Un an après la détention de Joël Aïvo et de Reckya Madougou, leur situation semble loin des préoccupations des Béninois.
Le 7 décembre 2021, la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) au terme d'une longue journée de procès a condamné le constitutionnaliste et homme politique Joel Aivo à 10 ans de prison. Il a été reconnu coupable de blanchiment de capitaux et de complot contre l'autorité de l'État. Après plus de vingt heures d'audience, Reckya Madougou, 47 ans, a été reconnue coupable, quatre jours plus tard de "complicité d'actes terroristes" par la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet). Elle écope de vingt ans de prison ferme.
Joèl Atayi Guèdègbé, expert en gouvernance et acteur de la société civile se remémore le contexte dans lequel ce procès a eu lieu.
"Il est survenu à la suite de contradictions politiques très fortes à l'occasion d'une élection présidentielle. Le procès a eu lieu, il n'a pas forcément convaincu de la véracité des faits allégués, mais voilà, la sentence a été dite sans que les accusés aient interjeté appel" rappelle-t-il.
Un an après, le silence total
Presque plus personne n'évoque la situation de Joël Aïvo et de Reckya Madougou. Patrick Hinnou y voit une indifférence apparente. Pour l'analyste politique, Aïvo et Madougou bénéficient toujours de l'attention de leur famille biologique. Mais celle politique semble avoir perdu tout espoir.
Selon Patrick Hinnou "militants et sympathisants qui étaient partie prenante pour la lutte à l'époque se trouvent découragés face à la lourdeur de la peine, d'espérer quoi que ce soit du gouvernement Talon vu la fermeté avec laquelle le régime a géré cette crise, qui a débouché sur une sanction vraiment exemplaire, lourde, dissuasive..."
D'autres Béninois, dans l'ombre nourrissent toutefois toujours de l'espoir. Mais pour Joel Atayi Guèdègbé leur sort dépend plutôt des acteurs politiques. Selon lui, "ça dépend probablement des tractations dans les couloirs, ça ne peut pas se faire sur la place publique.
Et donc chacun retient son souffle, je pense que c'est beaucoup plus sous cette aune-là qu'il faut mesurer le silence que vous observez. A quoi sert-il de faire du bruit, de faire du tapage alors que éventuellement des discussions, des réflexions, d'autres approches sont probablement en œuvre."
On se préoccupe peut-être de leur sort, au fur et à mesure que le temps passe les Béninois croisent les doigts, l'acteur de la société civile aussi.
" Leur absence est quand-même un manque pour le débat public. Je veux croire que eux aussi, du fond de leur cellule ils ont pris le temps de méditer sur ce que pourrait être désormais leur combat ou comment leur combat devrait être mené pour continuer d'être pertinent et de retenir l'attention de leurs concitoyens " précise Atayi Guèdègbé.