Cela réclame du sérieux, des moyens et de la patience. Mais documenter les violations des droits de l'Homme est crucial pour que l'histoire ne se répète pas.
À la veille de la Journée internationale des droits de l'Homme du 10 décembre, une base de données sur les atrocités de la crise anglophone au Cameroun a publié de nouveaux rapports de vérification d'incendies et de meurtres perpétrés entre 2020 et 2022 dans les zones de conflits.
S'il faudra sans-doute encore patienter pour voir les auteurs de ces crimes devant la justice, le travail de cette initiative bénévole, basée au Canada, n'en reste pas moins décisif. Pourquoi ? C'est ce que nous explique Christopher Fomunyoh, directeur du département Afrique au National Democratic Institut, une ONG qui œuvre pour la démocratie et les droits de l'homme à travers le monde.
Retranscription de l'interview
Christopher Fomunyoh : Il y a un travail vraiment approfondi qui a été fait par cette structure qui mène des enquêtes sur la crise anglophone au Cameroun depuis le début et qui vraiment a pu de manière très scientifique, identifier les différentes atrocités et créer une base de données qui devrait servir pour que justice soit rendue le moment venu.
DW : Ce qui est particulier peut être dans les découvertes de cette base de données, c'est que ce sont des actions qui ont été menées contre les civils ou contre des biens civils, donc par exemple des écoles ou des hôpitaux. Qu'est ce que ça nous dit de la violence de cette crise au Cameroun ?
Christopher Fomunyoh : Évidemment, vous le savez, à cause de cette crise, il y a eu des milliers de morts. La majorité des victimes sont des civils qui parfois ont été attaqués par les forces gouvernementales et parfois aussi par les groupes armés. On a vu pendant cette crise que même les écoles ont été brûlées. Même les hôpitaux ont été attaqués. Ce qui va vraiment à l'encontre de toutes conventions internationales reconnues et signées par l'Etat du Cameroun.
DW : Comment se fait il que ces lois puissent être brisées?
Christopher Fomunyoh : Parce qu'il y a eu une impunité incroyable pendant les cinq, six dernières années. Les gens ont exécuté leurs concitoyens en toute impunité et je pense que si on ne les rend pas coupables, cela va jeter les bases des autres atrocités dans l'avenir.
DW : Dans les régions que vous connaissez bien, il y a beaucoup de pays actuellement qui sont dirigés par des militaires. Je pense au Tchad, au Mali, à la Guinée. Est-ce qu'il faut chercher le dialogue ou est ce que puisque c'est des régimes d'exception, on ne parle pas avec ce genre de dirigeants ?
Christopher Fomunyoh : Non, je crois qu'il faut être ouvert à parler avec tout le monde. Et aux trois d'ailleurs que vous avez cité, j'ajouterai le Soudan et le Burkina Faso. Le dialogue doit être maintenu avec ces régimes là qui sont des régimes temporaires, pour que ces pays là reviennent à l'ordre constitutionnel qui devrait pouvoir mieux protéger les droits des populations.