Tunisie: Front de Salut national - Sous l'emprise de la désillusion

10 Janvier 2023

Il est connu que les excès et les disproportions peuvent faire dériver la raison. On ne compte plus les dépassements et les débordements du Front du salut.

Dans ses différentes revendications, c'est à qui gagnera plus et plus vite. Sous l'emprise de la désillusion, ses principaux dirigeants veulent aujourd'hui éviter par tous les moyens l'extrême ligne du K.O. Quitte à faire démarrer la machine à fabriquer les accusations en tous genres.

Que reste-t-il aujourd'hui de l'art de la négociation et du dialogue quand le paysage politique vit désormais au rythme des polémiques, des querelles et des altercations sans répit ? Entre la plupart des différents acteurs, c'est la rhétorique des droits et des devoirs. C'est la petite chasse aux sorcières d'un côté comme de l'autre. Ici et là, on ne pense pas avec, on pense, et puis on agit contre. Tout cela ne fait que pousser au paroxysme "une logique de confrontation" qui foule aux pieds les traditions et les bonnes manières de l'action politique.

Le Front du salut, ses principaux investigateurs et ses alliés se donnent le droit de mettre en cause non seulement le pouvoir du Président de la République, mais aussi ses prérogatives et ses attributions. Ils sont déterminés à braver et même à combattre un état de fait qu'ils jugent "dépourvu de toute légitimité". Sur fond de récupération politique et de travail de sape, ils reviennent et ils s'acharnent, le plus souvent sans arguments de fond, sur tout ce qui pourrait faire revenir à l'avant-25 juillet 2021, avec tout ce qu'il comporte de désordre, de débauche et même de détresse pour le pays.

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Il est connu que les excès et les disproportions peuvent faire dériver la raison. On ne compte plus les dépassements et les débordements du Front du salut. Dans ses différentes revendications, c'est à qui gagnera plus et plus vite. Sous l'emprise de la désillusion et du désenchantement, ses principaux dirigeants veulent aujourd'hui éviter par tous les moyens l'extrême ligne du K.O. Quitte à faire démarrer la machine à fabriquer les accusations de tous bords. Mais c'est sans compter la réaction des habitants d'El Mnihla qui affirment, comme le confirment d'ailleurs les vidéos filmées à l'occasion, que les principaux dirigeants du mouvement ont été dégagés et sont rentrés bredouilles.

Ce n'est pas innocent !

Cela n'a pas empêché Nejib Chebbi d'assurer que "le Front a réussi son meeting devant le siège de la municipalité d'El Mnihla (Ariana), en dépit des tentatives des autorités d'interdire sa tenue", réaffirmant encore une fois et toujours sur la même lancée que "la Tunisie se prépare pour le changement et que personne ne pourra l'arrêter" et appelant ses sympathisants "à participer massivement, le 14 janvier prochain, au mouvement de protestation qui aura lieu à l'Avenue de la Révolution".

Même son de cloche chez Jaouhar Ben M'barek qui a publié le jour même un statut sur sa page Facebook dans lequel il fait état du succès du meeting "en dépit de l'attaque enclenchée par un groupe de soutien du Président de la République". Plus encore, il a tenu à saluer les habitants d'El Mnihla, pourtant quartier de Kaïs Saïed avant son ascension au pouvoir, pour " leur soutien " et précisant que "quelques photos de l'attaque ont été postées sur les réseaux rien que pour faire de la propagande... ".

Pour sa part, le chef de la Coordination des jeunes de Mnihla, Tarek Mejri, dénonce les accusations du Front du salut national "qui a qualifié les jeunes de Mnihla de milices fascistes soutenant Saïed".

Il rejette formellement et énergiquement "les accusations de violences verbales et physiques perpétrées contre les dirigeants et les militants du Front", ajoutant qu'elles sont "fausses et sans fondement".

Il indique même "qu'un nombre de citoyens qui n'habitent pas à Mnihla ont protesté et ont scandé "dégage" à l'encontre des dirigeants du Front sans avoir recours à la violence, en réponse à un discours qui sème la division entre les Tunisiens et incite à la violence et à la haine".

Enfin une source sécuritaire fait savoir quant à elle que "les forces de sécurité ont mis en place des barrières devant le siège de la municipalité pour empêcher tout rassemblement non autorisé et ont appelé toutes les parties à quitter les lieux".

Au-delà des versions, aussi contradictoires soient-elles, nous sommes de plus en plus convaincus que le Front du salut manque cruellement de réflexion et de référence. Il ne préconise pas de modèle politique, ni l'accomplissement d'un état d'esprit à son égard. Il semble oublier que la politique est une action qui vit et qui s'améliore au quotidien. L'on sait, et cela n'est pas nouveau, que ce qui s'y opère dès la création de ce mouvement n'est pas souvent innocent. Les dérapages successifs de ses principaux dirigeants désavouent les valeurs et les principes de l'action et des revendications politiques. Nous sommes en présence d'acteurs essentiellement préoccupés par des considérations personnelles et la plupart du temps extrapolitiques. Des considérations qui renvoient l'idée et l'image d'un cadre dénaturé et qui n'a plus le même entrain, ni les mêmes valeurs et les mêmes règles. Les défaillances ont pour noms manque de crédibilité, voire de légitimité, de maîtrise du temps et de l'espace. Manque de revendications à la fois fiables et convaincantes. Chaque phrase, chaque discours, chaque doléance ne relève pas de simples sentiments.

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