Vers la fin du XVIIIe siècle, le négociant-voyageur Lebel quitte la France pour l'Ile-de-France (actuelle ile Maurice). Il y débarque peu avant le 13 mai 1779, date de sa première lettre à Céré, naturaliste du Jardin des Plantes de cette ile. Très vite, Lebel sait se faire apprécier et il se voit muter au Jardin des Pamplemousses en qualité de commis aux écritures.
Quelques années plus tard, il peut se rendre acquéreur d'un bateau et se lance dans le commerce de la traite. Son négoce semble l'avoir mené principalement sur la côte africaine, au Mozambique, et de là, aux iles Seychelles " où il aurait introduit des esclaves" (Les tribulations de Lebel négociant-voyageur sur les Hauts-Plateaux malgaches 1800-1803, J.C. Hébert, Omaly sy Anio, juillet-décembre 1979). Ces iles, situées au Nord-Est de Madagascar, ne sont qu'un relais pour atteindre les Mascareignes, sur le trajet normal commandé par la direction des vents alizés. Pourtant, la Révolution française ne lui amène que des déboires.
Cela interrompt la traite pendant une dizaine d'années. Dans son ouvrage La Route des iles. Contribution à l'histoire maritime des Mascareignes, Auguste Toussaint remarque que, pendant sept ans, de 1795 à 1801, aucune opération de traite négrière n'est relevée dans cette région de l'océan Indien. Ce qui s'explique du fait de sa prohibition par les Assemblées des iles qui obéissent "tardivement" aux consignes révolutionnaires de la France. De plus, ses nombreux débiteurs ne paient pas Lebel, et " il se trouva lui-même aux abois ". En 1797, il achète un nouveau bateau, l'Elisabeth, mais ses créanciers le font saisir. Il peut cependant lever la saisie pendant une dizaine d'années et, ayant acheté des marchandises de traite, il part de l'Ile-de-France, le 3 aout 1798, pour commercer à Madagascar.
Mal lui en prend, souligne J.C. Hébert. " Il n'y avait pas sept jours qu'il était arrivé en rade de Tamatave que son brick fut saisi par les Anglais, le 24 thermidor (13 aout), alors qu'il chargeait du fret. " Il sauve toutefois une partie de sa cargaison, mais il se fait ensuite voler et son magasin est incendié, en aout 1798 ! Ses malheurs ne s'arrêtent pas là. Il est atteint par les fièvres et reste malade durant l'année 1799. Pour se remettre, il va " dans les montagnes " comme il le dit, où il accomplit un séjour de huit mois. C'est à cette époque qu'il fait la connaissance d'André Michaux, un botaniste installé à Isatrana avec son confrère Chapelier. Selon J.C. Hébert, André Michaux est membre de l'expédition Baudin qui doit explorer les terres australes.
Il l'abandonne à l'Ile-de-France en 1801 pour se consacrer à Madagascar où il meurt bientôt. Quant à Chapelier, naturaliste-voyageur, il effectue sur la côte Est de Madagascar un séjour de douze ans où il réalise de remarquables travaux de botanique. Il décède à l'âge de 28 ans, le 6 décembre 1806. Fin 1800, Lebel se trouve à Iaroka, petite bourgade sur le fleuve du même nom (aujourd' hui le Rianala) et située sur l'itinéraire des traitants qui vont de Toamasina jusque que dans l'Ankay, en suivant les chemins des Hauts-Plateaux imériniens. En mars 1801, après quatre mois passés à Iaroka, il est, dit-il, " contraint d'aller en voyage pour vendre ce qu'il avait pu sauver ".
J.C. Hébert s'étonne qu'il lui soit encore resté des marchandises depuis aout 1798. En tout cas, il part pour l'intérieur de l'Imerina après avoir formé une petite expédition grâce aux relations qu'il s'est faites. En effet, dans une lettre à Céré, il "avoue" qu'il a reçu pour femme, " la petite-fille unique de Tama-Sin-Dia (Toamasin'Andria) des mains de son grand-père " et qu'il est lié avec Tsialana, frère du roi Zakavola, chef de Toamasina. Selon H.C. Hébert, ses relations semblent être encore meilleures avec les gens d'Iaroka où il se familiarise avec la langue locale. Il engage des porteurs et s'enfonce dans la forêt de l'Est, en direction de l'Ankay. Là, il doit attendre plus d'un mois la saison de la traite, ne pouvant ramener des esclaves avant que les bateaux négriers ne soient annoncés sur rade. Il en aurait profité pour continuer sa route en direction d'Antananarivo, dépassant les Montagnes de Tanambolo (l'Angavo) fin mai-début juin 1801.