Congo-Kinshasa: La journaliste Sonia Rolley expulsée - Un signal inquiétant pour la presse

La journaliste Sonia Rolley a été expulsée de la République démocratique du Congo. Notre consœur, ancienne du service Afrique de RFI et qui venait de rejoindre l'agence de presse Reuters, a été convoquée mardi 8 novembre à la Direction générale des migrations, et s'est vue confisquer son passeport à son arrivée, avant d'être mise manu militari dans un avion à destination de Paris via Addis-Abeba, sans même pouvoir récupérer sa valise. Elle attendait son accréditation, déjà payée, depuis septembre. Que sait-on sur les raisons de son expulsion ?

Selon nos sources, les agents qui ont interrogé Sonia Rolley au siège de la DGM à Kinshasa l'ont informée qu'elle n'était pas expulsée pour son travail à Reuters, mais pour ses " activités antérieures ".

Sonia Rolley s'est en effet attiré des inimitiés d'hommes politiques et d'affairistes congolais au fil de ses reportages, lorsqu'elle travaillait pour RFI, notamment avec l'enquête " Congo Hold-up ", qui avait révélé d'importants détournements d'argent public en République démocratique du Congo.

Les autorités congolaises ont tenu à justifier les raisons pour lesquelles notre consœur n'avait pas pu rester dans le pays : " Il ressort de son dossier qu'elle s'est retrouvée en conflit avec les textes légaux et réglementaires régissant la police des étrangers ; et donc, en situation de séjour irrégulier ", peut-on lire dans le communiqué.

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Il y a aussi le contexte dans lequel cette décision a été prise. Le bureau conjoint des Nations unies aux droits humains en RDC, qui s'est " inquiété " de l'expulsion de notre collègue dès mardi, a pointé les difficultés que rencontrent de plus en plus les journalistes étrangers pour se faire accréditer ou tout simplement " exercer leur métier librement ".

Des collègues congolais contactés par RFI estiment de leur côté que son expulsion est un signe de la nervosité croissante du pouvoir à l'approche des élections prévues en principe en décembre 2023. Ce qu'Amnesty International résume en expliquant que l'expulsion de Sonia Rolley illustre " le climat dangereux dans lequel évoluent les médias en RDC ".

Ce que nous dit l'expulsion de Sonia Rolley de RDC

Faut-il s'en inquiéter des rapports actuels entre les autorités congolaises et les médias, à l'approche des élections prévues en décembre 2023 ? Clémentine Pawlotsky, de la rédaction Afrique de RFI, a posé la question à Trésor Kibangula, analyste politique à Ebuteli, institut congolais de recherche sur la politique, la gouvernance et la violence.

Du côté du gouvernement, on lance des signaux qu'on va vers une presse libre, avec ce projet de loi sur la liberté de presse qui est déposé, beaucoup d'ONG attendaient ce moment ; et de l'autre côté, même s'il y a le débat autour de la légalité de séjour, et qu'on peut entendre d'autres messages qu'il y a d'autres journalistes étrangers qui sont accrédités et que ce serait un problème personnel entre les autorités et Sonia Rolley, ça remet en évidence aussi le fait que... est-ce que ce n'est pas le travail des journalistes en tant qu'enquêteurs, en tant que journalistes d'investigation, qui dérangent tout un système de prédation au-delà même du pouvoir actuel ?

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