C'est presqu'un sommet délocalisé de l'Union africaine (UA). Du 13 au 15 décembre 2022 se tient en effet l'U.S. Africa Forum, autrement dit, le sommet USA-Afrique, où vont converger une cinquantaine de chefs d'Etat et de gouvernement du continent.
Autant dire la quasi-totalité des Etats africains. Chose notable quand on sait que les sommets de l'UA peinent souvent à rassembler une grande majorité des dirigeants africains. C'est que Washington vaut bien le déplacement, ne serait-ce que pour serrer la louche du locataire de la Maison Blanche et avoir le quart d'heure de sécurité avec lui.
Deuxième du genre après 2014, du temps où notre frère Barack Obama était le chef de l'exécutif américain, la présente rencontre va notamment se pencher sur la sécurité alimentaire, la crise climatique, la gouvernance démocratique, la sécurité, ou encore Agoa, l'accord qui entend faciliter les exportations africaines vers les Etats-Unis, et qui est prolongé jusqu'en 2025. Autant dire les différents maux qui frappent de plein fouet le berceau de l'humanité. Et cerise sur le cake, le président Joe Biden pourrait officialiser son engagement à soutenir l'admission de l'Afrique dans le G20, mais aussi et surtout dans le prestigieux Conseil de sécurité des Nations unies.
Il faut cependant bien plus que la volonté américaine pour que cette revendication matricielle des pays africains devienne réalité. En vérité, dans cette auberge espagnole où chacun apporte son menu, aux questions multilatérales vont se greffer d'innombrables questions bilatérales.
S'il y a bien un point qui sera abordé au cours de ce sommet et qui retient l'attention de nombre de participants africains, c'est bien la sécurité, une des plaies qui rongent le continent, de la Somalie à la RDC, en passant par le Sahélistan. Depuis le premier sommet de 2014, le cancer qui avait commencé à ronger la bande sahélo-saharienne s'est métastasé pour gagner le Mali, le Niger, le Burkina et même les pays du Golfe de Guinée, sans que le soutien des grandes puissances, à commencer par le pays de l'Oncle Sam, ait jamais été à la hauteur des pays sinistrés.
S'il est vrai que l'armée américaine intervient dans le soutien logistique et les renseignements pour l'accompagnement des pays touchés par le terrorisme, de Donald Trump à Joe Biden, l'administration américaine s'est toujours refusée à soutenir la demande des Etats membres du G5 Sahel de placer l'organisation, bien que moribonde, sur le chapitre 7 de la Charte des Nations unies, cette disposition qui prévoit une action en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d'acte d'agression.
Et l'amertume est d'autant plus grande aujourd'hui qu'on voit la débauche de moyens déployés pour soutenir l'Ukraine dans le conflit qui l'oppose à la Russie. Et ce n'est certainement pas demain que les choses vont changer, même si ce jamboree politico-diplomatique sonne comme une offensive de charme au moment où le sentiment anti politique française prend de l'ampleur dans les pays d'Afrique francophone. A l'inverse, l'influence chinoise et russe est de plus en plus prégnante, pour ne pas dire agressive, s'agissant de Moscou qui, à travers le groupe de mercenaires Wagner, étend de jour en jour ses tentacules, notamment en Centrafrique, au Mali, au Soudan, au Mozambique, à Madagascar... Et peut-être demain au Burkina !