Cote d'Ivoire: An 1 du PPA-CI - Laurent Gbagbo vraiment coupé de la réalité

10 Novembre 2022

Créé le 17 octobre 2021, le PPA-CI a célébré, hier, au Palais de la culture de Treichville son premier anniversaire de naissance. Laurent Gbagbo était attendu pour faire le bilan de l'an 1 du Parti des peuples africains-Côte d'Ivoire, son nouvel instrument de lutte politique.

L'ex-chef d'Etat, comme toujours, s'est plutôt adonné à son jeu favori en travestissant les faits. En effet, à un croire le président du PPA-CI, Pulchérie Gbalet, une prétendue activiste de la société civile, a été arrêtée et jetée en prison pour une raison inconnue. " On ne nous donne pas des justifications claires. On ne met pas les gens en prison comme ça.

La prison n'est pas une réponse politique à un problème politique posé ", a confié l'ex-chef d'Etat. Selon lui, en 10 ans de pouvoir, il n'a mis personne en prison. " J'ai été président pendant 10 ans. Qui j'ai mis en prison pendant 10 ans ?", s'est-il interrogé. Puis Laurent Gbagbo s'est érigé en défenseur des droits de l'homme : " Je me suis inscrit toujours en faux contre cet étouffement des libertés". Sur ces deux sujets, il est bon de rafraîchir la mémoire de celui que ses partisans surnomment le Woody de Mama.

S'agissant de Pulchérie Gbalet, Laurent Gbagbo devrait savoir pourquoi elle est en prison, puisque la justice lui a signifiée les faits qui lui sont rapprochés. Convoquée par la police, le lundi 22 août 2022, elle a été placée en garde à vue à la Préfecture de Police d'Abidjan avant d'être mise sous mandat de dépôt et déféré à la Maca le 24 du même mois.

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Contrairement à ce que veut faire croire le président du PPA-CI, ses avocats ont indiqué que trois chefs d'accusation ont été retenus contre leur cliente à savoir : entente avec les agents d'une puissance étrangère de nature à nuire à la situation diplomatique de la Côte d'Ivoire ; diffusion de fausses nouvelles de nature à attenter au moral des populations ; et atteinte à l'ordre public. Sur cette base, le président du PPA-CI ne peut soutenir qu'il ne sait pas pourquoi cette femme est à la Maca. Sur le second sujet, peut-être que Laurent Gbagbo a raison de dire qu'il n'a jamais mis quelqu'un en prison durant ses dix ans de règne. Ce qu'il ne veut pas dire, c'est que sous son mandat, il n'en avait pas besoin.

Les exécutions extrajudiciaires avaient remplacé les prisons. Les adversaires politiques n'avaient pas la chance de défendre leur cause devant un tribunal. La liste des personnes connues ou anonymes exécutées entre 2000 et 2010 par les escadrons de la mort, sous le régime Gbagbo, est longue. Il est bien de mentionner que l'escadron de la mort est le nom couramment donné à un groupe armé qui organise, généralement en secret, des exécutions sommaires ou des enlèvements d'activistes, de dissidents, d'opposants politiques ou économiques ou toute personne perçue comme interférant avec une politique ou un ordre social établi.

En Côte d'Ivoire, ils ont bien joué leur rôle, avec l'assassinat le 2 février 2003 de l'artiste comédien Camarah Yêrêfê plus connu sous le pseudonyme de Camara H. Il avait été enlevé nuitamment par des individus non identifiés. Son corps a été découvert le lendemain abandonné aux abords de la voie express Yopougon-Adjamé. A cette période, de nombreux cas d'enlèvement de personnes connues ou d'anonymes proches du RDR, alors parti d'opposition, étaient attribués à ces tueurs encagoulés.

Le 8 novembre 2002, déjà le corps de Diaye Téhé Emile, président-fondateur du Mouvement populaire ivoirien (MPI), un parti politique dont le siège serait à Duékoué, avait été découvert criblé de balles dans les herbes sur l'autoroute du Nord au niveau du Banco, à 300 mètres de l'échangeur dans le sens Yopougon-Adjamé. Tout comme eux, le docteur Benoît Dacoury -Tabley, frère cadet du ministre Louis André Dacoury-Tabley, membre fondateur du Fpi, a été retrouvé mort le vendredi 08 novembre 2002 dans des conditions mystérieuses à N'dotré sur la route d'Anyama, précisément dans la commune d'Abobo. La plus grosse victime a été incontestablement le général Robert Gueï.

Le 19 septembre 2002, son corps inerte avait été retrouvé sur la Corniche à Cocody. Le FPI l'avait présenté comme le cerveau du coup d'Etat avorté de ce jour. Il aurait été tué alors qu'il se rendait à la RTI, selon des responsables du pouvoir Gbagbo. Cette version a été démentie plusieurs années après. En effet, après plusieurs mois de procès, le verdict du tribunal militaire d'Abidjan dans le procès sur l'assassinat du général Gueï a été annoncé. Trois des prévenus sont condamnés à la prison à perpétuité : le général Brunot Dogbo Blé, ancien commandant de la Garde républicaine ; le commandant Anselme Séka Yapo, ancien chef de la sécurité rapprochée de l'ex-Première dame Simone Gbagbo ; le maréchal des logis Séry Daléba. On le voit, sous Laurent Gbagbo, la liberté d'expression était un artifice.

Pour empêcher l'opposition d'alors de marcher, le Plateau avait été déclaré zone rouge. En mars 2004, une manifestation de l'opposition avait été réprimée dans le sang. La commission d'enquête de l'ONU sur les événements des 25 et 26 mars 2004 à Abidjan accuse, dans un rapport accablant, " les plus hautes autorités de l'Etat " ivoirien d'avoir monté une " opération soigneusement planifiée " pour réprimer une manifestation interdite de l'opposition.

Le bilan de cette répression, indique le rapport s'élève à 120 morts au moins.

La liberté de la presse était aussi mise à rude épreuve. Des journaux de l'opposition étaient déchirés dans les kiosques par endroit. En novembre 2004, les rédactions de deux journaux de l'opposition (Le Patriote et 24 Heures), ont été saccagées et incendiés par des jeunes patriotes surexcités. En mars 2003, le policier ivoirien Théodore Dago Séry assassinait de sang-froid le journaliste français Jean Hélène, correspondant de RFI à Abidjan. Malgré ce triste bilan, Gbagbo veut brusquement se faire le chantre de la liberté des droits de l'homme. C'est l'hôpital qui se moque de la charité.

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