Madagascar: Cour suprême - Les magistrats et les OPJ rappelés à l'ordre

Le nouveau procureur général près la Cour de Cassation a prêté serment, hier. Dans son discours d'installation, il a lancé un rappel à l'ordre à l'endroit des magistrats et des officiers de police judiciaire.

Des requêtes plutôt que des ordres. C'est le mot choisi par Benjamin Alexis Rakoto-mandimby, nouveau Procureur général près la Cour Suprême (PGCS), pour que ses consignes passent sans heurter les sensibilités. Dans son discours d'installation, hier, il a fait un rappel des fondamentaux aux magistrats et aux acteurs du système judiciaire dont les Officiers de police judiciaire (OPJ), que sont les policiers et les gendarmes.

Les magistrats sont les premiers destinataires des "requêtes", qui sonnent comme un rappel à l'ordre de la part du néo-PGCS. Le premier point concerne la redevabilité vis-à-vis des justiciables. À l'entendre, les rapports publics sont un des moyens pour cela. Aussi, il requiert à chaque Cour d'Appel, chaque tribunal administratif et chaque tribunal financier de procéder à des rapports publics annuels, comme cela se fait à la Cour Suprême, à chaque début d'année.

"Les cérémonies solennelles pour effectuer ces rapports publics doivent se tenir au plus tard en février", soutient Benjamin Alexis Rakotoman-dimby. "Invitez tous ceux qui doivent y être présents, les élus, les représentants de l'État, les communautés locales. Faites leur part de votre travail à la population pour que ce ne soient pas d'autres qui le fassent", ajoute-t-il. Ces rapports publics doivent aussi être l'occasion de faire une projection du travail et des améliorations à faire durant la nouvelle année.

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Le PGCS rappelle également aux responsables des différentes juridictions le devoir de faire un rapport d'activité périodique chaque mois, chaque trimestre et annuellement à la Cour Suprême et au ministère de la Justice, "sans quoi comment voulez-vous que le ministre puisse évaluer notre travail et connaître les difficultés que nous rencontrons". L'occasion pour lui d'aborder la question de la performance ainsi que celles des notations et des primes y afférentes.

Pour Benjamin Alexis Rakotomandimby, "les notations doivent se faire sans complaisance". À s'en tenir à ses dires, il est partisan de l'idée que les primes doivent être évaluées selon les performances des magistrats et ne doivent pas être standardisées ou systématiques. Le second point sur lequel le nouveau procureur général de la Cour Suprême a fait une mise en garde est celui relatif à l'exemplarité et le devoir de réserve des magistrats.

Motif irrecevable

Selon le néo-PGSC, "la vie privée", est un motif irrecevable lorsqu'il s'agit de l'exemplarité et le devoir de réserve qui s'impose à chaque magistrat. En toutes circonstances, ces deux principes doivent prévaloir à l'entendre. Outre le comportement, il met l'accent sur l'interdiction pour un magistrat de commenter des actes judiciaires, sauf autorisation préalable de son supérieur hiérarchique. Pareillement pour l'obligation de réserve vis-à-vis de la politique.

"Les magistrats et les greffiers doivent se garder de tout commentaire sur la vie politique dans le pays", soutient ainsi Benjamin Alexis Rakotoman-dimby. Ce rappel à l'ordre fait écho à une note émise par la Cour Suprême, mais qui reste lettre morte. Sur les réseaux surtout, plusieurs magistrats opinent sur des décisions de justice, ou qui affichent ostentatoirement leur opinion et obédience politique. Des écarts sur lesquels le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), est impassible.

S'agissant du respect des principes, des procédures et de la loi, le PGCS affirme, par ailleurs, que la subordination hiérarchique à laquelle est soumis le ministère public, ne signifie pas appliquer les yeux fermés, "les ordres". Selon celui qui est le numéro du ministère public à Madagascar, "il est de votre devoir d'expliquer et conseiller votre supérieur hiérarchique des conséquences des ordres qu'il donne".

Dans son discours d'installation, Benjamin Alexis Rakotomandimby a rappelé un point souvent oublié, voire renieé par certains chefs des ministères publics auprès des différentes juridictions. Il leur appartient, en effet, de s'exprimer publiquement sur les affaires et actes judiciaires, d'en informer le public ou de les expliquer. Aussi, il rappelle la hiérarchie entre le ministère public, plus communément appelé Parquet, et les Officiers de police judiciaire (OPJ), que sont les policiers et les gendarmes.

Les dispositions légales imposent aux OPJ d'informer le Parquet le plus rapidement possible des affaires qu'ils prennent en main. "Que ce ne soit pas la presse qui ait la primeur des affaires que vous traitez", lance alors Benjamin Alexis Rakotoman-dimby. Il leur demande de ne pas verser dans "le populisme". "Je ne vous empêche pas de donner des conférences de presse. Seulement, que ce vous allez dire soit préalablement concerté [avec le Parquet]", conclut-il.

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