Burkina Faso: Mouss Black, l'artiste qui monte...

Moussa Sawadogo, alias Mouss Black, est un jeune artiste plasticien sculpteur burkinabè. Artiste aux multiples casquettes, l'homme est sculpteur-installateur, peintre et dessinateur. Il élabore une œuvre protéiforme et résolument contemporaine qui l'inscrit peu à peu au rang des artistes les plus prometteurs du Burkina.

Moussa Sawadogo, quoique trentenaire (il est né en 1990), a une longue pratique artistique au compteur. Contrairement à la plupart des sculpteurs burkinabè, Mouss Black n'est pas descendant d'une famille de forgerons ou de bronziers fondeurs. C'est à la Fondation Olorun, ce creuset de création artistique créé par Christophe de Contenson, qu'adolescent, précisément en 2004, il s'initie à l'art du design aux côtés d'aînés comme l'électricien et designer Moussa Paré.

En tant que sculpteur, Mouss Black travaille principalement le bois et le fer, matériaux auxquels il adjoint parfois de la toile et des objets de récupération. Il intervient très peu sur le bois, lui laissant la forme que la nature a bien voulu lui donner, se contentant de donner un visage, d'inciser une bouche ou un sein. C'est sur le fer qu'il opère sérieusement, créant les objets dont il a besoin pour compléter le don du bois. Ensuite, il peut, selon l'inspiration, ajouter de la toile, des objets de récupération pour compléter le personnage toujours anthropomorphe, même si parfois on n'est pas loin de la caricature zoomorphe.

L'exposition multimédia Fasotopia 2075, qui a donné la latitude aux artistes d'imaginer le Burkina Faso dans un demi-siècle, Mouss Black y a participé avec une installation dénommée " La Maison ambiguë " composée de cinq sculptures et d'une toile arachnéenne avec des araignées qui se balancent sur des ficelles. Ces sculptures sont des personnages de bois et de fer, pour la plupart. Ce sont le féticheur handicapé, le vieux sage, la femme esseulée, l'orpailleur et le parolier. Ce dernier est simplement une tête qui est un bidon transformé.

Dans les dessins sur papier, il utilise le café pour camper un carnaval fantastique où l'érotisme n'est pas absent et où la provoc n'est jamais loin. C'est une féerie avec des personnages étranges, oscillant entre l'humain et l'animal, s'inscrivant dans le blanc du papier comme des apparitions. A l'instar de Life is beautiful, qui met en scène une danseuse, seins fermes et saillants comme des sagaies zoulou, croupe rebondie et jambe relevée montrant une cuisse ferme. Mais sur la tête, un masque dont l'ambivalence peut faire songer à la croix d'Agadez, ou simplement à une croix vaticane plantée sur le cou comme sur une tombe !

A côté de ses grandes œuvres, il crée un univers bigarré d'arthropodes avec des papillons aux ailes déployées, des coccinelles prenant leur envol, des scarabées dorés et des moucherons gris aux élytres étirés. Il n'en a pas encore fait une exposition mais il est évident que c'est la part de poésie ludique qui s'ajoute à une œuvre qui est une satire sociale. En effet, bien que jeune, il est très tourné vers les valeurs africaines dont il pense qu'elles font partie du viatique pour aller vers le futur car à renier leur patrimoine, les Africains se condamnent à n'être que de pales copies d'Européens, d'Asiatiques et d'Américains. C'est par conséquent dans cet engagement qu'il faut chercher l'explication du choix du nom Mouss Black. Il revendique d'entrer dans le monde qui vient, auréole de la culture et des valeurs nègres.

Mouss Black construit patiemment une œuvre singulière et culturellement anthropophage. On devine que cette jeune œuvre s'est repue des travaux des grands artistes contemporains d'Afrique. Paul Valery disait justement que " Rien de plus original, rien de plus "soi" que de se nourrir des autres. Mais il faut les digérer. Le lion est fait de mouton assimilé ".

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