Madagascar: Apport culinaire asiatique fondamental

En ces fêtes de fin d'année, les Notes du passé reprennent quelques articles déjà publiés. Il s'agit d'anciennes recettes et d'une étude accomplie par de " savants ethnographes ", dans les années 1950. Ces derniers décèlent dans le peuplement de Madagascar des origines diverses, tandis qu'une faible partie de la population est européenne ou africaine, et comme la population qui s'en nourrit, "la cuisine locale est composite. " D'autant plus " qu'il s'y ajoute encore un élément créole des Mascareignes ".

Si l'apport africain se réduit à presque rien, la préparation du manioc et de ses feuilles pour la consommation, par exemple, l'apport asiatique est " fondamental ". Ainsi, la technique du riz importé par les Indonésiens se traduit, sur le plan culinaire, par des préparations conformes à celles de leur pays d'origine. En tant qu'aliment de base, le riz est consommé, en général, cuit à l'eau et sans addition d'autre élément. " Les mots malgaches vary maina ou ampangoro désignent ce qu'il est convenu d'appeler le riz créole. "

Les variétés utilisée sont très nombreuses et de qualité supérieure puisqu'il est admis que " le vary lava local est la souche des riz de Caroline ". C'est encore avec le riz que l'on prépare la boisson traditionnelle " qui rappelle de loin le thé " et que l'on appelle ranon'ampango. C'est une décoction à l'eau des éléments de riz plus ou moins rôtis, plus ou moins brûlés qui s'attachent à la marmite. Le riz est rarement consommé au naturel. Au moment de le manger, on y incorpore presque toujours d'autres préparations qui sont, en général, des sauces de viandes et de légumes coupés presque souvent en menus morceaux comme en Extrême-Orient. La variété et l'abondance de ces préparations ont un caractère asiatique. Témoin ce repas du 25 juin 1855 qui a lieu chez le Premier ministre Raharo (Rainivoninahitriniony), et qui est offert par Ranavalona Ire à Lambert et au RP Finaz, lors de leur arrivée à Antananarivo, en présence de Jean Laborde. Le Journal du père Finaz relate ce festin " digne d'un grand Mogol ".

" Tout ce que produit Madagascar : toutes les espèces de gibiers, les animaux domestiques, les fruits et les plantes de la terre, ce qui vit dans l'eau ; en un mot, tout ce qui se mange (à l'exception du porc et de la grenouille qui ne peuvent entrer dans la ville de Tananarive), depuis le veau arraché au ventre de la mère pleine depuis trois mois seulement et qu'on tue pour en tirer ce mets délicat, jusqu'à de petites sauterelles très rares et très recherchées, délices des Grands, et une espèce de cancrelat qui vit dans l'eau... C'eut été une impolitesse de ne pas goûter à tous les plats. Ces mets étaient accommodés au suif... Nous avons bien vu paraitre sur la table cent cinquante à deux cents mets... Si M. Lambert n'avait insisté pour quitter la salle, nous y serions restés vingt quatre heures... Mais quel supplice affreux pour nous trois Français de rester ainsi à table dix heures et demie, condamnés à manger de tout ce était présenté ! "

Les viandes rôties ou grillées ne sont pourtant pas inhabituelles. La cuisine bouillie, la plus usuelle, est constituée de kitsakitsa et de ro qui sont composés de potages et de bouillons, tandis que la cuisine ritra est à base de viandes cuites à l'étouffée. La cuisine bouillie est technique de femmes et s'explique par " le manque ou la rareté des combustibles rapides ". À l'époque, on se sert de feux lents ou faiblement alimentés d'herbes sèches, bozaka, quand ce n'est pas de bouses de vache séchées.

La technique des viandes rôties et, au contraire, l'apanage des hommes. C'est même, au premier chef, " la préparation noble et royale par excellence ". La légende s'en est mêlée et l'on rapporte que le roi merina Ralambo, se rendant un jour à sa résidence d'Ambohidrabiby, rencontre sur son chemin de superbes bêtes appelées alors jamoka. Il lui serait venu à l'idée d'en manger, " ce qui, selon de savants historiens, n'a jamais eu lieu ".

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