Les chefs d'Etat et de gouvernement de la Cédéao ont émis l'idée de délocaliser le dialogue politique guinéen pour favoriser la participation des principaux opposants.
L'idée de délocaliser le dialogue politique guinéen dans un pays tiers n'est pas une première dans l'histoire politique de la Guinée. Il y a exactement douze ans, Ouagadougou avait servi de cadre au règlement d'une crise entre militaires guinéens. Après plusieurs jours de négociation dans la capitale burkinabè, le chef de la junte, Moussa Dadis Camara et le général Sékouba Konaté, avaient fini par signer un accord, sous l'égide de Blaise Compaoré. Le texte prévoyait que Moussa Dadis Camara prenne "librement un temps de convalescence" et qu'une élection présidentielle se tienne dans "six mois".
L'opposition, pour sa part avait été autorité à désigner le Premier ministre de la transition, se souvient encore l'éditorialiste guinéen Nouhou Baldé. Pour lui, la proposition faite par la Cédéao de tenir le dialogue en dehors de la Guinée, dénote de la profondeur de la crise actuelle.
"Oui, cela montre qu'il y a une crise et que la junte devrait se rappeler qu'on ne peut pas se bunkériser et réussir une transition. Mon avis, on a donc le choix entre poser les actes qui vont dans le sens de l'apaisement ou accepter au moins qu'on délocalise le dialogue pour permettre aux Guinéens qui se sentent exclus de participer à la transition" explique Nouhou Baldé à la DW.
Un avis contraire
Mais, pour Keamou Bogola, du Front national pour la défense de la transition, il est impossible de déplacer tous les acteurs concernés par le dialogue, à l'étranger. Pour lui, les leaders politiques absents du pays pour des raisons juridiques ou politiques, ne sont pas interdits de séjour en Guinée.
"Nos trois compatriotes ne sont pas interdits de séjour en Guinée - je veux parler d'Alpha Condé, Cellou Dalein Diallo et Sidya. Le Capitaine Dadis Camara était interdit de séjour en Guinée non seulement par la communauté internationale mais aussi par les autorités guinéennes" précise Keamou Bogola.
Pendant ce temps, les autorités de transition tentent d'accorder leurs violons avec une dizaine de coalitions politiques et d'organisations de la société civile. En revanche, le Front national pour la défense de la constitution, puissant mouvement de contestation contre la prolongation de la transition dénonce un dialogue politique inique. La Cédéao réussira-t-elle à convaincre les militaires au pouvoir de délocaliser le dialogue ? Pour l'instant, le gouvernement de transition demande aux partis politiques d'observer une trêve de toutes les manifestations pour une durée de 24 mois.