La commission d'enquête internationale sur les événements du 20 octobre 2022, séjourne à N'Djamena. Mais, la composition de cette commission suscite des critiques.
Alors que l'opinion nationale et internationale continuent d'exiger la mise sur pied d'une commission d'enquête composée de plusieurs institutions internationales, c'est plutôt une commission régionale dirigée par la Communauté économique des États de l'Afrique centrale, la CEEAC, qui séjourne à N'Djamena depuis bientôt deux semaines. Même si les membres de cette commission affirment que des courriers ont été adressés aux Nations-Unies, à l'Union européenne, à l'Union Africaine afin que ces organisations se joignent à la mission d'enquête en cours, le politologue Evariste Ngarleme Toldé doute de la crédibilité des conclusions de cette enquête attendue dans les jours à venir.
"Tout le monde sait que la Communauté économique des États de l'Afrique centrale CEEAC est une institution qui soutient à bras le corps le régime en place. Et le fait que certaines organisations ne soient pas de l'équipe, décrédibilise la mission en cours. C'est pourquoi on s'interroge de savoir si c'est une mission préliminaire auquel cas, ce n'est pas encore la mission qui est attendue et qui pourra faire la lumière sur les événements du 20 octobre 2022.
Tant que les autres organisations ne sont pas associées, notamment : l'Union africaine, l'Union européenne et les Nations unies, on ne peut pas attendre grand-chose, parce que tout le monde connaît la position de la CEEAC dans cette crise tchadienne" explique-t-il à la Deutsche Welle.
Des exigences
Le Barreau du Tchad qui a été également contacté par les membres de cette mission dit avoir refusé d'échanger sur le fond avec cette commission d'enquête. Les avocats exigent la mise sur pied d'une commission véritablement indépendante, et la suspension des travaux de la commission dirigée par la CEEAC.
"Nous avons rappelé la position du Barreau du Tchad qui consiste à ce que soit mise en place une commission d'enquête indépendante placée sous les auspices d'une institution internationale crédible. Et nous avons rappelé que le 36e congrès de la Conférence Internationale des Barreaux, tenu à Niamey (Niger) du 07 au 09 décembre 2022 a pris également des résolutions dans le même sens. Et donc, nous en appelons les autorités de la transition, les Nations Unies, l'Union européenne, l'Union africaine et les autres partenaires du Tchad de prendre au sérieux ce qui s'est passé le 20 octobre 2022 au Tchad.
Que toute la lumière soit faite et de façon indépendante" précise Maître Laguerre Djérandi Dionro, Bâtonnier de l'ordre des avocats du Tchad.
Pour de nombreux Tchadiens, il faut surtout éviter le scénario de 2008. La commission d'enquête mise en place par le gouvernement pour faire la lumière sur les événements de février 2008 n'avait pas pu élucider les circonstances de la disparition de l'opposant Ibni Oumar Mahamat Saleh et bien d'autres Tchadiens, à la suite d'une attaque rebelle sur N'Djamena.
Ni les membres de la commission dirigée par la CEEAC ni le gouvernement tchadien, n'ont souhaité répondre aux sollicitations de la Deutsche Welle. La répression des manifestations du 20 octobre avaient fait officiellement une cinquantaine de morts. D'autres sources évoquent près de 200 morts.