Madagascar: Le pays s'ouvre à un modernisme prudent

Rakoto-Radama, tout comme son père, est acquis au " modernisme ". " Il est foncièrement bon et son désir de progrès semble devoir ouvrir une ère de développement rapide ", écrivent les historiens qui participent au Spécial Tananarive de la Revue de Madagascar (1952).

En succédant à sa mère en 1861, l'une des premières décisions qu'il prend, consiste à ouvrir le pays tout grand aux étrangers désireux d'y travailler. Les Missions, protestantes et catholique, s'y fixent alors définitivement. Toutefois, ajoutent-ils, " il était faible et imprudent. Certaines de ses décisions sont prématurées ".

Il s'aliène les hommes d'affaires en donnant au Français Lambert une charte qui lui confère un monopole sans contrôle sur les mines et les terrains de Madagascar. En décidant la libre admission de tous les produits étrangers, il provoque l'envoi à Antananarivo " de quantités prodigieuses d'alcool à vil prix ".

Il s'ensuit, dans la population, de graves désordres que le parti réactionnaire dirigé par le Premier ministre Rainivoninahitriniony (Raharo), fils du Premier ministre Rainiharo, exploite à l'extrême. Les traditionnalistes reprochent au roi la licence de sa vie privée. C'est au milieu d'une grande confusion que les amis du roi, les Menamaso, sont d'abord massacrés.

" Le roi lui-même est ensuite étranglé avec une écharpe de soie ", le 12 mai 1863. Sa femme, la princesse Rabodo devenue Rasoherina, est portée sur le trône en 1863 jusqu'en 1868. Ce règne n'est marqué d'aucun évènement important. " Sous l'influence de la reine, les réactionnaires se sont modérés ", l'activité missionnaire continue de se développer, mais d'une façon prudente.

%

Au Premier ministre Raharo succède son frère Rainilaiarivony qui dirige la politique malgache jusqu'en 1895, sous les règnes de Rasoherina qui tourne le dos en 1868, de Ranavalona II (princesse Ramoma) de 1868 à 1883, et de Ranavalona III (princesse Razafindrahety) qui est exilée par le gouvernement français en février 1897. " Ces reines, choisies et épousées par Rainilaiarivony, en tant que Premier ministre et prince consort, représentaient la parenté d'Andrianampoinimerina. " Elles sont de la caste des Andriana, tandis que le Premier ministre symbolise la bourgeoisie au pouvoir, la caste des Hova. Ce dernier " détenait toute l'autorité et disposait de toutes les ressources du royaume ".

Intelligent, habile, " homme des solutions moyennes ", il use son énergie et subtilité à mener de front deux tâches difficiles. " D'abord, se maintenir au pouvoir contre les critiques sourdes " du vieux parti des Andriana et des réactionnaires, ensuite, " sauvegarder l'indépendance de son pays " en jouant sur l'opposition des deux grandes puissances coloniales, la France et l'Angleterre.

Et d'après les auteurs de l'ouvrage, son attitude à l'égard du progrès s'explique par ces préoccupations. Rainilaiarivony sait qu'il est nécessaire de moderniser son pays pour " ôter tout prétexte aux interventions coloniales ". Toutefois, le sort de Radama II lui sera un enseignement. Il évite, dans cette évolution, de choquer brutalement les intérêts et les préjugés de son peuple. Il se méfie des étrangers, refuse de leur concéder des droits définitifs, d'ouvrir largement la porte à leurs initiatives, de créer des routes " qui eussent pu servir à l'invasion ".

Sur le plan interne, d'ardentes rivalités politiques et religieuses éclatent à Antananarivo entre les missionnaires catholiques et français, d'un côté, et les missionnaires protestants et anglais de l'autre. " L'émulation qui en résulta entre les différentes missions, constitua pourtant un principe de développement et de progrès ", souligne Chapus.

Bref, le retour des Européens à Antananarivo après l'ère Ranavalona Ire, favorisera la reprise du travail avec une intensité d'autant plus grande que des éléments laïcs vont se joindre aux instructeurs missionnaires. Développement et progrès d'Antananarivo dépendront de l'afflux des architectes, ingénieurs et ouvriers qualifiés que l'Europe enverra. Ce mouvement s'accélèrera avec les années, " d'autant plus que toute une publicité est donnée dans le Monde aux affaires de Madagascar ". De surcroit, l'arrivée à Antananarivo où ils résideront, d'un certain nombre de consuls étrangers accrédités auprès de Radama II et de ses successeurs, confirme le fait que l'Imerina, déjà parvenu à un certain degré de civilisation, va poursuivre son développement.

AllAfrica publie environ 400 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.