Le marché du crypto-art né aux États-Unis émerge en Afrique. La valeur de ces œuvres entièrement virtuelles est garantie par les NFT, des certificats de propriété numérique fondés sur la technologie blockchain. En octobre 2021, le Nigérian Prince Jacon Osinachi est le premier artiste africain à participer à des enchères de NFT à la maison de vente Christie's à Londres. Depuis, ses œuvres numériques se vendent des milliers d'euros et de nombreux artistes du continent s'en inspirent.
Depuis qu'il a été happé par l'univers des NFT, Rick Lane, Sud-Africain âgé de 24 ans, navigue entre le réel et le virtuel. Sa marque de fabrique, ce sont ses portraits peints à l'huile sur toile puis scannées et retouchés sur Photoshop. Sa plus grosse vente s'élève à 500 dollars. " Ça n'est qu'un début ", confie ce jeune talent qui espère un jour vivre de la crypto. " Je suis tout nouveau sur le marché. Mais quand je vends une pièce, ça aide ma mère, se réjouit le jeune artiste. Elle gère un commerce et certains mois, c'est vraiment difficile. Alors, je peux l'aider à payer les courses, le loyer, les factures... "
La valeur de son travail, Rick Lane la mesure surtout sur le plan artistique. Son style hyperréaliste teinté de couleurs chaudes sort du lot et séduit les collectionneurs de ce monde virtuel. " Avec les NFT, c'est différent, c'est vous qui créez et les gens qui achètent, explique-t-il. Vous gardez votre identité, vous gardez votre liberté. Et tous les droits d'auteurs vous reviennent. " Le choix des NFT est aussi, pour le jeune artiste, une manière de s'affranchir des règles de l'art traditionnel : " C'est facile, tu as juste besoin d'internet et de ton ordinateur pour y arriver. Ce qui compte vraiment, c'est "Qu'apportes-tu de nouveau ? Est-ce que tu es inspirant ?" ".
Des résistances locales
Ce marché devrait compter deux fois plus d'utilisateurs d'ici à quelques années au Nigéria et en Afrique du Sud. Mais pour se faire une place sur la scène du crypto-art, les artistes africains doivent surmonter plusieurs obstacles comme la faible qualité des connexions Internet dans leurs pays ou encore la difficile conversion des cryptomonnaies en monnaies locales. Par exemple, " on voit que la banque centrale nigériane fait la guerre aux crypto-monnaies, illustre Axel Reynes, spécialiste des NFT. Par exemple, au Maroc, il est difficile de sortir des capitaux, les crypto-monnaies ne sont pas du tout reconnues comme une alternative. "
Toutefois, malgré l'instabilité du marché, les contraintes des banques centrales et des différentes législations nationales, Alex Reynes constate que l'on voit " de plus en plus d'artistes africains et de plus en plus de consommateurs d'origine africaine " arriver sur le marché. Pour ce spécialiste, il y a bien une croissance constante des NFT en Afrique qui " ne va pas s'arrêter, bien évidemment. Au contraire, qui va progresser, se renforcer, se solidifier ". Un mouvement qui va permettre aux artistes qui émergent sur le continent de " pouvoir s'élever sur la scène mondiale et de faire connaître leur art avant tout ".