Madagascar: Réflexion - Us et coutumes ... côtiers mis de côté

La culture est le pilier d'une région, la raison d'être d'un groupe ethnique. Le fruit de l'itinéraire historique des ancêtres ! Elle est l'identité d'un peuple. Jalousement gardée, c'est le repère.

Continuité culturelle

Après 64 ans de colonisation, l'indépendance fut proclamée par un bouvier d'Anahidrano devenu instituteur. Makoalahy est le père de l'indépendance. Ce n'est pas par hasard si Philibert Tsiranana a déclaré l'indépendance sur la pierre sacrée de Mahamasina, cet endroit qui rend saint, où les rois de l'Imerina s'y introduisaient. Le message est clair, l'unité nationale par excellence. La deuxième preuve est l'initiative du président de la Première République d'intégrer les nationalistes MDRM dans son gouvernement. Certes, des interprétations divergentes, cependant, en lisant les vieux documents, en écoutant les discours du patriarche, il avait l'ambition d'unir Madagascar. Il est vrai que chaque décision politique sous-entend une arrière pensée. Tsiranana voulait également que les groupes ethniques malgaches lui emboîtent le pas. Outre cela, Philibert Tsiranana avait une politique culturelle bien déterminée. Sensible dans le domaine culturel, le numéro Un malgache de l'époque fait la promotion de la musique traditionnelle, le vako-drazana. Il soutient les différents groupes malgaches aussi bien dans la capitale que dans les autres régions. Ces derniers divertissaient les membres du parti au pouvoir lors de leurs réunions. L'opération transistor lancée dès 1961 a propulsé les collectifs vers une popularité en flèche. À son tour, la Deuxième République a continué à sa manière la politique culturelle. La maison de disques Kaiamba, qui se transforme en une véritable industrie musicale dans les années 1980, doit beaucoup au frère du leader incontesté. Grâce à ce "building musical", Toamasina demeure la capitale de la musique urbaine de la Grande île, une pépinière où se forment les monuments du patrimoine immatériel.

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" On a honte de nous "

À présent, Madagascar est comme un danseur ivre. Le talent est toujours présent, mais les pas sont faussés par le populisme des surintendants. Le paraître prend le dessus. Les artistes sont contraints de se déguiser en peau d'orange pour être élevés au plus haut grade. Sinon, ils voient leur inspiration canalisée. S'en vouloir aux artistes, hors de question. Ils veulent percer à tout prix. Cela se comprend. Les imitateurs sont encouragés, accueillis en grande pompe, pendant que les vrais artistes ne sont pas considérés ! Certains arrivent même à dire que " le Palais des sports s'est métamorphosé en Panthéon des artistes des arrières-terres ". Ce point de vue s'est répandu ces dernières semaines. Un ressentiment envahit l'esprit des habitants des faritra. Au fond d'eux, ils croient que leur tradition est une sous-culture. L'hypocrisie sociale circonvient lorsqu'on écoute un grand artiste de Bemarivo faire son discours de dernier adieu à un chanteur traditionnel. Combien de jeunes femmes en veste et en jupe serrée n'oseraient même pas dire en malgache à leur gynécologue qu'elles ont chopé une maladie vaginale ? Ce n'est pas charmant... Ce n'est pas beau à entendre... . Les élèves du CM2 ne s'exprimeront pas en malgache pour dire qu'ils ont envie de soulager leur vessie. " Il n'y a pas de mots tabous ", disait un docteur d'un CSB2 situé au fin fond de la campagne. En fait, c'est la mentalité qui salit les propos...

" Table rage " du passé

Bien entendu, elle constitue l'ensemble des traditions, des rites, des us-et-coutumes, les mœurs, le langage, le parler, l'art vestimentaire. La Grande île est formée de peuples ayant des cultures différentes. Mais jusqu'à présent, ces habitants ne se comprennent pas. Cela est dû à diverses raisons. Manque d'infrastructures routières, manque de communication, désintéressement de l'histoire des régions, des problèmes souvent cités par les érudits et enseignants-chercheurs des différentes disciplines universitaires. Ces malheureux prêcheurs dans le désert essaient de projeter leurs recherches sur les écrans, mais qui les écoutent ? Triste réalité, les citoyens préfèrent braquer leurs yeux sur les écrans plats diffusant la légende d'Arthur Pendragon, le sommeil profond de la Belle au bois dormant, car en mémorisant les passages et les dialogues de ces contes, ou encore les citations de Georges Washington, on se cultive. Les beaux discours de Tsimiaro, de Ratsimilaho, la Bravoure de Marify, le courage de Zily Boana ne figurent pas dans les manuels scolaires parce qu'ils n'avaient pas de châteaux en dur et des épées en argent. Donc, se cultiver, c'est connaître par cœur la vie de l'Occident ! En effet, la colonisation est une période indélébile dans la frise chronologique des pays orientaux. Les vazaha, considérés comme porteurs de lumière ont déraciné les cultures des autochtones qualifiés de sauvages voire des Barbares. Une perception que ces premiers ont calquée sur celle de l'Empire Romain. Pour régner, les colonisateurs divisaient les indigènes pour qu'ils ne puissent pas se rallier à contrer leur dominateur. Une vieille astuce qui s'avère toujours efficace de nos jours. À Madagascar, la situation est palpable. Bien que chaque région avait sa propre royauté durant la période précoloniale, et qu'un soi-disant grand royaume phagocytait un immense territoire au XIXème siècle, les Français accentuaient davantage la séparation en nourrissant une haine viscérale aux groupes ethniques existant dans le but de les dominer. Cette lourde séquelle perdure depuis la Première République. Pourtant, aucun dirigeant n'a évoqué ce problème cancérogène. Un abcès que tout le monde ne veut pas crever. Alors que la situation dégénère d'année en année. La vie continue, la rancœur s'accroît comme le prix des produits de première nécessité. L'ethnicité est un sujet tabou dans les débats télévisés d'Iarivo. Une capitale exocentrique nostalgique des gloires du passé effectuées par un jeune souverain qui a goûté de sa propre bouche la mer de Toamasina.

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