Afrique: La France n'est pas (encore) l'Allemagne du XXIème siècle

Je vais vous parler de la Coupe du monde de football. Depuis 1982, la toute première dont j'ai de vrais souvenirs "adultes", celle de 1978 se (con)fondant, comme dans un générique final, avec les rubans et les paillettes tandis qu'Argentins et Hollandais se bousculaient à un poteau de corner. En ces temps-là, totaliser une centaine de sélections internationales (Franz Beckenbauer, 103 sélections de 1965 à 1977) attestait d'une exceptionnelle longévité au plus haut niveau.

Le record de Lothar Matthäus (150 sélections, de 1980 à 2000) avait été établi en un temps où la FIFA et l'UEFA ne surchargeaient pas encore le calendrier (et l'organisme des joueurs) d'un nombre incalculable de matchs internationaux via des compétitions saugrenues (Ligue des Nations). Actuellement, compter 200 sélections internationales sera bientôt envisageable à force d'agrandir le format des compétitions (une phase finale de Coupe du monde "open" à 52 pays: histoire de qualifier Madagascar, Singapour, Sri Lanka, Sao Tomé, Malte, Bahamas) et d'un calendrier à rallonges pour optimiser les droits télés. Comme 1982-2022 concerne un laps de temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, la génération actuelle devra faire le parti-pris de s'affranchir des debriefings forcément à la sauce cocorico des commentateurs français, en cette veille de finale entre l'Argentine et la France. Qu'entend-on ? Qu'il s'agit de la quatrième finale pour la France sur les sept dernières éditions.

%

Comme de bien entendu, ils ont arrêté le temps à 1998, année de leur premier titre en Coupe du monde. S'il est vrai qu'on a assisté, sur cette période, à une montée en puissance d'une équipe de France enfin décomplexée, elle est encore loin d'être "l'Allemagne du XXIème siècle" comme s'était hasardé à conclure un analyste encore plus chauvin que ses autres compatriotes. Sur la même période, l'Allemagne a aligné quatre demi-finales d'affilée en Coupe du monde (2002, 2006, 2010, 2014) et trois demi-finales successives en Coupe d'Europe (2008, 2012, 2016). En sortant du temps arbitrairement imparti par le chauvinisme gaulois, on réalise qu'à la Coupe du monde, trois finales brésiliennes de rang (1994, 1998, 2002) ont succédé à trois autres finales allemandes consécutives (1982, 1986, 1990). Il ne faut pas que les auditeurs contemporains se méprennent sur les faits, anciens mais têtus. Après un temps allemand, la parenthèse espagnole (Euro 2008, Coupe du monde 2010, Euro 2012), L'Équipe ou France-Football seront prompts à proclamer une période française.

La Coupe du monde 1982, c'était celle de la fameuse demi-finale Allemagne-France à Séville. Mériter d'être "l'Allemagne du XXIème siècle", c'est faire au moins aussi bien que l'Allemagne du XXème siècle. Et marquer les esprits à un point tel qu'un Anglais désabusé comme Gary Lineker se fende de son désormais fameux "Le football est un sport qui se joue à onze, et à la fin, c'est l'Allemagne qui gagne". De 1972 à 1996, l'Allemagne c'était tout de même trois finales d'Euro à la suite (1972, 1976, 1980), à cheval sur trois finales de Coupe du monde enfilées (1982, 1986, 1990), presque logiquement suivies de deux autres finales à l'Euro (1992, 1996). Une victoire finale de l'Argentine de Lionel Messi contre la France, ce dimanche, ramènera tout le monde à la raison.

AllAfrica publie environ 600 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.