Les investisseurs Africains ont été invités, le 2 novembre 2022, à Abidjan, lors d'un panel organisé à l'occasion de l'ouverture de l'Africa Investment Forum 2022 (2-4 novembre), à financer davantage le secteur des infrastructures en Afrique afin d'inciter les investisseurs étrangers à leur emboîter le pas.
Intitulé " Mobiliser le capital financier - Quel modèle d'investissement attirera le capital mondial en Afrique ? ", le panel a réuni des figures du secteur privé africain : Charles Kié, PDG de Genesis Holdings, Vincent Le Guennou, PDG du Fonds d'accélération des infrastructures en Afrique d'Africa50 - une plateforme d'investissement créée par des gouvernements africains et la Banque africaine de développement -, Florizelle Liser, présidente du Conseil des entreprises sur l'Afrique aux États-Unis, Oscar Onyema, PDG de la Nigerian Exchange Group - la principale bourse du Nigéria - et Simon Tiemtoré, PDG de la banque Vista Bank.
La session s'est focalisée sur les instruments et les modèles d'investissement qui offrent les voies les plus efficaces pour sécuriser les engagements de capitaux dans un paysage de plus en plus concurrentiel et sur la manière dont le financement du développement et le capital-investissement peuvent tirer parti du financement mixte pour rendre l'Afrique plus propice aux investissements.
Ce d'autant plus que la pandémie de Covid-19 a mis en évidence le besoin urgent de mobiliser davantage de capitaux privés pour investir dans des secteurs à fort impact en Afrique, comme les infrastructures sanitaires.
Les participants au panel ont souligné le déficit de financement des infrastructures en Afrique que ce soit pour les routes, l'énergie, les chemins de fer, les oléoducs (gaz et pétrole), les infrastructures de santé, d'éducation et de formation, entre autres, et proposent une panoplie de solutions endogènes ainsi qu'une démarche pour attirer davantage les capitaux internationaux.
Pour Florizelle Liser du Conseil des entreprises américaines sur l'Afrique, la pandémie de Covid-19 a démontré que l'Afrique dispose des capacités pour développer des infrastructures de qualité sur place. " Avant la pandémie de Covid-19, personne ne croyait qu'on pouvait développer une industrie pharmaceutique de pointe en Afrique. Mais avec la pandémie, on a commencé à fabriquer des vaccins à ARN messager (ARNm) en Afrique. Je suis contente que les investisseurs perçoivent l'Afrique d'un œil nouveau ", a-t-elle souligné.
L'Afrique a besoin chaque année entre 68 et 108 milliards de dollars américains pour financer son déficit de financement des infrastructures afin d'accélérer sa croissance et son développement socioéconomique. Des montants que l'on peut trouver sur place pourvu que les États fassent preuve de discipline budgétaire et collectent plus judicieusement l'épargne intérieure.
" Si on baisse les déficits budgétaires de 6 % en Afrique, c'est 60 à 100 milliards de dollars d'économie qu'on va réaliser par an. C'est exactement ce dont l'Afrique a besoin pour combler son déficit de financement des infrastructures. Si on parvient à collecter 10 % supplémentaires de l'épargne intérieure, c'est environ 200 milliards de dollars par an, largement suffisants pour combler le déficit dont on parle ici ", calcule Charles Kié, PDG de Genesis Holdings. Il invite les États africains à créer les conditions macroéconomiques pour attirer les investisseurs.
Charles Dié a aussi appelé à restructurer le secteur bancaire africain afin de lui donner plus de capacités de capitalisation surtout dans le cadre des communautés monétaires et économiques régionales.
Pour Oscar Onyema, il y a une panoplie de financements qui existent à l'intérieur et en dehors du continent allant des institutions philanthropiques aux investissements boursiers. " On peut obtenir une mise à l'échelle à travers le marché des capitaux ", a dit M. Onyema. Il a donné l'exemple du Nigeria qui a levé des obligations vertes pour financer des projets sensibles au climat et travaille actuellement en partenariat avec la Bourse de Luxembourg pour intéresser davantage les investisseurs étrangers.
Optimiste, le banquier Simon Tiemtoré de Vista Bank souligne que les investisseurs africains commencent à s'intéresser véritablement au financement des infrastructures sur le continent. " Les liquidités sont là ainsi que les pièces du puzzle, et on peut trouver des ressources locales pour les infrastructures avant de faire appel aux capitaux étrangers ", assure M. Tiemtoré. Il a indiqué que Vista Bank va investir dans les infrastructures sanitaires et l'industrie agroalimentaire en Afrique grâce à des capitaux africains et américains notamment.
L'exemple de Africa50 est encore plus intéressant sur la manière dont les investisseurs peuvent s'impliquer dans la réalisation des infrastructures de développement du continent. Fondée par la Banque africaine de développement et des gouvernements africains, Africa50 s'intéresse aux développements des infrastructures depuis leur conception jusqu'à leur livraison. L'institution mobilise prioritairement des financements public et privé africains puis à l'échelle mondiale. " Si les investisseurs africains n'y croient pas et ne lèvent pas des fonds pour les infrastructures en Afrique qui va le faire ? Pour l'instant, nous avons de bons retours des investisseurs africains pour nos projets après, nous allons sur le marché international ", a indiqué Vincent Le Guennou. Il a donné l'exemple d'un projet vert bancable en Égypte portant sur 4 milliards de dollars. Le projet solaire de 1,5 gigawatt va fournir de l'énergie propre à plus de 1 million de personnes.
" Quand on va avoir suffisamment de fonds et des success stories sur nos projets, on va attirer suffisamment d'intérêts et les coûts de crédits de nos projets vont baisser ", a souligné M. Le Guennou. Il a indiqué que d'ici 2050, les investissements d'Africa50 vont permettre à 20 millions d'Africains supplémentaires de disposer d'énergie propre.
La session a été modérée par Hruby Aubrey, chercheure principale à Atlantic Council et fondatrice de Tofino Capital.
L'Africa Investment Forum 2022, prend fin le 4 novembre avec l'annonce des intentions d'investissements en Afrique.
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