L'image a fait le tour des réseaux sociaux et a été abondamment commentée par les internautes : Laurent Gbagbo procédant, hier, à son inscription sur la liste électorale, sous le regard jubilatoire de quelques responsables de son parti, relayé aussitôt par une horde de partisans poussant, notamment à Yopougon, des cris de joie.
Dans le compte rendu qu'il fait de cette action posée par son président, le service de communication du Parti des peuples africains Côte d'Ivoire (PPA-CI) rappelle, à juste titre, que " l'inscription sur la liste électorale étant volontaire, il lui appartenait d'exprimer sa volonté citoyenne de s'inscrire à nouveau sur la liste électorale. C'est ce qu'il a fait aujourd'hui (ndlr : hier)".
Le problème, c'est qu'entre s'inscrire sur la liste électorale et y figurer définitivement, il y a tout un processus, mais aussi et surtout des conditions à remplir. En plus d'être Ivoirien, âgé de plus de 18 ans, il faut jouir de ses droits civiques, notamment le droit de vote, d'élection, d'éligibilité. Ce qui n'est pas le cas de Laurent Gbagbo. En effet, l'ex-chef d'Etat a été retiré de la liste électorale en 2020.
La raison évoquée par le président de la Commission électorale indépendante (CEI) est que le président du PPA-CI a été condamné à 20 ans de prison dans l'affaire dite du " braquage de la BCEAO ". Lors de la crise post-électorale de 2010-2011, son régime, alors sous embargo financier, s'était servi dans les caisses de l'agence locale de la Banque centrale des États d'Afrique de l'Ouest pour se fournir en liquidités.
La situation de l'ex-chef de l'Etat entre la présidentielle de 2020 et aujourd'hui n'a pas varié. Laurent Gbagbo a certes bénéficié, le 6 août dernier, d'une grâce présidentielle, mais cela ne change pas sa condition de quelqu'un qui est condamné à 20 ans d'emprisonnement. La grâce présidentielle lui permet tout juste de ne pas aller en prison. Elle n'efface pas la condamnation.
Tout citoyen ivoirien peut donc se prévaloir de cette décision de justice pour réclamer la radiation de l'ex-chef d'Etat sur la liste électorale. Tout comme la CEI, elle-même, peut le faire comme ce fut le cas à la présidentielle. De ce qui précède, on peut écrire que Gbagbo se fait enrôler pour rien. Les juristes de son camp le savent. Laurent Gbagbo lui-même le sait. Aussi cet acte, s'apparente-t-il à un baroud d'honneur, un combat désespéré, un coup de " com " ; un ultime acte désespéré pour sauver l'honneur. Question de dire à ses partisans : " j'ai tout essayé. Mais ils m'ont éliminé ".