Ile Maurice: Grâce présidentielle - Une décision lourde de conséquences

La récente grâce présidentielle accordée au fils du commissaire de police, Chandra Prakash Dip, dont la peine de prison a été commuée en une amende, soulève les passions. Mais elle vient aussi remettre sur le tapis les rouages de cette procédure. Comment elle s'obtient... et les risques qu'elle comporte.

La Constitution de Maurice prévoit des prérogatives pour le président de la République, dont la grâce présidentielle, qui est prévue à l'article 75(1). Cependant, le président n'accorde cette grâce que sur la recommandation de la Commission de pourvoi en grâce. Si ce sursis a permis à bon nombre de condamnés d'avoir une deuxième chance, c'est aussi une décision avec de lourdes implications, surtout quand des bénéficiaires succombent à leurs vieux démons et récidivent. Les cas de Christophe Perrine et Ashley Pompe (voir hors-texte) nous ramènent aux risques potentiels de ces recommandations.

Selon l'article 75(2) de notre Constitution, la Commission de pourvoi en grâce est composée d'un chairman et d'au moins deux autres membres. Leur nomination est faite par le président de la République qui agit de son propre chef. Ainsi, pour qu'un détenu obtienne la grâce présidentielle, il doit faire une demande formelle, de sa propre initiative ou à travers une lettre rédigée par son représentant légal. Une demande peut être formulée pour une grâce complète, soit un "free-pardon", qui rend son certificat de moralité vierge. Certains peuvent demander une réduction de leur sentence et dans d'autres cas, des détenus demandent à bénéficier d'un répit de quelques heures ou quelques jours hors de la prison, mais sur des conditions bien spécifiques.

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Les membres de la Commission de pourvoi en grâce se rencontrent chaque quinzaine pour se pencher sur les demandes ou pétitions reçues sur une base mensuelle. La commission peut avoir une centaine de cas chaque mois et ses membres se consultent pour déterminer qui seront les heureux élus. La commission traite de tous les délits, qu'ils soient mineurs ou plus sérieux tels que les condamnations pour délit de drogue ou meurtre. Les recommandations sont ensuite envoyées au président de la République qui donne alors son aval.

En 2019, le cas de Christophe Perrine et celui de Diop Bhoyroo, qui avaient récidivé après avoir obtenu la grâce présidentielle, avait interpellé les autorités pénitentiaires et le commissaire des prisons d'alors, Vinod Appadoo. Ce dernier avait même enclenché un projet de réforme pour que tous les détenus passent par une procédure standard. Cependant, sa proposition n'avait pas eu de suite. Quatre ans plus tard, la grâce présidentielle accordée au fils du commissaire de Police, Chandra Prakash Dip, dont la peine de 12 mois de prison pour entente délictueuse est commuée en une amende de Rs 100 000, vient raviver les débats sur les décisions de la Commission de pourvoi en grâce. Avant lui, plusieurs condamnés ont obtenu la grâce présidentielle, dont Poonsamy Poongavanam, un condamné à mort pour meurtre qui sera gracié après 21 ans passés en prison ou encore les frères Sumodhee, condamnés à la prison, à vie aux assises en novembre 2010 pour avoir mis le feu à la maison de jeu l'Amicale. En octobre 2015, leur peine de prison à vie avait été commuée en une peine de 18 ans de prison. Si certains ont saisi cette grâce comme une deuxième chance pour se reprendre en main, d'autres y ont trouvé une opportunité pour faire pire encore.

Les récidivistes

Christophe Perrine

Christopher Perrine avait été condamné à 18 ans de prison en 2009 pour le viol d'une adolescente française qui était en vacances à Maurice. Ce récidiviste a aussi été épinglé pour plusieurs cas de vols.Mais en 2018, sa demande de la grâce présidentielle avait été agréée. Toutefois, quelques mois seulement après sa sortie de prison, il perpétrait un vol au domicile de l'adjointe au commissaire des prisons, Guneeta Aubeeluck, dont il avait même séquestré la fille.

Ashley Pompe

En avril 2019, Ashley Pompe est arrêté par la CID de Port-Louis Sud. Cet homme, qui avait bénéficié de la grâce présidentielle, avoue plusieurs vols commis après sa libération, dont des cambriolages dans des bungalows de la région de Pointeaux-Sables. Les victimes étaient des ressortissants étrangers. Un retraité en avait aussi fait les frais, après qu'Ashley Pompe l'avait attaqué à son domicile.

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