Burkina Faso: Voyage du Premier ministre en Russie - Jusqu'où ira Joachimson ?

analyse

Je suis tombé des nues quand j'ai lu quelque part que le Premier ministre est allé en Russie. Je n'y croyais pas. J'ai enlevé mes binocles que j'ai bien essuyé, mais la vérité est là, toute crue, en noir-blanc : le Premier ministre Apollinaire Kyélem de Tambèla a pris l'avion pour Moscou, le chapeau bien enfoncé pour ne pas être reconnu.

Celui-là même qui, avant sa nomination, avait, dans L'Observateur paalga, dit le bien qu'il pensait du pays de Poutine. C'était suite à cette question qui lui a été posée : " Parmi les nombreux soutiens au régime figurent les partisans d'une coopération avec la Russie et pour le départ des Français : êtes-vous de cette catégorie ? Et voici sa réponse sans équivoque : " Je ne suis pas de ceux-là. Je suis pour la diversification mais par pour le départ de X ou Y... La Russie est plus prédatrice que la France. Demandez des nouvelles à la Somalie, à l'Ethiopie et à l'Angola, ils vous le diront... L'emprise de la Russie sur ses partenaires est beaucoup plus importante ; ceux qui réclament la Russie à cor et à cri ignorent cela et veulent qu'on chasse la France. Beaucoup sont de bonne foi car ignorants et victimes de la campagne d'intoxication en cours. Mais certains vivent de lobbies russes et ça aussi c'est bien connu. Moi qui vous parle, j'ai fait Moscou comme bien des compatriotes. Hier comme aujourd'hui, le sort des Noirs y est moins reluisant qu'en France ou dans n'importe quel pays de l'Occident ".

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Heureusement que Poutine ne lit pas les journaux burkinabè... à moins que ce ne soit pas de la même Russie, celle de Tsar, dont on parle. Il est vrai que notre chef du gouvernement n'est pas à une contradiction près. Lui qui, avant d'être appelé à la Primature, avait déclaré la main sur le cœur qu'il n'était pas intéressé par le poste de Premier ministre, même si on le lui proposait ; lui qui, par ailleurs, avait voué aux gémonies Bassolma Bazié, le traitant d'inconsistant comparativement à son prédécesseur à la CGT-B, Tolé Sagnon. Et qui voit-on à sa droite, qui plus est, auréolé même du statut de ministre d'Etat ? Bassolma Bazié, bien sûr ! La dernière surprise en date, après une remontrance sévère, c'est quand il a demandé à la France, en lieu et place de l'autofinancement, de financer les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP).

Ce changement régulier de tunique ne vous rappelle-t-il pas le bon petit mot de l'ancien président français Edgar Faure, selon lequel, " ce n'est pas la girouette qui tourne, c'est le vent " ? Venant de celui qui a eu la prouesse d'avoir été successivement radical-socialiste, républicain de gauche, radical, gaulliste, radical, giscardien, chiraquien, giscardien puis de nouveau chiraquien tout en siégeant au groupe Gauche démocratique du Sénat, c'est tout dire sur le côté caméléon de la politique. Et puis, à la décharge de notre Premier ministre, il est vrai que la politique étrangère d'un pays n'est pas décidée par lui mais par le président... Mais il ne faut pas trop en faire quand même... Jusqu'où ira donc Joachimson(1) ?

(1) En plus de Tambèla, son village d'origine, surnom qu'il avait accolé à son nom en hommage à son père Joachim

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