Dans un univers où la rumba est indémontable, faire de la musique tradi-moderne au Congo relève parfois du parcours du combattant. Pourtant, Nancy Matounga, artiste musicienne, a fait ce pari et attend bien trouver sa place aux cotés des Nzoungou Soul, Hardos Massamba et Freddy Massamba, des artistes qui ont choisi de mettre en lumière les richesses et les diversités musicales du Congo.
Dans les arcanes de la musique depuis 2016, Nancy, patiemment et sans faire du bruit, concocte jour après jour son opus "La Patience", qui a vu le jour en 2021 grâce à Quinté Bémol, sa maison de production. Un album de quatre titres déjà disponible sur wilkai music et que les mélomanes peuvent écouter à hauteur de 500 FCFA.
Les thèmes qu'aborde Nancy sont loin d'être des sujets à l'eau de rose. En 2017, elle sort un single sur l'immigration clandestine avec le titre " Wélé kuandi" à travers lequel elle rend hommage à toutes ces personnes englouties par l'océan Atlantique. Aujourd'hui, elle évoque les réalités congolaises à travers des sujets comme l'importance de l'arbre, un thème important au vu de l'exploitation forestière anarchique et ses conséquences; l'église, lieu sacré devenu un théâtre à cause des choses inimaginables qui s'y passent; l'attrait de la jeune fille pour les choses du monde...Des maux qui désormais banalisés poussent à l'impatience, a indiqué la musicienne.
"La patience" est donc une réponse à tous ces maux puisque l'artiste invite les Congolais à vivre selon les normes établies et non selon leurs propres convictions." Je suis sur ma plate-bande et j'avance à mon rythme, peu importe les critiques ", a fait savoir Nancy dont l'ensemble des titres de l'album est un patchwork de maux et de mots où elle expose ses ressentis, sa vision du monde, en compilant reggae, rumba et musique tradi-moderne.
En outre, l'artiste n'est pas sous les feux de la rampe pour remplir les salles ou les stades mais elle espère plutôt toucher des vies par son message d'éveil et de prise de conscience. "Je sais que faire de la musique tradi-moderne peut être pénalisant, vu que les mélomanes congolais considèrent cela comme archaïque. Mais j'estime que la puissance d'un pays est avant tout fondée sur sa culture et le Congo a une richesse musicale inestimable. Ce serait dommage de ne pas l'exploiter afin d'en faire profiter aux autres. En effet, au lieu d'importer la musique d'ailleurs, l'idéal serait de valoriser la nôtre ", a expliqué avec passion Nancy.
Chanter donc les maux actuels dans sa langue maternelle et autres langues locales( comme le refrain de "La Patience" qui est chanté en mbochi) en y intégrant la musique tradi-moderne a toujours été une passion pour l'artiste qui voue un amour incommensurable pour la musique de l'ethnie Dondo dans laquelle elle a baigné dans son enfance. Et qui dit musique inclut inéluctablement la danse de sa contrée nommée Ndara, à laquelle elle intègre le loungoyigoyi (guitare traditionnelle) que jouait déjà son aïeul.
