Madagascar: Vers une tolérance à l'égard de la corruption?

Alors qu'en juin dernier, le comité de suivi du pôle anticorruption d'Antananarivo (PAC) avait décidé de renouveler à leur poste les magistrats. Un décret publié le 8 novembre constate l'expiration du mandat de 17 des 20 juges. Une nouvelle qui a fait l'effet d'une bombe.

Mercredi, le quotidien national L'Express de Madagascar révélait dans ses pages l'existence d'un arrêté pris par le ministre de la Justice le 8 novembre, constatant l'expiration du mandat de 17 des 20 juges du pôle anticorruption depuis le 14 juin dernier.

Une information qui a laissé abasourdis les magistrats et la société civile. Car le 14 juin dernier, lors d'une réunion des membres du comité de suivi du PAC, la décision avait été prise de renouveler tous les magistrats. Leur évaluation ayant prouvé leur performance à leur poste.

" On a torpillé le système anticorruption "

" On a torpillé le système anticorruption à travers la loi Idealson en réduisant l'indépendance des PAC. On a fait en sorte de retarder la mise en place des PAC, destinés à "attraper les gros poissons". Et maintenant, avec cet arrêté, c'est toute l'indépendance des magistrats au niveau des pôles anticorruption qui est mise en péril ", estime Hery Rason, directeur exécutif de l'ONG Ivorary et membre du CSE en tant que représentant de la société civile.

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Pour lui, cet arrêté " pris de manière unilatérale " n'augure rien de bon pour la suite. " On est en train de piétiner le comité de suivi évaluation des PAC et de donner la place à la volonté de l'exécutif. Tout ce que veut l'exécutif sera exécuté par les PAC. C'est gravissime ! Après quatre années de mandat (présidentiel), on a parlé de tolérance 0 à l'égard de la corruption. Finalement, on se rend compte que c'est plus tolérance 0 envers la lutte contre la corruption ", s'indigne M. Rason.

" C'est la nouvelle loi qui s'applique à partir de maintenant "

De mauvaises intentions prêtées à tort et balayées d'un revers de la main par la secrétaire générale du ministère de la Justice, Raby Savatsarah. " L'arrêté en question est juste un arrêté qui constate la fin des mandats des magistrats des PAC qui ont fini les quatre années d'exercice selon les termes de l'ancienne loi ", précise-t-elle.

Selon la nouvelle loi, le mandat des magistrats est réduit à trois ans. " Il s'agit d'un point de départ par rapport à la nouvelle "loi Idealson" qui régit les PAC. Donc ça va ouvrir droit à un appel à candidatures général pour les postes au niveau des PAC et pour ceux qui y travaillaient déjà, ils peuvent déposer des demandes de renouvellement de mandat. Ça n'a rien d'exceptionnel ", ajoute la secrétaire générale.

Quant à la décision prise en juin par consensus entre les membres du comité de suivi évaluation, " elle est rendue caduque par cet arrêté parce que c'est la nouvelle loi qui s'applique à partir de maintenant ", déclare-t-elle. Et d'ajouter : " C'étaient les dispositions de l'ancienne loi qui disaient qu'il fallait l'avis du comité de suivi évaluation pour les reconductions des membres ".

Les magistrats en poste devront assurer l'intérim jusqu'au recrutement de leurs successeurs, un véritable enjeu pour la justice. La plupart des PAC régionaux ne sont pas encore opérationnels, faute de magistrats qui remplissent tous les critères de sélection.

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