partir de Calcutta. Ces travailleurs étaient employés par la société commerciale Hunter-Arbuthnot & Company, qui a fourni au gouverneur de l'époque une garantie financière que les travailleurs ne deviendraient pas un fardeau pour l'État. Ils ont ensuite été mis au travail dans les domaines sucriers, également propriétés de Hunter-Arbuthnot & Company, où ils ont travaillé six jours par semaine, du petit matin au coucher du soleil.

C'est l'arrivée de ces ouvriers particuliers qui est commémorée sur le site du patrimoine mondial d'Aapravasi Ghat, le 2 novembre de chaque année. Leur arrivée a marqué le début d'un afflux d'environ un demi-million de travailleurs sous contrat entre 1835 et 1910, une migration qui a eu un impact profond dans la vie et la culture mauriciennes.

Leurs conditions de travail

Un contrat de cinq ans.

Trois livres par an ou Rs 5 par mois.

Un pourcentage des Rs 5 par mois était déduit pour le coût de leur voyage de l'Inde à Maurice.

À la fin de leur contrat, ils étaient censés avoir la possibilité de retourner en Inde mais les propriétaires ne leur ont pas souvent laissé le choix.

De nombreux propriétaires de plantations ont puni les travailleurs en les faisant battre, en chassant ceux qui s'enfuyaient et en les emprisonnant.

Ils devaient travailler tous les jours, excepté le dimanche, du lever au coucher du soleil.

La double déduction impliquait que si un ouvrier était absent un jour, ses employeurs lui enlèveraient deux jours de salaire.

L'Aapravasi Ghat

Ce site historique a été classé patrimoine mondial par l'UNESCO, le 12 juillet 2006. Il faut remonter à 1834, année où le gouvernement britannique a choisi Maurice comme intermédiaire parfait entre l'Angleterre et la Compagnie des Indes Orientales, toujours une colonie anglaise à l'époque. L'abolition de l'esclavage devenue une réalité, les Anglais ont dû trouver une nouvelle main-d'oeuvre pour développer le pays qu'ils viennent tout juste de ravir aux Français. Cette main-d'oeuvre, les Anglais l'ont trouvée en Inde. La transition d'esclaves à travailleurs engagés a alors commencé. L'Aapravasi Ghat est l'endroit choisi par les Britanniques pour débarquer une grande majorité de ces travailleurs, qui venaient trimer dans les champs de canne à sucre. L'Aapravasi Ghat est également un point d'échange des travailleurs étrangers sur l'île. Aujourd'hui encore, les structures de l'Aapravasi Ghat sont parmi les signes les plus visibles de ce qui allait aboutir à un cadre financier mondial et l'une des meilleures relocalisations de tous les temps.

Les 36 premiers engagés d'Arbuthnot

Les 36 premiers travailleurs engagés par les Anglais se nommaient Saroop Sirdar, Sabaram Mate, Bhoodhoo, Champah, Bhundhoo, Choonearam, Juttoo, Chota Bhoodhoo, Bachoo, Aryoon, Rammohan, Sookram, Dhicram, Ghonssee, Bhooosan, Chota Chooneelall, Bigna, Auklah, Lungen, Callachend, Bholah, Tisera Bhoodhoo, Sibchure, Chota Bhundhoo, Deenram, Budhrem, Mugtoo, Jhareeah, Choylun, Choolango, Bhagyarath, Chungaram, Chola Muggroo, Chota Dhicram, Dookhun et Bhomore.

En chiffres

462 800. C'est le nombre d'engagés qui ont débarqué à Maurice. Si 452 800 étaient des Indiens, 16 659 étaient Malgaches, Comoriens, Chinois ou en provenance de pays d'Afrique continentale. On comptait aussi des Omanais et Yéménites, ainsi que des Indo-Réunionnais. Et 300 000 d'entre eux ayant appris à aimer Maurice qu'ils ont contribué à façonner, y sont restés et y ont fondé leur famille. Des 162 800 qui retournèrent dans leur pays d'origine à l'expiration de leur contrat, entre 12 000 et 15 000 étaient des Indo-Mauriciens, c'est-à-dire qu'ils étaient nés à Maurice.

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