Doany. En pays sakalava, le mot a plusieurs significations. En premier lieu, il s'agit d'un endroit rendu sacré par un évènement important. " Le souvenir de cet évènement est souvent perdu et l'emplacement du lieu sacré est simplement marqué par quelques offrandes au pied d'un arbre ou par une petite clôture, rony " (J.-C. Hébert et P. Vérin).
En second lieu, le terme désigne un reliquaire, là où sont conservés " parfois dans des étuis de métal précieux, des fragments de dents ou d'os ". Enfin, les Doany les plus vénérés sont les lieux de sépulture royale. " Bezavo appartient à cette catégorie. " Bezavo est situé sur une colline boisée dominant la vallée de la Mahavavy, dans la sous-préfecture de Mitsinjo, sur le site de l'ancien Tongay. C'est là qu'a résidé Andriamandisoarivo qui, à la fin du XVIIe siècle, fonde le royaume de Boeny après avoir soumis les gens de l'Ambongo, de la Mahavavy, de la Betsiboka et de la Mahajamba, étendant même sa domination au pays des Antankarana et des Sihanaka. " Le nom de Bezavo serait une corruption de celui de Bemazava, nom de la race royale, mais il pourrait aussi signifier beaucoup de brouillards. "
Le Doany est constitué de trois enceintes (Valamena) successives. Dans la première enceinte se trouve la case contenant des reliques. Vers 1960, les deux auteurs y trouvent une hache " manambaly behao " très lourde ayant appartenu à Ndremandiso-arivo, un couteau " jambia faly ", des sabres " varara ", des cruches " sajao faly " reproduisant celles apportées du Menabe qui auraient été cassées. À l'intérieur du grand Valamena se dresse la deuxième enceinte. Ndremandisoarivo la fait construire en pierre, de son vivant; une centaine d'esclaves auraient été échangés à des Vazaha," sans doute des Arabes à la baie de Boina ", en rétribution. À l'intérieur de l'enceinte, il y a des tombeaux divers : tumulus ou cercueils de bois en forme de pirogue exhaussés sur des pierres.
La troisième enceinte est assez symbolique ; de 6m de côté, elle délimite un enclos où sont disposés les cercueils de Ndremandisoarivo au sud et de la reine Ndremandika-vavy au nord. Dans un enclos voisin, " sont déposés des cercueils " et à l'ouest de l'enceinte centrale, de " magnifiques pièces de vaisselle ". Une tradition souligne que Ndremandisoarivo et son épouse, Ndremandika-vavy, n'ont qu'un seul fils, Ndreboninarivo.
" Il y aurait à Tongay-Bezavo la sépulture d'une femme enterrée jadis vivante. Selon une tradition, il y avait jadis un Mpanjaka- peut-être était-ce Ndremanetriarivo- qui voulut devenir maître du Milanja. Il consulta un Moasy célèbre (peut-être était-ce Andriamisara) et il lui demanda ce qu'il devait faire pour conquérir un grand royaume et acquérir la richesse. Le Moasy répondit : C'est difficile, mais vous pouvez y parvenir. Il vous faut sacrifier ce que vous avez de plus cher. " Le Mpanjaka s'interroge sur ce qui lui tient à cœur et offre tous ses plus beaux bœufs coupés. " Ce n'est pas cela ", dit le Moasy. Le Mpanjaka rétorque : " Rien n'est plus cher que mes bœufs. " Une des femmes du Mpanjaka est présente et intervient : " N'est-ce pas de moi qu'il s'agit ? " Le Moasy se fait le porte-parole de l'oracle : " Mila sava mahazo " (je désire la femme la plus aimée du roi). Elle s'offre ainsi en sacrifice. On l'enterre vivante avec deux autres femmes, ses esclaves. On refuse de la tuer et on la place au fond d'une fosse, assise.
On construit un plafond au-dessus de sa tête et on recouvre de terre. Elle meurt donc asphyxiée. " Son corps est toujours à Tongay. Il est vénéré avant tout autre. " Une autre tradition qui contredit quelque peu les précédentes, raconte que lorsque Ndremandisoarivo arrive à Bevazo, il a déjà trois enfants de Ndremandika-vavy. Un Moasy lui conseille de sacrifier l'ainé s'il veut conquérir des royaumes. Cet enfant est une femme, déjà mariée avec plusieurs enfants, " mais la tradition ne rapporte pas son nom, non plus celui de ses parents. Pour la circonstance, on la revêt de ses plus beaux vêtements et bijoux. Elle serait enterrée debout à l'est du Doany de Bezavo, une clôture distingue l'emplacement jadis, car il n'y a pas de tumulus de pierre. "