Afrique: Paix et sécurité en Afrique et dans le monde - Les enseignements du 8ème Forum de Dakar

6 Novembre 2022

Repenser les relations internationales avec une Afrique épanouie, profitant pleinement de ses potentialités, écoutée, venant les mains pleines de promesses autour du banquet des idées qui font le monde par des actions positives et concertées, constitue un enjeu fondamental de progrès, de liberté et de souveraineté pour ce 21ème siècle qui bouscule toutes les certitudes. Le Forum de Dakar a démontré toute son utilité en mettant sur la table des questions qui fâchent parfois, mais dont l'Histoire nous oblige de répondre et d'y répondre de manière urgente !

La 8ème édition du Forum international de Dakar sur la Paix et la Sécurité (24 et 25 octobre 2022), en invitant à réfléchir, de manière informelle et libre, sur la grande thématique : " L'Afrique à l'épreuve des chocs exogènes : défis de stabilité et de souveraineté ", suggère, comme l'a rappelé le Président Macky Sall, à l'ouverture, " de regarder la réalité du continent en face : expansion du terrorisme, conflits intra et inter-étatiques, recrudescence des coups d'État, ingérence politico-militaire étrangère, effets combinés du changement climatique, de la pandémie de la Covid-19 et de la guerre en Ukraine ".

Un constat alarmant auquel des Chefs d'État, de gouvernement, des experts de divers horizons, des journalistes ont diagnostiqué et tenté de trouver des réponses idoines. Si les responsabilités africaines ont clairement été situées, avec notamment l'incapacité de certains États d'assumer la protection de leurs populations et l'octroi de conditions minimales de paix et de stabilité pour un développement inclusif et durable, il n'en demeure pas moins vrai que le multilatéralisme, avec ses erreurs congénitales, ne permet pas au continent premier, considéré comme le passé, le présent et l'avenir de l'Humanité, de jouir de toutes ses capacités et de pouvoir faire face aux chocs autant endogènes qu'exogènes.

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L'Organisation des Nations unies, par exemple, malgré ses belles intentions, est loin d'être pleinement démocratique et inclusive. À sa naissance, les pays qui ont gagné la guerre (excluant, dans un racisme primaire indicible, l'apport décisif et multiforme de l'Afrique à la liberté du monde, maintenant la majorité de ses États dans le joug colonial), ont décidé de s'octroyer des privilèges éternels qui s'avèrent, aujourd'hui plus que jamais, comme une gangrène qui finissant de détruire le fruit de l'intérieur, le condamne à sa propre destruction.

Nécessité de réformer l'Onu

La crise ukrainienne est là pour nous le rappeler. S'y ajoute le silence complice face au génocide des Tutsis du Rwanda, etc. Le droit de veto est une arme puissante dont usent et abusent ses cinq détenteurs au Conseil de sécurité (Chine, Grande-Bretagne, États-Unis, France et Russie). Il urge, dès lors, de " remédier à une injustice historique ", selon Fumio Kishida, Premier ministre japonais qui s'exprimait, en août dernier, lors de la Ticad 8 à Tunis. Le Japon qui soutient significativement l'organisation du Forum sur la Paix et la Sécurité a réitéré, à Dakar, son engagement pour que l'Afrique ait un siège permanent au Conseil de sécurité de l'Onu. Autant le Japon que la Suisse, qui seront membres non permanents du Conseil en 2023 et 2024, ont souligné cette indispensable nécessité.

Plus de la moitié des opérations des Nations unies ont lieu sur sol africain ! On ne compte pas moins de 80 000 Casques bleus sur le continent.

" Face au terrorisme, les opérations classiques de paix des Nations unies ont montré leurs limites. Des Casques bleus attaqués jusque dans leurs propres bases, sans capacités significatives de riposte, ne peuvent assurément pas protéger des populations menacées par des groupes terroristes. Comment d'ailleurs maintenir la paix quand elle n'est même pas rétablie ? En vérité, c'est toute la doctrine des opérations de paix qu'il convient de mettre à jour en intégrant pleinement la lutte contre le terrorisme, y compris en Afrique ", a ainsi plaidé, avec justesse, Macky Sall, Président en exercice de l'Union africaine.

La non présence de l'Afrique, berceau de l'Humanité, dans les hautes instances de délibérations politiques et sécuritaires se combine à son absence insensée dans les instances de décisions économiques accentuant sa marginalisation. La présence de l'Afrique aux Sommets du G7, du G20 même à Davos, qui est une organisation privée, s'apparente à une forme de petit " cadeau " fait à quelques-uns de ses représentants pour un Occident bousculé par un nouvel ordre mondial qui s'installe naturellement, mais qui est incapable de se remettre en cause ! " En omettant la majeure partie de l'Afrique, le G20 compromet son efficacité et son influence ", écrivait dans une " tribune " le Président sénégalais.

Le G20 est le principal mécanisme de gouvernance multilatérale collaborative de l'économie mondiale. Seule l'Afrique du Sud y est présente. Le Fmi, la Banque mondiale sont aussi victimes de leurs erreurs congénitales et n'ont aucune vocation à permettre l'émergence économique des pays africains. Des institutions onusiennes comme l'Omc, la Cnuced, l'Oms, l'Iut, même si elles sont dirigées récemment par des personnalités africaines, n'ont pas été à la hauteur des promesses faites à l'Humanité. Les réformes tant attendues et dont certaines comme celles des Nations unies tardent encore. Depuis 40 ans, on parle de réformer l'Onu, mais la machine est encore là, si lourde et pourtant si nécessaire. L'Onu demeure un formidable outil de dialogue des peuples, mais sans un changement en profondeur, elle deviendra une coquille vide.

Les dirigeants africains ont saisi, une nouvelle fois, l'occasion qu'offre, de manière exceptionnelle, le Forum de Dakar, avec des pays comme la France, le Japon, l'Arabie Saoudite, etc., pour lancer un vibrant appel à mieux impliquer l'Afrique qui doit prendre toute sa place pour le renforcement de la démocratie, de la souveraineté et du progrès. " Si le continent est devenu, aujourd'hui, un des épicentres du terrorisme, c'est bien, parce que le fléau est alimenté par la criminalité transfrontalière, la prolifération illégale des armes, les flux financiers et trafics illicites de tout genre et la participation de combattants étrangers ".

" L'inertie du Conseil de sécurité dans la lutte contre le terrorisme en Afrique porte en elle la défaillance du système multilatéral ", analyse, sans complaisance, Macky Sall, soutenu par de nombreux orateurs et experts indépendants. En outre, un vrai et inclusif multilatéralisme est plus que d'actualité face aux dérives du numérique qui constituent une des menaces les plus sérieuses à la paix, à la sécurité et à la stabilité de notre commune humanité. Quel rôle et place pour la presse, les sociétés civiles africaines et d'ailleurs pour porter haut ce combat d'un monde plus juste, plus inclusif et plus humain ?

(Correspondant à Genève )

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