Afrique de l'Ouest: Forum de la CEDEAO sur la paix - Le choix du Khalife des Tidianes comme parrain, une "consécration du modèle de l'islam soufi sénégalais" (islamologue)

Tivaouane — Le choix porté sur le Khalife général des Tidianes comme un des parrains du 3-ème Forum régional de la CEDEAO sur l'éducation à la culture de la paix qui s'est tenu du 27 au 29 octobre derniers à Lomé (Togo) est une "consécration du modèle de l'islam soufi sénégalais", estime l'universitaire et islamologue sénégalais Abdou Aziz Kébé.

Le Forum de la CEDEAO sur l'éducation à la culture de la paix à travers le dialogue intra et interreligieux, avait comme parrains Cheikh Serigne Babacar Sy Mansour, Khalife général des Tidianes, du Sénégal, Son Excellence Mgr Edward Tamba Charles, Archevêque de Freetown (Sierra Leone) et Son Altesse Nana Kabina Nketsia V, chef suprême de la région traditionnelle d'Essikado, au Ghana.

Axée sur le thème "Communautés, extrémisme violent et cohésion sociale en Afrique de l'Ouest", cette rencontre avait pour objectif, selon les organisateurs, de "renforcer les mécanismes de dialogue au sein des différentes communautés, de cultiver la compréhension mutuelle, l'esprit de tolérance et la coexistence pacifique entre les religions, à travers l'éducation à la culture de la paix".

"Je pense que la distinction qui est faite au Khalife général des Tidianes dans un contexte de lutte armée dans certains pays et de terrorisme, de radicalisme, de violences interethniques et de violences au nom de la religion, (... ) est une consécration du modèle de l'islam soufi sénégalais, de l'islam confrérique sénégalais", a dit M. Kébé à l'APS.

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M. Kébé, qui était membre de la délégation ayant représenté le guide religieux tidiane à Lomé, estime qu'il s'agit à travers le Khalife général des Tidianes, d"'une sorte de modélisation de l'islam confrérique dans sa dimension spirituelle, certes, mais surtout dans sa dimension sociale".

Il entend par là, "sa contribution à l'équilibre des sociétés, à la cohésion sociale, à la stabilité de nos pays".

"Le fait de désigner le Khalife général comme parrain pour ce forum est également une invitation pour une meilleure mise en œuvre des enseignements des confréries, des enseignements de l'école soufie sur ces questions-là qui semblent nous diviser et devaient nous rassembler", a commenté Abdou Aziz Kébé.

Il y voit une "invitation à ce que les confréries s'impliquent" dans la recherche de solutions en cas de crise, dans la prévention des conflits. C'est aussi, à ses yeux, une invitation à ce que "les confréries et les communautés religieuses soient mieux considérées dans nos sociétés".

Kébé a évoqué des "exemples concrets" de résolution par les Khalifes tidianes Serigne Mansour Sy Borom Daradji, Serigne Abdoul Aziz Sy Dabakh en relation avec le Cardinal Hyacinthe Thiandoum concernant une question interreligieuse.

L'exemple de Serigne Abdou Aziz Sy " Al Amine", qui était arrivé à réconcilier des adversaires politiques, avait réussi des médiations entre l'Etat et des syndicats ou entre des segments de la sociétés, en conflit.

"C'est peut-être tout cela à la fois qui a conduit la CEDEAO à désigner le Khalife général des Tidianes pour que tous ces éléments-là puissent être capitalisés pour que cela soit modélisé au niveau de la région", a t-il dit.

Pour l'islamologue, le guide religieux tidiane a "bien compris sa mission" à ce niveau, vu le message qu'il a délivré au forum, et dans lequel il a proposé le "modèle sénégalais" à la sous-région, recommandant qu'il soit pérennisé et systématisé, à travers l'intégration de modules d'éducation à la culture de la paix dans les curricula.

Une recommandation importante est de travailler à ce "que les compétences de gestion de la différence, d'éthique, de recherche du vivre ensemble puissent être intégrées dans les curriculum pour que les citoyens puissent grandir avec et devenir des citoyens imbus de ces valeurs-là".

Un autre point jugé "important" de son message dont il était l'un des porteurs est son invite à partager les conclusions de cette rencontre avec tous les segments des sociétés des pays de la sous-région, parmi lesquels il a cité les associations sportives et culturelles et les médias.

Pour l'islamologue tidiane, une telle reconnaissance n'est "pas étonnante", dès lors que "la tidiania est une école du soufisme fondée sur la quête de l'amélioration de soi, sur la quête de la purification de l'âme, la quête de l'éthique de comportement", qui signifie aussi "l'éthique de la différence".

Il considère que dans un contexte où "tous nos problèmes viennent de ce déficit de ressources pour gérer les différences", l'islam confrérique est le modèle de la Tidiania qui enseigne cette "capacité à gérer la différence dans la perception de ce qui est fondamentalement humain en nous et de ce qui est fondamentalement humain en l'autre".

Cette "reconnaissance de soi en l'autre" va au-delà de la couleur de sa peau, de sa culture de la région où il habite, de la religion qu'il confesse, mais s'attache à "l'humain dans son essence primordiale et dans son essence éternelle".

Une telle attitude qui, soutient-il, permet de "cheminer ensemble vers la construction d'une société équilibrée, (... ) où il fait bon vivre malgré les différences, où il fait bon vivre grâce aux différences (sources d'enrichissement)".

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