Gabon: "En 2009 comme en 2016, le peuple gabonais a clairement rejeté dans les urnes un choix qui lui a malheureusement été imposé par la force des armes"

28 Novembre 2022
document

L'intégralité du discours prononcé par Paulette Missambo lors de la rentrée politique de l'Union Nationale, le 27 novembre dernier, à la Chambre de commerce de Libreville.

Mesdames et Messieurs les responsables des Partis politiques amis,

Mesdames et Messieurs les représentants de la société civile, Distingués invités,

Monsieur le Secrétaire exécutif,

Madame et messieurs les Vice-présidents,

Madame et messieurs les Secrétaires exécutifs adjoints,

Militantes et militants, chers compagnons,

Chers compatriotes,

Mesdames et messieurs,

Je suis très heureuse de me retrouver parmi vous, pour cette rentrée politique de l'Union Nationale. Je salue chaleureusement tous les Présidents et représentants de Partis amis, qui nous font l'honneur de leur présence.

J'adresse un salut spécial aux représentants provinciaux de l'Union Nationale venus de l'intérieur du pays, aux coordonnateurs ainsi qu'à tous les militants ici présents. Grâce à eux, à leur dévouement, à leur constance, à leur détermination et à leur énergie, notre Parti poursuit son implantation.

Cette rentrée politique n'est pas un moment ordinaire. Au cours de l'année 2023 qui arrive, les Gabonaises et les Gabonais seront appelés aux urnes pour élire les conseillers municipaux, les députés et le président de la République.

%

À travers ces trois élections se jouera l'avenir de notre pays pour plusieurs décennies. Dans cette perspective, le moment est venu de tracer les contours de notre action commune. L'Union Nationale a donc choisi de sortir de son siège pour s'adresser au pays et à sa classe politique, pour partager sa vision avec tous.

En 2009 comme en 2016, le peuple gabonais a clairement rejeté dans les urnes un choix qui lui a malheureusement été imposé par la force des armes, et avec la complicité des femmes et des hommes qui étaient en charge de la conduite du processus électoral.

Depuis le mois d'octobre 2018, une imposture, que nul ne conteste plus, s'est installée à la tête de l'État. A raison, nos compatriotes peinent à savoir qui décide pour eux et pour le Gabon.

Au regard de la crise multiforme - éthique, politique, économique, financière et sociale -, que traverse notre pays, il ne fait aucun doute qu'en 2023, le rejet de ce régime sera encore plus franc qu'en 2016. La responsabilité de la classe politique, dans son ensemble, est d'entendre le pays et de lui offrir la perspective dont il a tant besoin. Pour l'opposition gabonaise et pour tous les patriotes soucieux du devenir de notre pays, le défi est de transformer le rejet du pouvoir en place en victoire électorale puis en alternance démocratique.

Chers compatriotes,

Mesdames et messieurs

Aujourd'hui, tous les indicateurs sont au rouge. On l'a vu avec ces éboulements et inondations qui ont semé la mort et la désolation dans de nombreuses familles parce que la question de l'urbanisation de notre capitale et celle connexe du logement n'ont jamais été traitées avec le sérieux qu'elles nécessitent.

On le voit avec toutes ces routes impraticables qui transforment nos provinces, départements et villages en autant d'enclaves coupées les unes des autres. Qu'on parle de l'Estuaire, du Haut-Ogooué, du Moyen-Ogooué, de la Ngounié, de la Nyanga, de l'Ogooué-Ivindo, de l'Ogooué-Lolo, de l'Ogooué-Maritime ou du Woleu-Ntem, le constat est le même : l'échec des gouvernements successifs en matière d'infrastructures. Partout, on se retrouve face à un pays à l'abandon.

La vie économique de notre pays se singularise par un essoufflement de l'activité et un chômage endémique, qui dépasse les 38% chez les jeunes.

Malgré les promesses et discours alléchants, plus de 17. 000 emplois nets ont été détruits au cours des cinq dernières années. Piliers de notre système de protection sociale, la CNSS et la CNAM-GS peinent désormais à remplir leurs missions. Quant aux retraités du secteur public, ils ont le plus grand mal à vivre avec les maigres pensions qui leur sont versées.

Dans leur immense majorité, nos compatriotes n'arrivent plus à se nourrir convenablement, tant l'inflation se concentre principalement sur les produits alimentaires de base. Pendant que les Gabonais s'appauvrissent et vivent le martyr, on assiste, comme jamais dans l'histoire de notre pays, au pillage des ressources ainsi qu'à un endettement sans fin.

A quelques mois d'une année particulièrement chargée, rien n'est fait pour éviter à notre pays de sombrer davantage. Bien au contraire. Tout semble être fait pour le précipiter dans l'abîme et dans le chaos. La violence observée dans nos écoles, villes et villages, n'est que le signe du mal-être de populations abandonnées à elles-mêmes et confrontées à une pauvreté endémique.

Oui, nous assistons à une clochardisation progressive de nos compatriotes. Notre vivre-ensemble n'est plus menacé. Il est sérieusement entamé. Alors, peut-on et doit-on continuer à danser sur le pont pendant que le bateau coule ? à l'Union Nationale, nous ne pouvons nous résoudre à cela.

Chers compatriotes,

Mesdames et messieurs

2023, année de toutes les élections, se présente comme notre principal défi. L'an prochain, nous avons rendez-vous avec l'histoire. Avec plusieurs autres formations politiques amies, notamment le Congrès pour la démocratie et la justice (CDJ), Les Démocrates, le Front démocratique et culturel (FDC), le Parti du réveil citoyen (PRC), le Rassemblement pour le Gabon (RPG), le Rassemblement pour la patrie et la modernité (RPM), le Rassemblement des patriotes républicains (RPR), l'Union démocratique et sociale (UDS), et l'Union pour la nouvelle République (UPNR), nous avons pris l'initiative de soumettre au pays un mémorandum en vue d'une réforme du système électoral national.

Notre conviction est que, je cite : "Le maintien du système électoral en vigueur ou le refus de le réformer pourrait conduite le pays vers des tensions aux conséquences incalculables." Fin de citation. Sur le même thème, le parti REAGIR et la société civile ont, eux aussi, déposé des mémoranda. Pour notre part, nous nous sommes simultanément adressés à la Cour constitutionnelle et au ministère de l'Intérieur.

Six mois plus tard, l'exécutif n'a toujours pas jugé utile de discuter de nos propositions. Il ne trouve toujours pas nécessaire d'engager cette concertation pourtant annoncée par le Ministre de l'Intérieur. C'est pourquoi, avec gravité, nous disons à l'endroit de tous, particulièrement du pouvoir exécutif, que la responsabilité commande que cette préoccupation soit entendue et traitée avec le plus grand sérieux.

Il ne s'agit nullement d'ouvrir un quelconque marchandage politicien. Il s'agit de créer les conditions de la préservation de la paix sociale et de la construction d'une démocratie participative et apaisée.

Chers compatriotes,

Mesdames et messieurs

En 2016, près de 34% des Gabonais en âge de voter n'avaient pas jugé nécessaire de s'inscrire sur les listes électorales. Parmi les inscrits, près de 43% avaient opté pour l'abstention. L'enrôlement et la participation doivent donc nous préoccuper au plus haut point. Nous devons examiner ces questions le plus rapidement possible.

Nous devons le faire avec méthode et loin de toute démagogie. Nous ne devons pas nous laisser enfermer dans des postures dogmatiques. Nous devons nous doter d'une stratégie commune pour peser sur les évènements. Cela veut dire que nous devons réfléchir aux moyens de donner à chaque Gabonaise et à chaque Gabonais des raisons d'y croire et de se sentir pleinement concerné par les échéances à venir. Voilà pourquoi, je propose aux Présidents des partis signataires du Mémorandum pour une réforme du système électoral national, au parti REAGIR et, pourquoi pas, à d'autres partis qui partagent la même vision, de nous retrouver sans délai afin d'esquisser les contours d'un cadre méthodologique et organisationnel pour une réflexion commune.

Il s'agit de permettre le rassemblement et l'unité des forces de l'alternance, d'impulser une dynamique citoyenne et agissante, tout en posant les bases d'une gouvernance moderne. Avant, pendant et après les échéances de 2023, nous devons être capables d'agir ensemble. Notre responsabilité est d'apporter aux Gabonais les réponses aux deux questions suivantes : "Où va le Gabon ?" et "Que devons-nous faire pour stopper son déclin ?".

Chers compatriotes,

Mesdames et messieurs

La présidentielle - vous le savez - est l'élection politique majeure. Nous devons nous y préparer. Les législatives constituent le deuxième scrutin d'importance. En regardant dans le rétroviseur, on ne peut que nourrir quelques regrets, la dynamique unitaire qui avait pourtant montré son efficacité en 2016 n'ayant pu être rééditée en 2018, le débat s'étant focalisé sur la pertinence de notre participation.

Nous devons nous garder de retomber dans les mêmes errements. Le troisième scrutin, ce sont les locales. Parce qu'elles déterminent la composition future du Sénat, je souhaite que nous nous y préparions avec minutie. Cela signifie inciter nos compatriotes, notamment les jeunes et les femmes, à s'inscrire sur les listes électorales. Cela signifie aussi pointer les dangers de l'abstention car, s'abstenir c'est donner à autrui le droit de décider pour nous et sans nous !

Cela signifie enfin que nos militants soient prêts à prendre part aux formations que nous devrons organiser en direction de nos scrutateurs afin de les mettre en capacité de remplir correctement leur mission avant, pendant et après les différents scrutins. Je suis convaincue que si nous nous organisons bien, si nous parvenons à mobiliser l'ensemble de nos forces et faire progresser le taux de participation, l'alternance sera à notre portée.

Chers compatriotes,

Mesdames et messieurs,

Fidèle à cette conviction et instruite par l'expérience du passé, l'Union Nationale veut proposer une dynamique nouvelle. En 2016, notre parti a indiqué la voie de l'unité et du rassemblement en initiant le processus de désignation du candidat unique de l'opposition à la présidentielle. C'est le lieu de rendre un vibrant hommage aux candidats qui n'avaient pas été retenus et qui avaient su se hisser au niveau des enjeux en renonçant à leurs légitimes ambitions pour faire triompher l'intérêt de l'opposition, du Gabon et des Gabonais.

Comme en 2016, nous devons, dès à présent, privilégier l'unité et le rassemblement. Nous devons le faire dans l'intérêt du peuple gabonais. Nous devrons le faire pour nos enfants, pour nos petit-enfants et pour les générations futures. Nous devons le faire dans le cadre bien compris de scrutins à deux (2) tours. Voilà pourquoi nous devons innover. Voilà pourquoi nous devons adapter notre stratégie commune.

De façon solennelle et devant le peuple gabonais, je lance un appel pressant à tous les partis signataires du Mémorandum pour une réforme du système électoral national, au parti REAGIR ainsi qu'à tous les patriotes qui adhèrent à cette initiative, afin que nous nous accordions sur les principes, objectifs et actions à mener ensemble en vue d'obtenir l'organisation d'élections libres, transparentes et apaisées en 2023. Sans tabou, nous devons ouvrir une discussion sur la reconstruction de l'Etat et de la République.

Si nous devons impulser le renouvellement de notre pratique politique, nous devons aussi arrêter un programme commun de gouvernement. Nous devons le faire dans le respect des identités de nos organisations respectives. En un mot, nous devons conclure un "Pacte de confiance." Voilà pourquoi, ce dimanche 27 novembre 2023, à la Chambre de commerce de Libreville, j'en appelle au rassemblement et à l'unité de toutes les forces de l'opposition pour travailler ensemble à l'avènement de l'alternance démocratique en 2023.

Vive l'Union Nationale !

Vive l'unité de l'opposition !

Vive la République !

Pour que vive le Gabon !

Je vous remercie.

AllAfrica publie environ 400 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.